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Le plein contentieux et l'excès de pouvoir

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par Jacquet Sébastien
Université de Lorient - Master 2 Droit public 2010
  

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II. L'avènement d'un contrôle normal des sanctions disciplinaires prises par les fédérations sportives à l'encontre de leurs licenciés

Contrairement au maintien du recours pour excès de pouvoir contre les sanctions prisent par la fédération en matière de dopage par lequel nous refusons de voir dans l'arrêt F.F.A une solution de principe, le passage du contrôle restreint au contrôle normal peut, à notre sens être étendu, malgré la motivation au cas d'espèce de l'arrêt, à toutes les sanctions disciplinaires infligées par les fédérations sportives contre leurs licenciés car cette évolution libérale est constatée dans de nombreux autre domaine et tend à se développer d'avantage. Cette précisions quant à la porté de la solution étant faite, l'abandon par le Conseil d'État du contrôle restreint sera envisagé de lege lata (A) ainsi que de lege ferenda en analysant la pérennité de la jurisprudence Touzard (B).

A. L'abandon du contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation

L'une des différence majeure entre le recours pour excès de pouvoir et le recours de pleine juridiction réside en ce que le premier puisse amener le juge à exercer un contrôle à intensité variable, laissant à l'administration une marge de manoeuvre qui, selon le degrés de vigilance du juge, sera plus ou moins grande. Ces divers degrés de contrôle ont pour objet soit la qualification juridique des faits, soit l'adéquation entre les motifs et le dispositif de la décision attaqué (c'est à dire le contrôle du choix de la décision). Le juge procédera à un contrôle dit restreint lorsqu'il sanctionnera uniquement l'erreur manifeste d'appréciation de l'administration dans la qualification juridique des faits ou dans le choix de la décision, alors que pour le contrôle dit entier il censurera l'erreur d'appréciation. En matière de sanctions disciplinaires générales, l'arrêt du Conseil d'État, Lebon, en date du 9 juin 1978, constitua à son époque une sérieuse avancée en ce qu'il accepta de contrôler, en plus de la qualification juridique des faits, le choix de la sanction mais, faisant jeu d'équilibre, le Conseil ne censura que l'erreur manifeste d'appréciation, c'est à dire la disproportion manifeste entre la sanction choisie par l'administration et la gravité des faits en cause. Jusqu'à l'arrêt F.F.A, les sanctions prononcées par les fédérations sportives n'étaient annulées qu'en cas d'erreur manifeste (C.E, Lorentz, 22 octobre 1993). Cependant, en mettant l'arrêt en perspective on s'aperçoit que celui-ci n'est pas isolé mais que, tout au contraire, il participe d'un large mouvement libéral initiée par le Conseil d'État dès les années 1990 par une série d'arrêts concordants abandonnant le contrôle restreint pour le contrôle entier. Ce qui fut le cas du contentieux des élevées (C.E, 27 novembre 1996, Ligue islamique du nord ), des bénéficiaires des allocations chômages (C.E, 21 mars 2007, Waltz-Gasser), des sanctions professionnelles (C.E, 22 juin 2007, Arfi), des sanctions à l'égard des magistrats du parquet (C.E, 27 mai 2009, Hontang), des commissaires aux comptes (C.E, 12 oct. 2009, Petit) et des sanctions infligées aux maires ou à leurs adjoints (CE, 2 mars 2010, Dalongeville).

Cependant, dans l'arrêt commenté le passage du contrôle restreint au contrôle entier eut des conséquences pour le moins illogiques sinon paradoxales. En effet, par l'article 1 de son dispositif le Conseil d'État casse l'arrêt d'appel pour ne pas avoir effectué un contrôle entier, partant, il évoque l'affaire au fond pour procéder lui même, en tant que juge d'appel, au contrôle normal. Le paradoxe réside en ce que les juges du fond annulèrent la sanction du fait de son caractère manifestement disproportionnée alors que le Conseil d'État, tout en procédant à un contrôle entier, ne trouva rien à y redire ; ce qui met en lumière l'importante divergence d'appréciation qu'il existe entre les magistrats du fond et leur Cour Suprême quant à l'appréciation de la proportionnalité de la sanction. Car, tout laissait à penser que ce qui était manifestement

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disproportionné pour les juges du fond constituerait, a fortiori, pour le Conseil d'État, une absence de proportionnalité que l'on peut qualifier de « simple », une erreur d'appréciation. Il n'en fut rien ; malgré un contrôle plus strict, le Conseil ne censura pas la sanction prise pas la fédération.

Par ailleurs et pour conclure, certains auteurs voient dans l'évolution de la jurisprudence du Conseil d'État en matière de sanction administrative, vers l'abandon progressif du contrôle restreint, l'influence (la pression ?) de la Cour européenne des droits de l'homme qui tendrait à privilégier la voie de la pleine juridiction pour contrôler les sanctions prise par des autorités administratives (par exemple, voir, CEDH 10 févr. 1983, Le Compte et Albert c/ Belgique). Cependant, il semble que les magistrats de Strasbourg n'entendent pas les termes de pleine juridiction comme nous les concevons en droit administratif français. Selon eux, le recours de pleine juridiction est celui permettant au juge d'exercer un contrôle de proportionnalité des sanctions en cause. Dans cette logique, le recours pour excès de pouvoir cantonné au contrôle restreint s'avère être insuffisant par rapport au recours objectif de pleine juridiction ; mais, en adoptant un contrôle entier, celui-ci parait tout aussi adéquat en permettant d'appréhender la proportionnalité de la sanction prononcé eu égard à la gravité des faits. La seule différence entre le recours objectif de pleine juridiction et le recours pour excès de pouvoir entier réside en ce dans le cadre du recours pour excès de pouvoir l'administration devra prendra une nouvelle décision conforme à la décision du juge, alors qu'en plein contentieux le juge substituera sa propre décision en usant de son pouvoir de réformation, ce qui peut constituer un gain de temps et de sécurité.

Rétrécissant ainsi comme peau de chagrin de domaine du contrôle restreint en matière de choix des sanctions, le Conseil d'État marginalise de plus en plus sa jurisprudence Touzard rendue en matière de sanction disciplinaire à l'encontre d'agent public, nous amenant à soulever la question de sa pérennité.

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