Du mercenariat aux entreprises de services de sécurité et de défense : la question de l'externalisation dans les forces armées françaises( Télécharger le fichier original )par François Le Gallic Ecole de l'air - Sciences Po Aix - Diplôme de Sciences Po Aix 2013 |
3 / Chartes éthiques et codes de déontologie : vers une standardisation internationale« Gouverner, c'est prévoir. », Emile de Girardin Face à la disparité des législations nationales, il existe depuis cinq ans une volonté de standardisation internationale dont témoigne l'adoption de plusieurs documents visant à promouvoir le respect de bonnes pratiques au sein du secteur de la sécurité privée.
Le Code de conduite international68 a été adopté à Genève et promu le 9 novembre 2010. Particularité, il ne s'adresse pas aux Etats mais aux entreprises. S'inspirant du Document de Montreux, il résulte d'une initiative des entreprises anglo-saxonnes et vise à organiser le secteur de la sécurité privée à l'échelle internationale. Plus précisément, le Code de conduite est un « label qualité » que l'on pourrait comparer à une charte éthique à laquelle les entreprises décident d'adhérer ou non. Si la France a participé aux travaux préparatoires, elle est restée en marge du processus. En effet, lors de la signature de l'ICoC, aucun représentant 68 International Code of Conduct For Private Security Service Providers, également appelé ICoC. 47 des autorités françaises (militaires ou civiles) n'était présent, contrairement aux Britanniques qui avaient envoyé une demi-douzaine de représentants de leur Ministry of Defence (MoD). Par ailleurs, si seulement 58 sociétés ont initialement participé à sa signature, elles étaient en revanche 554 à l'avoir signé au 1er décembre 2012. On trouve parmi elles onze entreprises françaises69. C'est très peu, car cela représente un peu moins de 2% du total. Or, il est fort probable que l'adhésion à l'ICoC devienne un prérequis obligatoire dans la signature de futurs contrats impliquant des services de sécurité et de défense. Comme le note également les députés Christian Ménard et Jean-Claude Viollet, l'ICoC « pourrait devenir incontournable dans les faits, un nombre important d'acteurs étant certainement conduit à l'exiger dans les appels d'offres. On pense notamment aux Gouvernements anglo-saxons, grands pourvoyeurs de contrats pour les ESSD, mais également à des organisations internationales, et notamment l'ONU, ou encore aux grandes ONG.70 » C) ASIS International ou la certification du secteur de la sécurité aux Etats-UnisSi le Document de Montreux et l'ICoC ont été développées dans un cadre international, cela n'a pas empêché les Etats-Unis d'entreprendre l'élaboration de leur propre standard de qualité. En effet, au début de l'année 2011, le DoD à confier à ASIS International la rédaction d'un document de certification destiné aux Private Security Companies (PSCs) mais pas aux Private Military Companies (PMCs). ASIS International est une organisation fondée en 1955 et dont l'objectif est d'améliorer l'efficacité des professionnels de la sécurité. La société compte 38 000 membres dans le monde, dont une centaine de membres actifs en France. De manière étonnante, la régulation du milieu des PSC a été confiée au secteur privé et non au gouvernement américain lui-même. Pour Philippe Chapleau, cette autorégulation permet « difficilement d'éviter des conflits d'intérêts ou des connivences entre entreprises, ce que l'administration Obama découvre peu 69 Amarante International, ANTICIP S.A.S., ERYS Group, Gallice Security, GEOS, Groupe OROPEX, LPN Group, Prorisk International, RISK&CO, RISKSGROUP, SURTYMAR. 70 Rapport d'information n° 4350, Sur les sociétés militaires privées, Christian Ménard et Jean-Claude Viollet, 14 février 2012, p. 48. 48 à peu.71 » Et d'ajouter : « Il y aurait donc tout intérêt à ce que ce soit l'Etat (à la fois client des PMC/PSC et puissance souveraine) qui certifie les entreprises et supervise leurs activités.72 » S'agissant du standard mis en place par ASIS, il s'appuie sur le Document de Montreux ainsi que sur l'ICOC et s'articule autour de deux normes qui ont été approuvées par l'American National Standards Institute (ANSI). La première norme concerne l'encadrement des activités des PSC et vise à assurer légitimité et transparence du secteur privé de la sécurité. Elle s'appelle Management system for quality of private security company operations - Requirement for guidance (ANSI/ASIS PSC.1-2012). S'agissant de la seconde norme, elle fixe les conditions des audits internes des entreprises amenées à travailler dans ce domaine. Elle porte le nom de Conformity assessment and auditing management systems for quality of private security company operations (ANSI/ASIS PSC.2-2012). Récemment, ASIS a annoncé qu'elle comptait faire de la norme ANSI/ASIS PSC.1-2012 une norme internationale (norme ISO73) dont la mise en place est prévue pour la fin de l'année 2013. Concernant son champ d'application, la norme concerna seulement les PSC (à l'exception des entreprises qui proposent des prestations maritimes) mais pas les PMC qui travaillent dans le cadre militaire et fournissent des prestations tactiques74. Finalement, les Etats-Unis, déjà leader avec la Grande-Bretagne sur le marché de la sécurité privée, semble avoir pris une nouvelle longueur d'avance. 71 CHAPLEAU Philippe, « Vers un standard de qualité pour les entreprises militaires et de sécurité privées », 18 mars 2011, disponible sur le site www.lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr, consulté le 15 juin 2012 72 Op. cit. 73 L'ISO est l'Organisation internationale de normalisation. Fin 2011, elle comptait environ 19 500 normes actives. 74 CHAPLEAU Philippe, « Une norme ISO pour les société de sécurité : un standard `international' à l'américaine en 2013 », 9 octobre 2012, disponible sur le site www.lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr, consulté le 9 octobre 2012 49 |
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