II.2. Paysage et lieu
Susanne Langer dit que « ... un lieu articulé
par l'empreinte de la vie humain doit sembler organique, comme une forme de vie
... le lieu qu'occupe une maison sur la face de la terre, c'est-à-dire
sa localisation dans l'espace réel, reste le lieu même si la
maison brûle ou est détruite et retirée. Mais le lieu
créé par l'architecte est illusion, engendré par
l'expression visible du sentiment, parfois appelé une
"atmosphère" (une ambiance). Ce genre de lieu disparaisse si la
maison est détruite... »83. Il faut admettre qu'un
lieu est une présence matérielle et visible. L'apparence des
édifices ou des éléments naturels sont les constituants
les plus évidents du lieu. C'est un ensemble d'éléments
physiques donné à la vision, un paysage visible. Cependant, ces
paysages sont une expression humaine et culturelle, de leurs concepteurs, qui
détermine la singularité et l'identité du lieu. Cette
réflexion est très proche de la théorie de l'esprit du
lieu (cf chapitre2), qui suggère une «persistance du lieu
»84 ou une continuité représentative, même
si le même lieu subit des changements dans sa configuration physique et
spatiale. Cela ne dénie, en aucun cas, l'importance de l'aspect physique
du
82 WALMSLEY D.J. & LEWIS G.J., «human
geography»: behavioural approaches, New York, 1984,
Longman, P64.
83 RALPH E., op. cit. P30.
84 Ibid. P31.
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Le monument historique et ses abords, une
représentation paysagère de l'identité
CHAPITRE
sociale et territoriale TROISIEME
paysage, du fait que c'est bien lui qui génère
la représentation mentale. Par contre, cette dernière est
considérée comme le composant intangible du paysage, qui
cristallise dans l'esprit de l'homme, l'identité du paysage et, selon
l'importance du lieu (le composant tangible de l'image), elle peut durer
même à l'ombre du changement physique, à l'exemple de la
maison où on se sent chez-soi avec un sentiment d'attachement et
d'appartenance, même si elle subit un changement de décor ou une
réorganisation de la disposition intérieure des pièces.
Cela peut être expliqué par le degré de l'engagement de
l'homme ou du groupe social dans son lieu et son attachement à sa
représentation paysagère, à l'exemple d'un individu qui
«...rentre à un lieu familier après une longue absence
sentant que tout soit changé, malgré qu'il n'y avait pas de
grands changements en son apparence. Alors qu'avant il était
impliqué dans l'image, maintenant il est un étranger, un
observateur et il peut reprendre la signification (et la
représentation paysagère) précédente que par un
acte de mémoire »85.
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