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Enseigner les mathématiques en zone difficile

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par Sandrine Kernéis
Institut universitaire de formation des maà®tres de l'académie de Rouen - Master EFCS spécialité mathématiques 2011
  

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3.3 Expériences personnelles

Lors de mon stage en responsabilité, que j'ai effectué en zone difficile, j'ai pu essayer de mettre en application certains de ces points afin d'augmenter la motivation des élèves. Je voulais en particulier favoriser le dialogue avec mes élèves, leur montrer que je n'étais pas seulement une enseignante mais également une personne humaine capable de comprendre leurs sentiments. Je voulais mettre un point d'honneur à essayer d'instaurer un climat de confiance afin d'optimiser les conditions de travail autant pour moi que pour les élèves.

En classe, différents comportements d'élèves peuvent amener l'enseignant à s'interroger sur les raisons de ces comportements mais également sur la façon de les modifier. Le premier exemple que je vais aborder est celui de Kevin qui est un élève très extraverti, qui n'hésite pas à s'exprimer à tout moment. Son comportement est gênant d'une part car il perturbe le déroulement du cours, mais d'autre part car Kevin, à cause de ce comportement, ne se permet pas de suivre le cours. Le second exemple dont je vais parler concerne un comportement à l'opposé de celui de Kevin ; c'est celui de Dylan qui lui ne perturbe absolument pas le déroulement du cours étant donné que cet élève ne fait strictement rien. Ces

deux comportements, complètement opposés, conduisent tout de même à un résultat similaire : dans les deux cas les élèves ne suivent absolument pas le cours.

Premier exemple : Kevin est un élève particulièrement dissipé. Lors des premières séances il ne suivait pas le cours et ne manquait pas une occasion de distraire ses camarades en prenant la parole à haute voix pendant le cours pour commenter des choses sans rapport avec la leçon. A chaque fois que je lui demandais de se mettre au travail, Kevin me répondait « De toutes façons je comprends rien aux maths, c'est trop dur ! ». Au bout de deux ou trois séances, j'ai demandé à Kevin de venir me voir à la fin de l'heure. Une fois en tête à tête avec lui, je lui ai expliqué qu'il avait les capacités nécessaires pour comprendre le chapitre en cours, qu'il suffisait qu'il y mette un peu de bonne volonté. Je lui ai également parlé de son avenir, en lui expliquant que ça serait dommage qu'il passe à côté de ce qu'il voulait faire juste à cause d'un peu de mauvaise volonté. À la séance suivante, l'attitude de Kevin a été exemplaire. Il a suivi le cours, n'a pas bavardé et a participé activement durant toute la séance. À chaque fois qu'il participait, je ne manquais pas de le féliciter ; il était même déçu lorsque je ne l'interrogeais pas (si je l'avais interrogé à chaque fois qu'il levait la main, je n'aurais interrogé que lui). À la fin de la séance, je suis allée lui dire que j'étais très contente de son attitude et je lui ai demandé s'il avait apprécié le déroulement de la séance, ce à quoi il m'a répondu que oui car il avait tout compris. Cette attitude a duré plusieurs séances, mais au bout d'un certain temps il a commencé à se lasser et à reprendre ses mauvaises habitudes. C'est un travail sur les élèves qui ne s'acquiert pas en une séance, il faut recommencer en permanence et tout au long de l'année pour obtenir des résultats sur le long terme. Un jour où Kevin a été particulièrement bavard en classe, j'ai mis une observation dans son carnet (après l'avoir averti bien sûr que ça lui arriverait s'il ne se taisait pas). Dès l'instant où j'ai pris son carnet, Kevin s'est complétement braqué et a refusé de travailler pour le reste de l'heure. Il m'a paru à ce moment là très difficile de trouver le juste milieu pour gérer ce genre de comportement. Il faut essayer de mettre les élèves au travail, mais sans les bloquer en sanctionnant trop leur comportement et je pense que c'est une chose qui varie d'un élève à l'autre. Il faut donc essayer de trouver un juste milieu, qui pourra être propre à chaque élève et stimuler constamment la motivation des élèves.

Deuxième exemple : Dylan est un élève qui se place au fond de la classe et qui ne travaille pas de l'heure. Il n'est pas particulièrement dérangeant de part son comportement,

