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Les Comités de Défense de la Révolution(CDR) dans la politique du Conseil National de la Révolution(CNR)de 1983 à  1987: une approche historique à  partir de la ville de Ouagadougou

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par Kakiswendépoulmdé Marcel Marie Anselme LALSAGA
Université de Ouagadougou - Maîtrise 2007
  

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Chapitre IV : L'ACTION POLITIQUE DES CDR

Le rôle des CDR était de servir de bastion politique au CNR. Dans ce sens, les CDR s'accaparèrent de toutes les affaires publiques et subordonnèrent toutes les institutions politiques de l'Etat. La mission politique des CDR était en somme de combattre tout ce qui était susceptible de nuire à la révolution, et de renforcer la conception unilatérale de la politique du CNR. Dans ce contexte où la contestation était synonyme de contre-révolution, plusieurs organisations sociopolitiques subirent l'action des CDR.

Notre propos dans ce chapitre se déroule en quatre points essentiels : l'oeuvre administrative des CDR, la lutte contre les ennemis de la révolution, l'action judiciaire des CDR et la cohabitation difficile avec les institutions religieuses.

IV.1. L'ceuvre des CDR dans l'administration

La participation des CDR à la gestion administrative contribua à une décentralisation du pouvoir. La préoccupation fondamentale était de rapprocher l'administration des administrés et de procéder ipso facto au contrôle de la population.

L'implication des CDR dans l'administration se traduisit par la vulgarisation et l'application des directives du CNR, l'exécution des tâches administratives et le maintien de l'ordre public.

IV.1.1. La vulgarisation et l'application des directives du CNR

La mise sur pied de Structures Dirigeantes de l'Exécutif Révolutionnaire (SDER) matérialisa l'implication des CDR dans l'administration par le CNR. Ces structures installées par le Décret N°85-108/CNR/PRES du 02 novembre 1985111 étaient principalement au nombre de quatre : le Comité d'Action Ministérielle (CAM), la Commission du Peuple chargé du secteur Ministériel (CPM), le Conseil National d'Administration Ministérielle (CNAM) et la Conférence des Commissions du Peuple chargées des secteurs Ministériels (CCPM). Tous ces organes étaient chargés du contrôle de la gestion et de l'action des structures des ministères.

Les CAM et les CPM étaient des structures propres à chaque ministère et leur objectif premier fut de veiller sur la conduite des affaires ministérielles. Les CAM se réunissaient par semaine sous la présidence des ministres respectifs et évaluaient l'application de la politique des ministres, l'exécution des mots d'ordre du CNR, les

49 dossiers soumis par les ministres et les problèmes de personnel (décision de décoration, de sanction des agents, nomination et affectation de personnel).112 Quant aux CPM, elles étaient en quelque sorte des CAM élargis, en ce sens qu'elles s'étendaient aux responsables des services rattachés aux ministères (établissements publics, sociétés d'Etat, organismes). Les CPM se rassemblaient tous les trois mois sous la direction des ministres pour adopter les suggestions des CAM concernant l'application de la politique des ministères, proposer au conseil des ministres les grandes orientations des activités des ministères, statuer sur les avancements du personnel, donner des directives en vue d'un meilleur fonctionnement des ministères.113

Le CNAM et la CCPM étaient respectivement un conseil d'administration réduit et élargi du gouvernement. Le CNAM regroupait tous les CAM des ministères et se prononçait sur toutes les questions qui lui étaient soumises par le conseil des ministres, proposait des solutions pour encourager la cohésion et l'efficacité de l'action gouvernementale. Le CNAM se réunissait par trimestre sous la présidence du président du CNR. La CCPM constituait une véritable assemblée consultative du peuple comprenant toutes les CPM des différents ministères. La première CCPM se tint du 13 au 21 septembre 1986 à Ouahigouya.114 Pendant trois jours, trois commissions de travail avec lesquelles coopérèrent les CDR, se penchèrent sur la vie administrative en vue d'adopter une série de résolutions pour améliorer le fonctionnement de l'administration. La première réfléchit sur les structures administratives et politiques, la deuxième sur les ressources humaines et la troisième sur la logistique.

