VIII.1.3. Un taux de croissance en progression
On peut définir la croissance comme une augmentation
sur une longue période des principales dimensions
caractéristiques de l'activité socio-économique comme la
production nationale des biens et des services. C'est à travers elle
qu'on peut juger de la performance d'un système économique.
L'évaluation de cette croissance dans le Burkina Faso
révolutionnaire est souvent sujette à discussions. D'aucuns
estiment à l'instar de la proclamation du 15 octobre 1987 que le bilan
de cette croissance ne peut être que négatif.561
Pourtant loin s'en faut. Des résultats encourageants ont
été obtenus et l'effectivité d'une aspérité
vers la construction d'une économie nationale indépendante et
l'amélioration de la gestion nationale ne font aucunement de doute.
L'option du capitalisme d'Etat et le renforcement de celui-ci
qui se traduisit par la restructuration des entreprises publiques et
l'étatisation de l'économie éveillèrent une
certaine progression qu'il est convenable de ne pas mésestimer
malgré
560 Alain MARIE, 1989, « Politique urbaine :
une révolution au service de l'Etat » in POLITIQUE AFRICAINE
N°33, Retour au Burkina, Paris, Karthala, page 37.
561 Déclaration du Front Populaire le 15
octobre 1987 in SIDWAYA N°879 du 19 octobre 1987, page 3.
189 les souillures des dysfonctionnements remarqués. La
création du Ministère chargé du contrôle des
sociétés d'Etat permit le contrôle réel et la
vérification des comptes de celles-ci, d'où l'amélioration
de leur gestion et de leur production. Pascal ZAGRE dit de ces dispositions,
qu'on avait assisté à un redéploiement industriel ayant
nécessité la création en octobre 1984 d'un
véritable ministère de la promotion
économique.562
L'association des CDR à la gestion des
sociétés, la formation des travailleurs sur le fonctionnement de
celles-ci, l'organisation de séminaires annuels sur leur gestion
à l'endroit des administrateurs et les sessions budgétaires
publiques contribuèrent à l'ouvrage de circonstances prolifiques
ayant provoqué une croissance non des moins visibles. On peut ajouter
à l'actif de ces acquis les nombreuses réalisations faites dans
le cadre des différents projets de développement populaire dont
la plupart a trouvé un succès grâce à la
participation de la population obtenue par les CDR.
Selon les conclusions de la Banque mondiale, la politique
d'auto ajustement du CNR a été soutenue par une rigueur et un
volontarisme avec des résultats concluants : un taux de croissance de
l'ordre de 4,3 % environ par an avec une croissance du secteur public d'environ
5,8 %.563 Pourtant cette période a été
éprouvée au Burkina Faso par l'embargo pratiqué à
son encontre par les institutions financières internationales qui
avaient stoppé leur assistance ; la France avait aussi refusé son
aide budgétaire.564
Un autre laurier de cet auto-ajustement révolutionnaire
fut la réduction des inégalités et de la pauvreté.
On a pu observer un sursaut national éveillé pour refuser la
pauvreté comme une fatalité. La politique économique du
CNR a « changé la vision des Burkinabé sur eux-m-emes,
soutiennent de nombreux acteurs de développement pour qui le regard que
les populations portent sur elles-m-emes constitue un élément
fondamental dans la dynamique de leur autonomisation dans des cadres
participatifs (PPD, Plan Quinquennal) ».565 Sans doute une
véritable conversion de mentalités jamais obtenue par les
régimes précédents.
562 Pascal ZAGRE, 1994, Les politiques
économiques du Burkina Faso : une tradition d'autoajustement
structurel, Paris, Karthala, page 149.
563Mémorandum économique de
décembre 1989 de la BANQUE MONDIALE, cité par INTERNATIONAL IDEA,
1997, La démocratie au Burkina Faso, Stockholm, page 21. Voir
aussi Pascal ZAGRE, 1994, op cit, pages 163 et 164.
564 Pascal ZAGRE : « Le pari de
l'intégrité et de la rigueur » in VIVANT UNIVERS
N° 426, Bimestriel novembre - décembre, 1986, Bruxelles, pp
22%27.
565 Basile GUISSOU, 2002, « Histoire et
pauvreté au BURKINA FASO » in La pauvreté, une
fatalité ? , Paris, Editions UNESCO/Karthala, page 107
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