II. BASES THEORIQUE DE LA VALORISATION ECONOMIQUE DES
BIENS NON MARCHANDS
L'objectif est de pouvoir exprimer en grandeur
monétaire une diminution ou une augmentation de la fonction
d'utilité des individus, suit à une dégradation ou une
amélioration de la qualité du bien ou du service. Les
préférences des individus pour une qualité donnée
et le surplus du consommateur sont certainement les outils conceptuels les
mieux adaptés à la quantification de cette grandeur.
La théorie du choix du consommateur est basée
sur l'hypothèse fondamentale selon laquelle un individu cherche à
maximiser son utilité totale, c.à.d son surplus sous contrainte
de son revenu et des prix. Le surplus du consommateur étant la
différence entre la somme de monnaie maximale que le consommateur est
disposé à verser pour obtenir une certaine quantité d'un
bien et la dépense qu'il doit supporter pour obtenir la quantité
de bien considéré.
Les formalisations mathématiques du surplus selon les
analyses de Marshall et de Hicks sont retenues. Selon Marshall, le surplus du
consommateur se définit à partir de la courbe de demande du
marché qui est obtenue en faisant la sommation des demandes
individuelles. Si les prix varient, le surplus du consommateur variera en sens
opposé. Hicks, par contre, propose d'évaluer la variation du
bien-être d'un individu à partir de la courbe de demande
compensée.
Ainsi la prise en compte ou non de l'effet revenu conduit
à la définition de quatre(4) surplus du consommateur : La
variation compensatrice des prix, la variation compensatrice du revenu, la
variation équivalente des prix et la variation équivalente des
revenus.
La variation compensatrice du revenu donne la somme maximale
(minimale) qui doit être prélevée
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sur le revenu du consommateur (ajoutée au revenu du
consommateur) pour que son bien-être reste inchangé malgré
la baisse (la hausse) des prix.
Quant à la variation équivalente, elle mesure la
somme maximale (minimale) qui doit être donnée
(prélevée) à un consommateur pour maintenir son
bien-être à un niveau équivalent à une baisse
(hausse) de prix.
Pour apprécier le changement de la situation d'un
individu entre un état initial et un état final, on utilise
davantage la variation compensatrice du revenu et la variation
équivalente du revenu. La notion du surplus du consommateur se situe
donc entre variation compensatrice et variation équivalente du revenu.
Elle représente une approximation satisfaisante de la variation de
l'utilité du consommateur.
Les préférences des individus sont
révélées sur le marché et s'exprime en terme de
consentement à payer (CAP) et de consentement à recevoir (CAR).
Le CAP est la somme maximale d'argent qu'un individu est prêt à
payer plutôt que de renoncer à une amélioration d'un
service rendu par un service non marchand. Le CAR est la somme minimale
d'argent qu'un individu exigerait pour volontairement renoncer à une
amélioration de la qualité de service rendu par un bien non
marchand. Autrement dit, c'est la compensation monétaire que le
consommateur est prêt à recevoir pour subir une perte de
bien-être.
Le CAP se réfère au niveau initial
d'utilité, c'est-à-dire au bien être actuel tel qu'il est
vécu par la personne interrogée. Ce choix conduit donc à
raisonner par rapport à une situation connue, plus facile à
appréhender que celle qu'implique le CAR. Une critique traditionnelle de
l'utilisation du CAR porte sur l'absence de contrainte budgétaire qui
peut conduire les personnes interrogées à des annonces
irréalistes.
En pratique, on choisit généralement
d'évaluer le CAP, c'est-à-dire la variation de revenu
compensatoire en cas d'amélioration, et la variation de revenu
équivalente en cas de détérioration. Deux raisons sont
à l'origine de ce choix. Théoriquement, d'une part, le CAP donne
une valeur minimale de la variation de bien-être à évaluer,
ce qui permet de défendre sa crédibilité, dans le cadre
d'une action en justice, par exemple, où des dommages et
intérêts seraient demandés. Cette première analyse
ne donne éthiquement que très peu de crédit à la
primauté du CAP sur le CAR, puisqu'elle ne se justifierait que par la
crédibilité qu'elle offre face à la justice et non sur une
base éthique ou déontologique. Empiriquement, d'autre part,
l'écart entre CAP et CAR est aggravé par le fait que les agents
ont tendance à valoriser davantage toute perte de bien-être que
les gains équivalents, et toute réduction de leurs pertes que les
réductions de gains envisageables.
Cependant, un tel choix est contesté : rien ne justifie
d'écarter le CAR sous prétexte qu'il est très fort, voire
infini.
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Les méthodes d'évaluation des biens non marchands
peuvent être classées en trois catégories.
La première catégorie consiste à
évaluer le consentement à payer pour des mesures de protection de
ces biens par référence à des marchés existants
considérés comme « marchés de substitution »,
c'est- à dire se substituant à un marché qui n'existe pas
en tant que tel.
La deuxième catégorie de méthode s'efforce
d'affecter une valeur monétaire à des dommages
préalablement évalués en termes non monétaire
(physique).
La troisième catégorie de méthode, en
créant un marché artificiel ou « quasi-marché »,
a pour objectif de réaliser une évaluation directe des fonctions
de demande.
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