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Les femmes criminelles dans le film noir américain de 1940 à  1960

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par Fanny Pira
Université Sciences Humaines et Arts de Poitiers - Master histoire contemporaine 2007
  

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3) L'atmosphère du film noir.

Il est entendu par atmosphère, la signification au sens large, c'est-à-dire qui touche à la fois le film noir lui-même, et la période qui le porte en parallèle.

C'est pourquoi, afin de situer cette atmosphere, l'ambiance du film noir, il faut rappeler le contexte historique de cette période, qui a un effet de miroir.

En 2003, Eddie Muller a sortis un ouvrage consacré aux affiches du film noir.

Il commence en expliquant que :

« Du point de vue artistique, le film noir est un mouvement qui, pareil à un raz-de-marée, balaya Hollywood à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il réunit les sombres visions expressionnistes des réalisateurs européens expatriés et la fiction américaine, traditionnellement dure et cynique. Le résultat ? Une nouvelle mythologie culturelle, un marché noir qui offrait une solution de rechange aux sucreries résolument optimistes proposées aux spectateurs. L'art de l'affiche devait être aussi attrayant et aussi sombre que le produit qu'il vantait. Pendant l'apres-guerre, les images de gaieté, de richesse et d'amour sincere, qui décoraient les affiches se transformèrent pour dépeindre l'appétit implacable de personnages méfiants, désespérés et prêts à tout. »26

Effectivement, les années quarante et cinquante n'offrent pas beaucoup plus d'optimisme dans la vie des américains que les deux décennies précédentes, qui ont laissé des marques dans la société américaines.

L'impact de la dépression, de la Seconde Guerre Mondiale, de La Guerre de Corée, ainsi que de la Guerre froide, ont crée un climat propice à l'essor du film noir.

En effet, contrairement à l'Europe qui est en ouvertement en guerre depuis 1939, les EtatsUnis ne sont atteint qu'à partir de 1941.

« C'est à la fin de 1941 qu'elle atteint les Etats-Unis ; et rapidement l'effort militaire mobilise l'ensemble des énergies nationales. Or le film noir, est dans une large mesure, « anti-social ». Même s'il comporte une fin morale, son héros reste ambivalent devant le Mal ; c'est parfois un tueur tout simplement ; l'action se confine dans un milieu vénal et frelaté ; on ne cache ni l'existence des gangs, ni la corruption de la police, ni la toute puissance de l'argent. »27

26 Eddie Muller, L'art du film noir, Les affiches de l'âge d'or du film policier, Toledo (Espagne), Editions Calmann-Lévy, 2002, 272 p. p. 6.

27 Raymond Borde, Etienne Chaumeton, Panorama du film noir américain (1941-1953), op. Cit p.35.

Il est intéressant de remarqué que pour la plus part des auteurs d'ouvrages sur le film noir que le premier film reconnu comme tel est Le Faucon maltais de John Huston tourné en 1941.

En ce qui concerne les films étudiés pour ce travail de recherche, ils sont deux datant de 1941, Le Faucon maltais et Shanghai Gesture (Shanghai) de Joseph Von Sternberg.

Toutefois, en1940, William Wyler signe un film qui mériterait de se voir rajouter à la liste des films noirs, The Letter (La lettre).

Il met en scène une femme criminelle, rôle interprété par Bette Davis, qui tue son amant après avoir appris qu'il l'avait trompée, et réussi presque à s'en sortir.

Pour Jean Mitry, ce serait aussi un film de 1940, de Raoul Walsh, They drive by night (Une femme dangereuse), qui serait l'annonciateur du genre.

Ici, l'actrice Ida Lupino, tue son mari et le maquille le meurtre en accident afin de posséder l'entreprise de camionnage du mari et l'amour de Georges Raft, le chef du routage dont elle s'est éprise.28

Il semble également que le film noir a connu des périodes plus ou moins favorables. Après l'apparition du Faucon maltais en 1941, le film noir connaît quelques années de battement.

Comme le souligne François Guérif :

« C'est en effet à partir de 1944 que les histoires du cinéma américain placent la réapparition du film noir. La raison en paraît simple : la victoire alliée paraissant un fait acquis, la censure peut relâcher son emprise. »29

Il note également que :

« L'entrée des Etats-Unis en guerre changea l'identité des ennemis publics. Puisque le gangster semblait avoir disparu, il était plus facile, après une période d'autocritique, d'affirmer que le mal venait de l'extérieur.30»

Puis de 1946 à 1948, selon Raymond Borde et Etienne Chaumeton, le film noir connaît son apogée, une sorte d'Age d'or.

Ces deux auteurs mettent fin à l'aventure du film noir en 1953.

Pourtant, Kiss Me Deadly (En quatrième vitesse) de Robert Aldrich, date de 1955, et correspond bien aux « critères » du film noir.

