L'abstentionnisme électoral au Cameroun a l'ère du retour au multipartisme( Télécharger le fichier original )par Augustin TALA WAKEU Université de Dschang-Cameroun - Master en Science Politique 2012 |
PARAGRAPHE 2 : LA CREATION DE NOUVELLES INSTITUTIONS COMPETENTES EN MATIERE ELECTORALE ET LES MISES EN GARDE CONTRE LES TENTATIVES DE PERTURBATION DU PROCESSUS ELECTORALLes interactions et actions autour de la lutte contre l'abstentionnisme, vont conduire les autorités politiques et administratives du pays à prendre un certain nombre de mesures pour encourager les populations découragées par le déficit de fiabilité du système électoral à prendre part au vote. On en arrivera inéluctablement à la mise en oeuvre de nouvelles institutions chargées de la gestion du processus électoral et aux mises en garde contre les tentatives de perturbation du processus électoral. A-LA MISE EN OEUVRE DE NOUVELLES INSTITUTIONS COMPETENTES EN MATIERE ELECTORALEDepuis le retour du multipartisme au Cameroun, la lutte autour de la neutralité des institutions chargées de gérer le processus électoral a toujours été l'objet d'enjeu pendant les différentes élections. En effet, les partis d'opposition ne se sont jamais satisfaits de l'organisation des élections par les institutions compétentes en la matière. A cet effet, depuis 1991, l'opposition n'a cessé de revendiquer la mise sur pied d'un organisme indépendant chargé de l'organisation des élections sous prétexte que l'administration a un parti pris à l'égard du parti au pouvoir, et donc à sa solde (Sindjoun, 2004 : 26). Selon certains observateurs : « On n'organise pas les élections pour perdre ». Or, la contestation électorale menaçant la rupture de la paix sociale à cause de la problématique de la légitimité et de l'acceptation des résultats, le Cameroun va procéder à la création de plusieurs institutions aux dénominations diverses. Celle-ci sera considérée comme une tentative de définition des règles du jeu dont l'enjeu principal est d'assurer la transparence et la neutralité électorales (Pokam, 2007 : 74-75). Toujours est-il que, le pouvoir dans un souci de démontrer que le problème n'est pas la fiabilité du processus électoral mais plutôt l'incapacité de l'opposition à présenter un projet alternatif aux citoyens, mettra sur pied une série d'institutions. Il s'agira d'abord, des institutions qui assisteront l'administration dans l'organisation et la gestion du processus électoral à savoir l'ONEL1 et l'ONEL2. Celles-ci ne répondront toujours pas aux exigences de l'opposition, qui ne cessera de revendiquer la création d'une commission électorale indépendante, arguant que l'ONEL, dans ses différentes versions « N'était qu'un observatoire sans pouvoir » (Takougang, 2010 : 2). Ensuite, il sera mis sur pied ELECAM par la loi n°2006/011 du 29/12/2006. Cependant, malgré son caractère indépendant en théorie, l'institution suscitera des contestations sur la neutralité des membres nommés, de même que sur la modification de la loi lui accordant l'assistance de l'administration261(*). A cet effet, malgré la mise sur pied de ces diverses institutions, la participation des acteurs politiques n'est toujours pas garantie car, certaines formations politiques comme le SDF ne cessent de rappeler sa volonté de boycotter ELECAM dans sa « configuration actuelle ». Ce qui a d'ailleurs conduit cette institution à avoir des concertations avec les partis politiques afin que ceux-ci apportent non seulement leur contribution au processus d'inscription sur les listes électorales, mais aussi pour les rassurer de sa neutralité. Ainsi on peut, prendre comme exemple les entretiens qu'ELECAM a eu avec les partis tels que : l'ADD, l'AFP, l'ANDP. Ou encore celui qu'elle a eu avec le RDPC le 04/08/2010 et qui a permis à ce parti de rassurer quant-à son soutien pour le processus d'inscription sur les listes électorales262(*). Ces concertations ont influencé dans une certaine mesure le taux d'inscription sur les listes, certains partis n'ayant pas hésité à apporter leur contribution au processus d'inscription sur les listes mené par ELECAM. Tableau n°25 : L'EVOLUTION DES INSCRIPTIONS SUR LES LISTES ELECTORALES DU MOIS D'AOUT 2010 AU MOIS D'AVRIL 2011.
