L'abstentionnisme électoral au Cameroun a l'ère du retour au multipartisme( Télécharger le fichier original )par Augustin TALA WAKEU Université de Dschang-Cameroun - Master en Science Politique 2012 |
B- L'EFFRITEMENT DE LA VALEUR DU VOTEAu lieu d'assainir le jeu politique camerounais, le vote renforce plutôt la conviction selon laquelle la démocratie tend à devenir un gouvernement du peuple sans le peuple (Nna, 2009 : 346). Ce qui s'explique par l'impression que ce « rite » véhicule. Pour bon nombre de citoyens, il n'exprime pas fidèlement leur volonté à cause des multiples entraves qui biaisent sa pratique mais davantage les fraudes qui ne cessent d'être dénoncées par les hommes politiques de l'opposition, les organismes, les organisations non gouvernementales nationales et internationales mais qui pourtant semblent structurer la compétition électorale. D'ailleurs, plusieurs électeurs estiment que les élections ne sont plus que de simples formalités qui ont pour but de légitimer le pouvoir en place189(*). L'abandon des canaux classiques d'expression de la démocratie par l'opposition (Njoya, 2003 : 91) justifie cette perte de confiance à l'égard du vote considéré comme instrument légitime de transmission du pouvoir qui se manifeste concrètement par l'abstentionnisme que pratiquent de plus en plus un nombre considérable de camerounais. En effet, le suffrage universel entaché d'un trop grand nombre d'abstentionnistes deviendrait une forme effective de suffrage restreint (Lipset, 1963 :15). Sachant que la valeur du suffrage dépend dans une grande mesure de son caractère universel, sa remise en cause est considérée comme l'élément définissant le mieux la « crise de la démocratie » (Dabrowski et Guillou, 2005 : 31). Ceci étant, l'effritement de la valeur du vote compromet sérieusement l'avenir de la démocratie représentative et neutralise les possibilités d'alternance. C'est pour cette raison que l'abstentionnisme en affectant l'universalité du suffrage entraîne avec lui un déficit important de la concurrence (Sindjoun, 1999 : 313) sur la scène électorale. Le suffrage universel ne suffit donc pas à garantir la démocratie. Encore faut-il qu'il soit réellement représentatif (Lipset, 1963 : 15). Il ne peut avoir de démocratie sans implication des citoyens c'est-à-dire sans titulaire du droit de vote et votant de façon effective (Lipset, 1963 :17) avec l'espoir que son vote va compter et exprimera fidèlement sa volonté. C'est la raison pour laquelle M. Gambetta considère le suffrage universel comme « l'arche sainte190(*) » de la démocratie même s'il arrive que le vote soit banalisé et partiellement désinvesti (Perrineau, 2007 : 38) de sa fonction. Ce qui dans cette perspective, n'est pas susceptible d'assurer une alternance démocratique et explique en partie pourquoi depuis le retour du multipartisme, le Cameroun n'a connu aucune alternance démocratique de ses dirigeants. * 189 Voir à ce sujet le site www.Camer.Be , conulté le 08/06/2011. * 190Cité par M. HASTING, M., Aborder la Science Politique, Paris, Seuil, 1996, p. 63. |
|