L'engagement unilateral( Télécharger le fichier original )par Ramsès VOUGAT Université de Ngaoundéré (Cameroun) - Master II 2010 |
SECTION II : LES CRITIQUES EXTRINSEQUESA L'ENGAGEMENT UNILATERALAu titre d'objections extrinsèques, les adversaires de l'engagement unilatéral évoquent le défaut de bases textuelles et son inutilité(I).Ce sont des critiques qui, non seulement ne convainquent pas au vu de l'évolution du droit positif, mais dissimulent à merveille les vraies craintes que suscitent l'avènement de l'engagement unilatéral (II). Paragraphe 1 : Les critiques apparentes avancées26. L'engagement unilatéral ne serait pas une source d'obligations parce qu'il ne repose sur aucun support textuel (A) et est dépourvu de toute utilité en droit (B). A- Le défaut de base textuelleFondée sur la toute puissance de la volonté, la théorie de Kuntze est en contradiction avec le droit positif parce qu'elle ne figure expressément dans aucun texte de loi (2) et pire, elle est inconnue du droit romain et de l'Ancien droit (1). 1- L'indifférence du droit romain et de l'Ancien droit vis-à-vis de la théorie de l'engagement unilatéral27. Le droit français des obligations est une oeuvre de synthèse entre les différents courants de la tradition juridique française. Il plonge paradoxalement ses racines dans la tradition romaine, l'Ancien droit et de la Révolution française. Partant de cette idée, les auteurs défendent l'argument selon lequel si le droit romain, qui a porté la théorie des obligations à un très haut degréde perfection, n'a jamais considéré qu'une personne puisse se trouver obligée par sa seule volonté, il en va de soi que le droit contemporain s'y écarte également. C'est vrai, l'argument est fondé car déjà en 1891, WORMS, s'interrogeait, dans le cadre de sa thèse de doctorat, s'il existait en droit romain des cas où un individu contracte, par sa seule volonté, un engagement civilement valable. Après une analyse approfondie des cas où le caractère unilatéral saute aux yeux51(*), il arrive à la conclusion selon laquelle « les principes romains ne donnent pas effet à la volonté unilatéralede s'obliger »52(*). Si une telle thèse est fondée en son principe, il convient toutefois de signaler qu'aucun détracteurde la théorie de l'engagement unilatéral que nous avons lu n'a prétendu affirmer le contraire; la preuve est que certains d'entre eux53(*)attirent même l'attention en arguant de ce que la théorie de Siegel remonte à une date postérieure à la rédaction du Code civil en 1804. Le problème est en effet ailleurs. 28.Certes, l'appréhension de notre droit des obligations ne saurait se faire aux mépris de la tradition juridique française, mais celui-là a connu de considérables transformations qui tendent à le déconnecter du droit romain et dont la teneur ne s'opposerait pas à l'admission de l'engagement unilatéral comme source nouvelle et volontaire d'obligations. Nous l'avons montré plus haut, la notion d'obligation telle que perçue aujourd'hui a évoluée. Certains auteurs vont plus loin en considérant que les institutions qui sont censées être expliquées par le recours à la théorie de l'engagement unilatéral,l'ont été bien avant qu'apparaisse cette théorie; ce qui permettrait de l'écarter54(*). Or, un tel raisonnement est erroné car le « fait que la réalité préexiste à la théorie qui prétend en rendre compte est un phénomène banal qui ne permet en aucun cas de contester la validité du schéma explicatif »55(*). Dans la plupart des cas, les explicationssuccèdent à ses applications; c'est à l'observation des faits que les auteurs formulent des théories. * 51Le testament, l'offre de contracter, les fondations, les promesses de récompense, etc. * 52 R. WORMS, De la volonté unilatérale considérée comme source d'obligations en droit romain et endroitfrançais, Thèse, Paris 1891, p.11. * 53 H., L., J. MAZEAUD et F. CHABAS, op. cit., n°362, p.337. * 54 M.-L. IZORCHE, L'avènement de l'engagement unilatéral en droit contemporain, PUAM 1995, n° 20, p.29. * 55 H., L., J. MAZEAUD et F. CHABAS, op. cit., n°362 in fine. |
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