Source : www.Elecam.Cm N.B : Fichier électoral disponible au 08 avril 2011 : 5 067 836 + 1 360 565 = 6 428 401 électeurs En conséquence, considérant la période de concertation avec les partis politiques et particulièrement avec le RDPC, on constate que les inscriptions sur les listes ont progressé entre les mois d'Août 2010 et d'Avril 2011. Les réformes institutionnelles apportées visant à stimuler la participation électorale, conduiront suite à la menace de boycott de l'élection proférée par le SDF à entreprendre une série de mesures par le pouvoir. Aussi, pour pallier à l'illégalité d'ELECAM tel que le soutient le SDF, le chef de l'Etat par décret n°2010/319 du 13/10/2010 constatera la mise en place effective d'ELECAM263(*). De même, le déficit de crédilité dont est suspecté ELECAM à cause de l'appartenance de ses principaux responsables au parti au pouvoir au moment de leur nommination, même s'ils ont démissioné par la suite, va engendrer une tentative de neutralisation de ce déficit à travers le vote de la loi faisant désormais passer ces membres de onze (11) à dix-huit (18)264(*). Dès lors, ont été nommés par décret n°2011/204 du 07/07/2011 du chef de l'Etat, les six (06) autres membres du conseil électoral d'ELECAM. Ces nominations ont pour objectif de construire la neutralité et la crédibilité qui font défaut à cette institution, d'où les nominations de ses nouveaux membres choisis à la fois dans la socitété civile et au sein de certains partis politiques de l'opposition. Il s'agit entre autres de, M. Watio Dieudonné, M. Titi Nwel Pierre, Mme. Biyong Pauline, M. Tiku Tambe Christopher (société civile), Mme. Tsanga Delphine, et M. Nsangou Issofa (membres respectivement de l'UNDP et de l'UDC)265(*). En réalité, même si ces derniers sont considérés par certains acteurs comme n'ayant aucun pouvoir, laissant alors transparaître le recurrent problème de sa crédibilité266(*), il n'en démeure pas moins que ces nominations constituent d'une certaine manière une réponse aux critiques de certains partis et de la société civile. Elles n'ont pas pourtant attenué les critiques ; à titre d'illustration, M. Ni John Fru Ndi considère ces nominations comme étant une : « Giffle en pleine face267(*) ». Une manière de dire qu'il s'attendait à mieux, et par conséquent que sa position sur ELECAM risque de ne pas évoluer dans le sens que visait la décision du chef de l'Etat. Or, les nominations de Mme. Biyong Pauline et M. Titi Nwel Pierre connus pour leurs virulentes critiques à l'égard du déficit de neutralité de cette institution, visaient justement à rassurer les sceptiques, encourager les citoyens et partis politiques à faire confiance à cette institution pour les inscriptions sur les listes électorales. Ce qui semble malgré tout être le cas puisque, le SDF qui menaçait de boycotter ELECAM a fait une volte face en appelant contre toute attente les camerounais à « S'inscrire massivement sur les listes électorales»268(*). Dans tous les cas, la mise en oeuvre des mesures persuasives n'exclut pas le déploiement des mesures coercitives. D'où l'emploi des mises en garde contre les tentatives de perturbation du processus électoral qui visent à maximiser la participation électorale. * 261 La loi n°2010/005 du 13/04/2010, modifiant et complétant certaines dispositions de la loi n°2006/011 du 29/12/2006, portant création, organisation et fonctionnement d'ELECAM. * 262 Voir à ce propos le site www.rdpc.Cm. Consulté le 30/06/2011. * 263Ce décret a été publié par le Cameroon Tribune du 18/10/2010, p. 3. * 264 Loi n°884/PJL/AN, modifiant et complétant certaines dispositions de la loi n°2006/011 du 29/12/2006, portant création, organisation et fonctionnement d' « ELECTIONS CAMEROON »(ELECAM). * 265 Cameroon Tribune n°9883/6084, du vendredi 08/07/2011, p. 2. * 266 C'est en réalité de la position de M.OWONA NGUINI Eric Marthias, qui d'après certaines informations auraient réfusé la proposition qui lui aurait été faite en vu de sa nommination comme membre du conseil d'ELECAM. Il a ténu ces propos par sur Canal2 à l'émission « Canal Presse » en date du 10/07/2011. * 267 Ces propos ont été rélayés par le site www. Camer.be.cm, à l'insu d'un entrentien qu'il a accordé à Pierre-Patrick Mouandjo, le 16/07/2011, consulté le 27/07/2011. * 268Cette position du SDF est le résultat de l'assemblée générale du « national executive council » tenue du 06 au 07/08/2011 à Bamenda. Elle a été diffusée par les médias camerounais comme Equinoxe-tv le 07/08/2011 au journal télévisée. |
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