L'humanisation des lieux de détention au Cameroun( Télécharger le fichier original )par Vincent Pascal MOUEN MOUEN Université catholique d'Afrique centrale - Master en droits de l'homme et action humanitaire 2009 |
B- La modestie du budget d'investissement de l'administration pénitentiaireLes besoins réels d'investissement, et de modernisation du système pénitentiaire sont rarement pris en compte dans la répartition des ressources budgétaires. Pourtant, l'état de délabrement des centres pénitentiaires au Cameroun est très avancé. La description que fait Rogatien TEJIOZEM est à ce sujet assez édifiante : « La caractéristique principale de ces établissements pénitentiaires est qu'ils sont, pour la plupart, logés dans de vieilles bâtisses de récupération héritées de l'époque coloniale et ayant subi quelques aménagements. Leur exiguïté fait en sorte qu'ils ne permettent pas de répondre positivement aux exigences de sécurité et de stricte séparation des différentes catégories des détenus, ni de traitement humain de ces derniers. Aucun de ces établissements pénitentiaires ne dispose de cellules individuelles, les locaux de détention étant constitués des dortoirs accueillants des dizaines voire des centaines de détenus. De même, les locaux administratifs sont insuffisants, exigus, mal entretenus, n'offrant pas au personnel les possibilités et les commodités nécessaires pour l'accomplissement de sa tache administrative ».149(*) L'investissement dans le système pénitentiaire est quasi inexistant. Le Comité ad hoc chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique pénitentiaire et de la réforme du système carcéral, note que « les lits et les matelas sont en nombre insuffisants et dans certaines prisons comme celle de Guider, ils sont inexistants. A Douala, près de la moitié des détenus dorment dehors dans ce qu'ils appellent «Kito'' et parfois à même le sol ».150(*) Le tableau N° 7 présente en millions de frs cfa, le budget d'investissement des différentes composantes du système pénitentiaire et leur pourcentage par rapport au budget du ministère de tutelle. Tableau n° 7 :
Source : données recueillies dans le document de politique pénitentiaire et stratégie de réforme du système carcéral, 2006, p. 30. Il se dégage au regard du tableau ci-dessus, que le budget réservé à l'investissement au MINADT reste très faible. Au cours de la période 2001- 2002, le budget d'investissement du système pénitentiaire était en moyenne de 23,41% du budget du ministère de tutelle. Mais entre 2002 et 2005, ce budget a connu une forte réduction pour atteindre une moyenne de 10,5% du budget d'investissement de la tutelle, soit un retrait de moitié par rapport au budget 2001-2002. On comprend donc aisément que « la tendance de la dotation financière du système pénitentiaire n'est pas celle de la réforme (investissement), ni du renforcement du fonctionnement de ce système (entretiens prioritaires et amélioration des conditions des détenus)».151(*) Les cas particuliers des prisons et de l'ENAP permettent de conclure au manque d'intérêt de l'administration pour le système pénitentiaire. En effet, le budget d'investissement des prisons a régressé entre 2001 et 2005 passant de 25,64 à 5 % du budget d'investissement de la tutelle pendant que celui de l'ENAP restait dérisoire avec une moyenne de l'ordre de 2,2% du budget d'investissement de la tutelle. Ce qui justifie bien la réflexion selon laquelle « les dotations (budgétaires) ne tiennent pas compte des exigences d'humanisation des conditions de détention ni celles liées à la réhabilitation des infrastructures d'incarcération ».152(*) La modicité des allocations budgétaires rend donc l'institution carcérale fortement dépendante des actions caritatives. * 149 TEJIOZEM (Rogatien), op.cit.pp72-73. * 150 Comité ad hoc chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique pénitentiaire et de la réforme du système carcéral, op cit. p. 32. * 151 Comité ad hoc chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique pénitentiaire et de la réforme du système carcéral, op. cit. p.31. * 152 Comité ad hoc chargé de l'élaboration d'une nouvelle politique pénitentiaire et de la réforme du système carcéral, op. cit. p.29. |
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