A travers les SDER, les CDR servirent d'agents de liaison non seulement entre les différents ministères, mais aussi entre ces derniers et le pouvoir du CNR. De ce fait, ils assumaient, en cas de vacances gouvernementales, la direction des affaires de l'Etat dans l'attente de la mise en place d'un nouveau gouvernement. Ainsi, les décrets présidentiels portant dissolution des gouvernements précisaient chaque fois, que les directeurs de cabinet des départements ministériels étaient tenus d'être en liaison avec les CDR, pour l'expédition des affaires courantes des ministères.115 Ils jouaient donc le rôle de substitut authentique et insurpassable : « L'association étroite des CDR a l'expédition des affaires courantes des ministeres révèle une autre dimension de la démarche : celle de la maturité et de la responsabilité (des CDR). En confiant aux CDR en liaison avec les directeurs de cabinet la charge de sorte d'intérim, le pouvoir

112 Laurent BADO, « La directive en droit public burkinabé depuis la révolution d'Aoit : le cas particulier du Coordonnateur National des Structures Populaires (CNSP), ex Secrétariat Général National des CDR » in Revue burkinabé de droit, 1991, Ouagadougou, ESD, page 31.

113 Idem, page 32.

114 Bogna Yaya BAMBA, « Premieres assises de la CCPM a Ouahigouya : la médication a la crise de l'administration » in CARREFOUR AFRICAIN N° 954 du 26 septembre 1986, page 11.

115 Capitaine Thomas SANKARA, « Décrets présidentiels : décret portant dissolution du gouvernement du Burkina Faso » in CARREFOUR AFRICAIN N°896 du 16 Août 1985, page 10.

50 revolutionnaire fait preuve de la grande maturite des structures d'exercice du pouvoir populaire ».116

L'association des CDR aux organes décisionnels des ministères soustendait leur capacité de contestation de l'élite administrative au nom de la prééminence de leur légitimité politique. En outre, elle permettait au CNR d'avoir toutes les instances politiques sous son orbite. En conséquence, il pouvait surveiller tous les acteurs et punir tous ceux qui étaient indélicats vis-à-vis de la politique révolutionnaire : « Les CDR avaient beneficie des l'avenement du CNR d'un formidable pouvoir de nuisance dans la mesure oft ils prirent une part active dans l'epuration du personnel administratif ».117 Elle soulignait enfin la volonté du CNR de démocratiser le pouvoir administratif pour rompre avec l'élitisme. Démarche que les élitistes comme Laurent BADO118 ont stigmatisé en déclarant que « la democratisation du pouvoir administratif [etait] une democratisation de la mediocrite intellectuelle ».119

Pour le CNR, une telle démocratisation était inhérente à la révolution qui était celle des masses et non d'une classe donnée. Les révolutionnaires jugeaient donc urgent de « demystifier l'administration bourgeoise en assumant des responsabilites sur la base du seul engagement revolutionnaire qui [valait] plus que les titres et diplOmes bourgeois mystificateurs ».120 Ainsi, s'affirma la présence des CDR dans tous les rouages de l'administration. Ce maillage de l'administration peut être schématisé de la façon suivante :

CNR

CDR

S D E R

CAM

CPM

CNAM

CCPM

 

Gouvernement (Ministères)

Figure 8: Illustration du maillage de l'administration par les CDR a travers les SDER

116 S.X.S., « Dissolution du second gouvernement : une demarche pedagogique revolutionnaire » in CARREFOUR AFRICAIN N°897 du 23 août 1985, page15.

117 Augustin LOADA, 1993, Les politiques de modernisation administrative au Burkina Faso, Mémoire de DEA en Sciences politiques, Paris, Université de Bordeaux, page 87.

118 Laurent BADO est un professeur de Droit à l'Université de Ouagadougou.

119 Laurent BADO, 1989, Au-delà du libéralisme et du socialisme, Université de Ouagadougou, ESD, non édité, page 361.

120 Laurent BADO, « La directive en droit public burkinabe depuis la revolution d'aout : le cas Particulier du Coordonnateur National des Structures Populaires(CNSP), ex-Secretariat General National des CDR » in REVUE BURKINABE DE DROIT, 1991, Ouagadougou, ESD, page 31.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry