II. Cadre pratique de la méthodologie
Cette partie traite des procédés
méthodologiques ayant été utilisés pour atteindre
les objectifs poursuivis par cette recherche. Ses articulations sont la
présentation du cadre de l'étude, la population de l'étude
et la méthode d'échantillonnage, la présentation des
instruments de recherche, la collecte d'informations et
la méthode d'analyse.
1. Délimitation du champ
d'étude.
La problématique du changement climatique à
Prikro représente un sujet très important. Mais pour ne pas avoir
à étudier un champ trop vaste qui nécessiterait assez de
moyens, nous avons trouvé nécessaire de ne pas effectuer une
étude sur toute la sous-préfecture de Prikro, raison pour
laquelle, cette étude est circonscrite au seul village de Prikro.
1.1. Champ géographique.
La Sous-préfecture de Prikro est limitée par les
Sous-préfectures suivantes :
ü Au Nord, Famienkro ;
ü Au Sud, Koffi Amonkro ;
ü A l'Est, Anianou et Nafana et
ü A l'ouest, M'bahiakro.
Elle comprend deux (2) cantons :
ü Le canton Andoh ou Anoh
ü Le canton bradafouè
Le canton Anoh est organisé en tribus et comporte cinq
: Attoungbré, Bidjô, Famoro, Yengah, et N'guié. La tribu
Bidjô comprend : Abédeni, Babrasso, Bendessankro,
Bétié, Bofoimbo, Gbrakro, Katéman N'guessankro,
Languèsan et Prikro, le chef-lieu où nous avons mener notre
étude.
Prikro se trouve à 325 km d'Abidjan et 183 km de
Bouaké. Il se situe sur l'axe suivant : Daoukro- Ouellé-
Amankro- Koffi Amonkro- Prikro-Groumania- Dabakala.
1.2. Champ social.
Il s'agit ici de savoir qui interroger pour la collecte des
données. Nous avons identifié trois (3) groupes sociaux :
les paysans, les agents de la Sous-préfecture et un agent de
l'ANADER.
Au niveau des paysans, notre choix s'est porté sur le
chef de village, le secrétaire du chef et trois (3) notables pour leurs
connaissances ethnologiques. Nous nous sommes par la suite
intéressés au reste de la communauté à travers
trois (3) classes d'âge : les vieux, les adultes et les jeunes.
Ainsi, avons-nous interrogé dans chaque classe d'âge cinq (5)
personnes.
En ce qui concerne les agents préfectoraux, nous avons
interrogé le Sous-préfet et deux (2) de ses agents. Nous avons
opté pour cette catégorie de la population pour avoir la
situation écologique, le niveau d'exploitation des forêts et leurs
catégories, les limites administratives de la sous-préfecture et
les avis de ceux-ci de l'adaptation des paysans en fonction de la variation des
saisons pluviométriques.
Concernant l'agent de l'ANADER, nous nous sommes
intéressés à lui pour avoir les prélèvements
métrologiques et avoir l'apport de cette structure dans l'adaptation.
1.3. Champ sociologique.
Dans notre étude, l'intérêt s'est le plus
focalisé sur le ''comment '' de l'intérêt des comportements
des paysans à s'adapter à ce phénomène grandissant.
L'accessibilité aux paysans n'a pas posé problème. Les
visites dans les champs ont été riches de convivialité et
de joie. Car, ceux-ci manifestaient des sentiments de fierté et de
satisfaction pour l'intérêt porté à leur
égard.
1.4. Champ écologique.
La sous-préfecture de Prikro baigne dans un climat de
type baouléen de transition à sécheresse très
marqué avec une période d'harmattan. Il comporte quatre (4)
saisons :
ü Une grande saison de pluie allant de Août
à Novembre ;
ü Une grande saison sèche de Novembre à
Mars ;
ü Une petite saison de pluie de Mars à
Avril ;
ü Une petite saison sèche de Mai à
Juillet.
Elle dispose d'un climat Baouléen instable envoisinant
celui du soudanais. Elle est très pauvre en cours d'eau. A l'exception
du fleuve Comoé dans le département, les rares autres cours d'eau
sont saisonniers. Tout de même, elle a des bas-fonds dus à de
nombreux bassins versants favorables à la riziculture. Aussi, la nappe
phréatique est insuffisante rendant difficile le problème d'eau
en particulier en saison sèche. Alors, surviennent les nombreuses
coupures d'eau courante.
2. Les techniques de collectes de
données.
2.1. Etude documentaire.
Premier support par excellence, la recherche documentaire
occupe une place importante dans l'évolution d'un travail scientifique.
Aussi, est-elle la première démarche dans la réalisation
de notre travail.
Cette étude a concerné les ouvrages
méthodologiques, généraux, spécifiques et les
articles. Les données recueillies ont rendu possible d'une part, la
connaissance du phénomène du changement climatique et les
changements opérés au niveau de la pluviométrie sur le
terrain d'autre part.
De plus, ces documents ont permis le renforcement des
connaissances théoriques des approches permettant de décrire, de
comprendre et d'analyser un problème posé. Ces ouvrages
proviennent des bibliothèques des institutions suivantes : CCF,
IRD, IES et MINAGRA
2.2. Echantillonnage.
L'échantillonnage nous permet de comprendre ce qui se
passe dans la population sans avoir à interroger chacun des individus.
C'est l'opération par laquelle on sélectionne ou on choisit, les
individus qui constitueraient l'échantillon. Le but de
l'échantillonnage est de fournir suffisamment d'informations pour que
les inférences concernant la population puisent être faites. Pour
notre échantillonnage, les variables sont l'âge et le vécu
ou la durée d'expérience dans le métier d'agriculteur.
L'âge est comprise entre vingt ans et plus. Un enquêté
à être interrogé doit avoir vingt ans au minimum et au
moins cinq ans d'expérience à faire les champs.
Pour notre étude à caractère qualitatif,
il faut noter que nous avons utilisé l'échantillonnage
raisonné où le chercheur sélectionne un échantillon
qui semble représentatif de la population cible. Car, le vécu
représente un élément essentiel dans l'opinion des
enquêtés. La recherche qualitative se rapporte habituellement
à un petit échantillon sélectif en raison de la nature des
études approfondies et l'analyse des données necessaires.
Les individus pris en compte pour l'échantillon
témoignent d'une expérience d'au moins cinq ans dans les
activités champêtres et de vécu au village. Ainsi, vont
constituer l'échantillon les personnes suivantes.
La taille de l'échantillon
ü Le Sous-préfet ;
ü Trois (3) agents préfectoraux ;
ü Un agent de l'ANADER ;
ü Le chef de village ;
ü Trois (3) membres de la notabilité ;
ü Cinq (5) paysans vieux et/ou vieilles de 51 ans et
plus ;
ü Cinq (5) paysans adultes (hommes) de 36 à 50
ans ;
ü Cinq (5) paysans adultes (femmes) de 36 à 50
ans ;
ü Cinq (5) paysans jeunes (hommes) de 20 à 35
ans ;
ü Cinq (5) paysans jeunes (femmes) de 20 à 35
ans.
2.3. L'observation directe.
Cette technique de collecte de données est
utilisée pour cerner une situation précise. Elle est
l'opération qui consiste pour le chercheur à procéder
directement au recueil des informations par le simple fait d'observer. Pour
mieux s'imprégner de la réalité sociale vécue. Elle
nous a permis de constater le changement de la pluviométrie dans les
périodes de cultures. Les visites effectuées dans les champs ont
permis de voir les retards sur les périodes habituelles de cultures
depuis jadis. Elle nous a permis de voir certaines stratégies
d'adaptation des paysans et de les voir à l'oeuvre.
2.4. L'entretien semi-directif.
Cette technique a été utilisée du fait de
l'intérêt porté sur les comportements des acteurs face
à un phénomène. Elle nous a permis d'abord d'avoir
l'organisation sociale des sujets avec la chefferie. Ensuite, de mieux
appréhender les opinions des acteurs face au changement climatique et
enfin, de mieux constater les changements de la densité de la
pluviométrie surtout dans les périodes de cultures. Cette
technique assure la comparabilité des résultats.
3. Méthodes et théorie
d'analyse.
3.1. L'analyse qualitative des données :
l'approche phénoménologique.
La méthode qualitative vise à travailler sur de
petits nombres de cas. Elle s'appuie essentiellement sur les données
factuelles c'est-à-dire les faits souvent simples et ordinaires de la
vie quotidienne pour produire de la connaissance scientifique. La recherche
qualitative implique une large variété d'approches qui
sont : l'approche phénoménologie, l'approche de la
théorie ancrée ou « méthode d'analyse
systématique », l'approche biographique, l'étude de cas
et l'approche ethnologique. L'approche utilisée est la
phénoménologie. Elle s'intéresse à l'étude
des phénomènes sociaux comme expérience vécue par
les acteurs. Elle accorde l'importance à l'interprétation que le
sujet donne des évènements qu'il vit. Elle favorise l'intuition
synthétique et l'expérience vécue (N'DA, 2006). Cette
approche selon Husserl (1913) permet de comprendre la signification sociale
d'un phénomène. Les phénomènes sociaux nouveaux
engendrent des comportements nouveaux allant à des stratégies
d'adaptation. Les phénomènes apparaissent avec des comportements
d'adoption ou de refus et de combat. Ainsi, les comportements suscités
par le phénomène constituent eux-mêmes des objets à
réflexion. L'approche phénoménologique nous a permis de
comprendre et expliquer les comportements nés des conséquences
négatives du changement climatique. Les acteurs sont animés de
normes et logiques différentes. Il n'ya pas
d'homogénéité dans les prises de décisions et de
réactions face à un problème.