28 Jean Mitry, Histoire du cinéma, Art et industrie ; V.Les années 40, op. Cit. p 382.

29 François Guérif, Le film noir américain, op. Cit. p. 110.

30 Ibid, p. 105.

Le contexte général (social, politique, économique,...), ainsi que les avancées technologiques en matière de cinéma, comme la naissance de la bande son, l'essor de l'industrie cinématographique, le poids des maisons de production pour la demande (la commande) des films (les plus importantes étant, la Paramount, la Metro Goldwyn Mayer, 20th Century Fox, la Warner et Universal), l'influence de l'expressionnisme allemand pour l'esthétisme du film allait donner toutes ses caractéristiques au film noir, son atmosphère.

Il paraissait donc important de resituer ce contexte de l'époque, sans vouloir tomber dans un pessimisme extrémiste, car il faut toutefois rappeler que les années quarante sont aussi nuancées par la présidence de Roosevelt, qui laisse entrevoir une issue à la dépression, l'avancé télévisuelle et radiophonique, la victoire sur l'Allemagne.

«(...) les Etats-Unis sont redevenus une nation prospère grâce à la guerre. Les commandes du gouvernement aux industriels et la mobilisation ont résorbé le chômage. Le niveau de vie a augmenté. Ce paradoxe entraîne une crise morale augmentée d'un sentiment de culpabilité causé par la neutralité du pays avant 1942, mais ce malaise persiste après 1945 avec la responsabilité d'avoir largué des bombes atomiques sur le Japon. »31

Ces quelques lueurs d'espoir ne suffisent pas à apaiser le climat que connaît la société américaine.

Car même si les Etats-Unis conservent leur puissance économique, la décision du président Truman (successeur de Roosevelt en 1945) visant à soutenir les investissements du capital contribue à provoquer l'inflation et la montée des prix.

S'en suis une nouvelle montée du chômage, et un mécontentement populaire général.

Les milles yeux du film noir de Alain Silver et James Ursini, donne une première approche sur l'atmosphère du film noir.

« La pièce est noire. Un puissant rai de lumière filtre depuis le hall sous la porte. L'ombre des pieds se découpe dans le rai de lumière. Bref silence. Suspense. Qui est-ce ? Que va-t-il se passer ? Quelqu'un va-t-il actionner la sonnette ? Ou glisser une clé dans la serrure et tenter d'entrer ? Une ombre dense obstrue alors totalement la lumière, accompagnée d'un bruit chuintant. L'ombre se retire et nous voyons dans le rai de lumière un papier glisser sur le tapis. De nouveau les pas se font entendre... Cette fois-ci, ils s'éloignent. Une lumière plus fort apparaît et illumine le papier à terre. (...) »32

Nöel Simsolo, explique l'atmosphère par :

« Rues sombres, ennemis invisibles, être désemparés aux pulsions de folie meurtrière, ombres inquiétantes et couples maudits y réveillent les peurs ataviques du spectateur. L'ambiguïté des personnages, la complexité des situations et le glauque des images infiltrent son subconscient. Un sentiment de gêne le gagne face à ces reflets masqués de la honte qui pourrit l'époque où, hors la menace d'attentas et de sabotages, le citoyen américain ne subit pas le conflit mondiale sur son territoire. »33

Mais il va plus loin en fusionnant ce qui vient d'être expliquée dans cette partie.

« Le citoyen américain est alors mal à l'aise. Son subconscient est embarrassé de nouvelles hontes : impérialisme militaire dans le monde, atteinte à la liberté de penser, impuissance à éradiquer la délinquance juvénile, la mafia, la corruption. (...) Impossible d'abstraire le contexte où sont tournés les films entre Force of Evil (L'Enfer de la corruption, 1948) et Kiss me Deadly (En quatrième vitesse, 1955). (...) ces films témoignent de l'oppression policière d'un pouvoir devenu antidémocratique et laissent filtrer le pessimisme des uns et la paranoïa des autres. Dans cette époque troublée, le calvaire individuel recoupe une culpabilité collective.

( ...) C'est un cinéma de crise et en phase avec l'Histoire.

Il s'est développé dans un climat de consciences troublées. »34

Et justement, le film noir est un moyen commode pour pénétrer dans tous les milieux et dévoiler ce qui se passe derrière la façade.

Comme il a été vu précédemment, le film noir sous entend un délit.

On distingue vulgairement trois types de personnages, celui qui commet le délit, celui qui cherche à découvrir comment celui-ci a été commis, et la victime.

Encore une particularité du film noir qui va s'attacher avec beaucoup d'importance au grand mouvement naissant qu'est la psychologie, et donner à ses personnages une identité propre à chacun.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore