VI.1.3. La recherche d'une promotion de la solidarite, de
la courtoisie et ses limites
La solidarité agissante était revendiquée
comme une autre excellence du code éthique révolutionnaire.
L'individualisme propre au système capitaliste devait faire place
à la vie communautaire, dynamique de la solidarité
révolutionnaire.
De ce fait, le CNR créa une caisse de solidarité
révolutionnaire, un fonds des calamités naturelles, une caisse
des aveugles et handicapés, une caisse pour la bataille du rail et un
fonds de soutien aux rapatriés.371 Au 31 décembre
1985, l'ensemble de ces caisses avait enregistré des recettes de 1 402
452 612 F CFA, des dépenses de 524 497 193 F et un solde de 877 955 419
F.372
Au-delà de cet aspect pécuniaire, la
solidarité révolutionnaire consista en des opérations
d'assistance surtout à l'occasion des calamités naturelles comme
les vents violents, les pluies diluviennes... Les personnes sinistrées
bénéficiaient du secours des CDR. Edouard NANA, un
commerçant du secteur 28, raconte que suite à
l'écroulement de sa maison occasionné par la chute d'un arbre,
les CDR du secteur lui avaient témoigné de leur
solidarité, non seulement en découpant l'arbre pour le
dégager, mais encore en l'aidant à reconstruire sa maison en
pleine saison hivernale. Les CDR ont canalisé la distribution des vivres
aux personnes nécessiteuses dans le Sahel et aidé à la
reconstruction des logements des villes de Gorom-Gorom et de Banfora
rasés par les pluies.373
Parallèlement aux oeuvres de solidarité, les CDR
devaient être les agents de vulgarisation d'un code civique
révolutionnaire dont ils étaient tenus d'être des exemples.
Forcer le respect et inspirer la confiance dans son comportement étaient
le devoir du révolutionnaire. Pour cette raison, il lui était
inconditionnel de « cultiver en lui les bonnes qualites de modestie,
la politesse, le respect et la courtoisie dans la fermete des principes de la
Revolution ».374 Une attitude saine de la part du
révolutionnaire était un gage de fierté
révolutionnaire.
Mais, le comportement de certains CDR avait
péché. Une réalité que confirme l'autocritique des
CDR. « L'esprit de vedette et le vandalisme [qui] sont des
comportements negatifs deshonorants pour la revolution
»375 n'étaient pas toujours évités par les
CDR. En effet, « au niveau des CDR geographiques et plus precisement
des cellules de securite, les camarades n'ont pas ete toujours courtois, polis,
et respectueux dans les contacts avec les masses et les strangers. Cet cart de
comportement est de
371 Voir le rapport de la 1ère
conférence des CDR, page 93.
372 Ibidem .
373 Ibidem .
374 Idem, page 94.
375 Ibidem.
126 nature préjudiciable parce qu'il donne une
mauvaise image de la Révolution Démocratigue et Populaire et
contribue a la démobilisation ».376 Restons
là pour souligner que l'usage du terme "camarade"
n'était pas apprécié par tous les aînés.
Certains y voyaient la dévaluation du respect qui leur était
dû. Henri KABORE, le responsable CDR aux activités
socio-économiques, s'en défend en ces termes : « Le fait
de s'appeler camarade n'était pas une facon de minimiser l'dge des gens.
Au fait, c'était une facon d'affirmer l'appartenance, la
fidélité a un meme combat, celui de la nation. On acceptait
camarade pour dire qu'on est engagé avec la révolution.
C'était une maniere pour promouvoir l'esprit d'éguipe
».377 Babou Paulin BAMOUNI renchérit : « Le mot
camarade entraine la cordialité, l'ouverture, l'esprit coopératif
et le sens du désintéressement. S'appeler camarade, c'est
accepter d'emblée l'instauration d'un certain climat de franchise, de
sincérité et d'entraide mutuelle ».378
En dehors donc de la frange jeune de la population dont
l'engagement était très fort, la courtoisie
révolutionnaire avait connu une forte résistance.
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