A travers cette analyse, il s'agit pour nous de classer et
d'interpréter les données recueillies avec les techniques de
l'observation et de l'entretien semi-directif selon leurs concordances.
3.2. L'analyse compréhensive.
L'analyse compréhensive considère l'individu
comme l'unité de base, il est l'unique porteur d'un comportement
significatif. Elle est la saisie intellectuelle ou affective du pourquoi et du
comment de ce que l'on observe (Grawitz, 1995). Ici, il s'agit pour nous de
chercher à connaître le comment de l'adaptation à une
situation nouvelle, un phénomène nouveau. Toute situation
nouvelle est sujette à réflexion et engendre des comportements
nouveaux qui permettent soit de dompter, soit d'être dompter.
3.3. La théorie de l'habitus de Pierre
Bourdieu.
Le concept d'habitus désigne l'ensemble des goûts
et aptitudes acquis par un individu dans la société au cours du
processus de socialisation. L'habitus est un système
générateur de pratique. L'individu vit dans la
société en fonction des expériences sociales. Elles sont
liées à une classe sociale et à une culture. Alors, les
individus auront les mêmes habitudes, les mêmes façons de
penser. Ils ont en commun un capital culturel.
GRAWITZ (1994) définit l'habitus comme un ensemble de
dispositions durables où sont intégrées les
expériences passées. Il fonctionne comme une grille de
perceptions, jugements, actions, capables d'inspirer les activités
différents, grâce à la possibilité offerte par le
système de résoudre des problèmes variés, mais
cependant analogues en profitant des expériences
précédents dont les résultats ont permis la correction.
Bourdieu a mis à travers ses recherches en Algérie un capital
théorique en grande partie constitué par l'anthropologie
structurale. L'habitus demande à être compris comme une grammaire
génératrice de pratiques conformes aux structures objective dont
il produit : la circularité qui préside à sa
formation et à son fonctionnement rend compte d'une part de la
production des régularités objectives de comportements et
d'autres part, de la modalité des pratiques reposant sur l'improvisation
et non sur une exécution de règles. Les paysans sont
culturellement liés par des activités champêtres et toutes
les pratiques relevant de ces activités. Les paysans ne jouissent pas de
règles établies leurs permettant de réagir aux
conséquences négatives du changement climatique. Les
comportements d'adaptation résultent de réflexion
d'expérience vécue par les acteurs. Ces stratégies
d'adaptation au fil de l'usage constituent à leur tour des habitudes
dans le quotidien des paysans.
Ainsi, la pratique des activités champêtres dans
les mêmes périodes chaque année devient un habitus des
paysans. La théorie de l'habitus nous permet de comprendre et analyser
les comportements des paysans face au changement climatique.
4. Difficultés et limites de
l'étude.
4.1. Difficultés de l'étude.
Le phénomène du changement climatique semble
nouveau dans les institutions universitaires et étatiques ivoiriennes
malgré l'existence d'un projet sur le phénomène. Des
études sur l'impact réel du phénomène en Côte
d'Ivoire n'ont pas été effectuées. Les simples
prélèvements de pluviométrie ne rendent pas
résolument compte de l'avancée du phénomène. C'est
dire combien il est difficile de trouver des écrits, mémoires et
thèses sur le phénomène en ce qui concerne la Côte
d'Ivoire. Et là où existent des données, l'accès
est difficile du fait de protocoles lourds. Car, la mystification du savoir
basée sur l'oralité intrinsèque à l'Afrique se
répercute dans la gestion de l'information dans certaines structures
privées et publiques. Il y règne une réticence de la mise
à disposition effective des informations.
4.2. Limite de l'étude.
Les informations recueillies sont soumises au temps car c'est
les opinions des acteurs qui ont été relevés. Les
informations peuvent changer du fait des acteurs car ils évoluent. Aussi
une bonne connaissance des impactes du phénomène permettra
d'avoir une information abondante. Et une évolution du
phénomène permettra une étude spécifique de
celui-ci.
Après avoir assis les bases méthodologiques,
nous allons entrer dans la phase active de notre travail. Cette première
phase consiste à la connaissance de la population cible et du milieu.
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