même s'il aime bien de temps en temps se faire remarquer, mais il refuse de travailler. Son cahier reste fermé durant toute la séance, ses exercices ne sont pas faits et il ne copie ni le cours, ni la correction des exercices. Comme je n'avais pas le temps de débattre avec lui durant le cours, je lui ai également demandé de venir me voir à la fin de l'heure au bout de la deuxième séance. Lorsque j'ai demandé à Dylan pourquoi il refusait de travailler, il m'a répondu que ça ne servait à rien car de toute façon il était nul, alors pourquoi copier le cours puisqu'il n'allait pas le comprendre ? Cette fois parler de l'avenir professionnel n'a pas eu un grand impact, Dylan n'ayant aucun projet professionnel. Je lui ai donc expliqué qu'il n'était pas plus incapable que les autres élèves, et que s'il s'en donnait les moyens il pourrait sans aucun doute comprendre la leçon. Je lui ai demandé d'essayer, au moins pour le prochain cours, de faire un effort et de suivre la leçon et copier le cours. À la séance suivante, Dylan a fait un effort, il a copié son cours, en ne manquant pas de me le faire remarquer, et a suivi la leçon. Il n'a pas fait les exercices, mais il a suivi le déroulement de la séance et s'est même porté volontaire pour aller corriger une question au tableau. Son comportement n'a pas posé de problèmes, il ne s'est pas fait remarquer et je suis allée lui dire à la fin de la séance que j'étais contente de son comportement. Il m'a dit qu'il avait compris la leçon et qu'il continuerait à faire des efforts. Durant la suite de mon stage, le comportement de Dylan n'a pas beaucoup évolué, mais il a continué de copier le cours dans son cahier. De temps en temps il faisait les exercices et participait, mais il n'est pas devenu un élève « exemplaire ».

Le troisième exemple que je vais aborder ne concerne pas un élève en particulier. Je voulais aborder les observations que j'ai pu mettre sur les copies des élèves. Pour chaque copie, dans la mesure du possible, je me suis appliquée à mettre au moins un commentaire positif. Je ne voulais en aucun cas dévaloriser un élève qui aurait fourni un travail, même si ce travail ne correspondait pas aux attentes. Je voulais à tout prix éviter que des élèves se laissent décourager par une mauvaise note. Certains élèves ont été surpris d'avoir un commentaire tout de même positif alors que la note était loin d'être bonne ; ces mêmes élèves ont par la suite montré plus de motivation. Je souhaitais mettre en avant le travail fourni, et non pas uniquement le résultat. Les élèves ont alors compris qu'il ne fallait pas qu'ils se découragent et ont fait preuve de persévérance afin d'améliorer leurs résultats. Je pense notamment à Lise qui au début du stage était une élève très bavarde. Lorsqu'elle a vu que je m'intéressais à son travail, que même si je ne lui mettais pas de bonnes notes je l'encourageais à continuer à travailler car certains de ses résultats étaient prometteurs, elle s'est mise à suivre davantage en

classe et à bavarder beaucoup moins. Elle souhaitait que je sois fière d'elle, de son travail, de ses progrès et mettait tout en oeuvre pour y parvenir. Elle a compris que j'avais confiance en ses capacités à réussir et cela lui a donné envie de réussir.

Je souhaitais pour terminer cette partie parler également du déroulement d'une interrogation de cours. Les élèves étaient prévenus que cette interrogation aurait lieu, ils savaient exactement ce sur quoi ils allaient être interrogés car je leur avais clairement explicité la veille. Lorsque j'ai distribué les énoncés (cf. annexe 8), j'ai constaté que certains élèves ne regardaient même pas le sujet et attendaient patiemment que les cinq minutes passent. J'avais volontairement dans cette interrogation mis des questions relativement simples sur les puissances de 10 afin de la rendre accessible même aux élèves qui n'auraient pas eu envie de réviser ; en effet à chaque début de cours j'avais effectué des rappels sur les puissances de 10 et j'étais certaine que la quasi-totalité des élèves avaient bien assimilé cette règle. Je me suis donc dirigée vers les élèves qui n'avaient pas pris la peine de lire les questions, et je leur ai dit qu'ils savaient répondre aux questions concernant les puissances de 10, qu'ils l'avaient déjà fait plusieurs fois en cours. Suite à mon intervention, ces élèves ont répondu à ces questions et ont tous eu juste. Cette attitude révèle un manque de confiance certain de la part de ces élèves : ils étaient tellement persuadés de ne pas pouvoir réussir qu'ils ne se sont pas donné la peine d'essayer. Ils avaient l'habitude d'échouer et c'est même pour eux devenu logique de ne pas réussir. Leur réaction après que je leur aie affirmé qu'ils étaient capable de répondre aux questions montre bien l'importance de faire savoir à nos élèves la confiance que nous leur portons. C'est pour eux un facteur de réussite non négligeable.

Dans ces différentes situations, j'ai pu constater que le dialogue avec les élèves, et même simplement le fait qu'ils sentent que l'on s'intéresse à eux peut réellement modifier leur comportement, leur attitude. Je pense que le fait de croire en eux, de ne pas les cataloguer comme étant des « mauvais élèves » ou des « éléments perturbateurs » leur donne une importance, différente de celle que certains élèves cherchent à avoir en se faisant remarquer. Je me suis donc appliquée durant tout ce stage à valoriser au maximum les élèves afin de susciter leur motivation, de leur donner envie de travailler. C'était pour moi un objectif à atteindre et même si le stage fut relativement court, j'espère avoir réussi à convaincre un maximum d'élèves.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery