2.4. Discussions
2.4.1. Effet des apports organiques après 3 ans de
mise en culture des sols de « tanety »
2.4.1.1. Evolution de carbone du sol après 3
ans d'apport organique
Après 3 ans de mise en culture, ni l'apport organique
sous forme de fumier, compost et terreau, ni l'apport minéral n'ont eu
d'effet sur la teneur en COT des sols. Comparativement au travail de
N'Dayegamiye (1997), l'auteur a comparé l'effet de l'apport
prolongé d'engrais minéraux et de fumier de bovin solide
(1977-1993) sur le contenu en carbone et en azote d'un loam limoneux, ainsi que
la fraction densimétrique de la matière organique. Deux faibles
doses de fumier (0,20 Mg.ha-1) et différentes formes
d'engrais composé de type PK, NP, NPK, et NPKMg ont été
testées. L'apport minéral à long terme n'a pas conduit
à l'augmentation de la teneur en C du sol. Ce qui conforme à
notre résultat. D'autres observations ont des conclusions
différentes tel que les observations de Christensen (1988) dans des
essais de longue durée avec céréales et recevant de la
fumure minérale et fumure organique. De même, Barnhart et
al (1978) ont également observé que la culture continue de
maïs-grain sous fertilisation minérale prolongée pouvait
maintenir le taux de carbone organique lorsque les tiges étaient
laissées au sol. Par ailleurs, Biederbeck et al (1984) et
Campbell et al (1991) ont observé un effet important de
l'apport prolongé de l'engrais azoté sur l'accumulation de
carbone dans les sols chernozémiques cultivés en
céréales. D'après N'dayegamiye et al., (1997), le
maintien de la teneur en carbone du sol suite à l'apport prolongé
d'engrais est expliqué premièrement par les faibles
quantités de résidus laissés par la culture de maïs
ensilage, dans un deuxième temps, les pertes de carbone du sol
étaient limitées à 0,8% par année en raison de la
teneur élevée en argile du sol (38%), et aussi à cause de
son drainage lent qui ralentirait la minéralisation de la MO .
Pourtant, d'après le travail de N'Dayegamiye (1997)
l'apport prolongé de fumier, même à une faible dose
annuelle de 0,20 Mg ha-1 a significativement accru le potentiel
biologique du sol et les teneurs en carbone et azote du sol. Des
résultats similaires ont été obtenus dans des
études de N'Dayegamiye et Angers (1990) ; Angers et N'Dayegamiye (1991)
qui ont démontré que l'apport de fumier solide de bovin pouvait
maintenir un niveau élevé de carbone organique sous une culture
continue de maïs ensilage. Ce qui n'est pas conforme à notre
résultat. Selon les auteurs, le développement de la structure et
l'activité biologique du sol dépendent des formes de la MO
présentes et de la distribution de carbone dans le sol. Les teneurs en
carbone et azote de la fraction légère étaient plus
élevées par rapport à celles du sol entier et à
celles de la fraction dense, toutefois, la fraction dense représente une
plus grande proportion de C et N du sol entier (N'Dayegamiye, 1997). Le carbone
dans la fraction légère est facilement dégradable.
Moreau, (1983) a étudié l'évolution de
sol sur un couple de parcelle (parcelle cultivée et témoin
naturel) après défrichement et différentes pratiques
culturales (sous solage, avec ou sans dessouchage à la pioche, avec ou
sans débardage, enfouissement ou non des résidus). Le sol
utilisé est un sol ferrallitique de Cote d'Ivoire, les
végétations sont le recru forestier bien développé,
forêt primaire, forêt secondaire et savane arborée. Les
caractéristiques structurales et organo-biologiques du sol sont plus
sensibles à la mise en culture. Sur 6 années de culture, l'auteur
a enregistré une diminution de la stabilité structurale, une
diminution de la teneur en carbone total et azote total des sols sur tous les
sites. L'évolution des caractéristiques du sol sous l'effet de la
mise en culture dépend d'une part de l'état de
l'écosystème initial, d'autre part, du mode de
défrichement et d'exploitation pratiquée. Le mode de
défrichement revêt une importance capitale en ce qui concerne les
modifications de l'état du sol à la mise en culture. Le
défrichement en bulldozer provoque les perturbations mécaniques
les plus fortes et entraîne les dégradations les plus importantes
de la stabilité structurale et les caractéristiques
organo-biologiques. Akodo (1977) et Yoro (1989) ont étudié
l'évolution des sols après défrichement et mise en
culture. Ces différents travaux mettent en évidence une
dégradation des caractères physiques (densité apparente,
stabilité structurale) et chimiques (teneur en carbone total et
minéralisable, en azote total et ammoniacal), parallèlement
l'augmentation de l'érosion et la lixiviation des éléments
nutritifs. Selon les auteurs, cette dégradation des
propriétés du sol dépend des états initiaux, des
types de défrichement et des systèmes d'exploitation, ce qui est
conforme aux résultats obtenus par Blic (1976) et Akodo (1977). Dans la
présente étude, le défrichement manuel intégral
apparaît moins perturbateur; les redistributions de constituants du sol
à différents niveaux de profondeur sont moins importantes et la
dégradation des caractéristiques organobiologiques reste
limité. Les résidus végétaux enfouis (« bozaka
» pour l'essentiel composé d'Aristida sp) sont fortement
cellulosiques voire lignifiés. Ces produits organiques ont une vitesse
de minéralisation relativement lente et expliquerait ainsi la moindre
perte de carbone organique liée au labour. Le COT dans le sol est
variable au cours du temps, vu qu'il est la résultante des flux entrants
(par des apports organiques exogènes) et des flux sortants,
essentiellement par minéralisation (Velly et Longueval, 1977). L'apport
de matière organique fraîche induit une accélération
de la décomposition de la matière organique native du sol en
apportant les différents types de microorganismes en compétition
vis-à-vis des éléments nutritifs (Kuzyakov et
al., 2000 ; Fontaine et al., 2003). Cependant, la fraction
argileuse du sol protège le carbone et l'azote du sol contre la
minéralisation microbienne, comme cela a déjà
été observé par Oades (1988). Les ferralsols étant
fortement argileux, la minéralisation des matières organiques
pourrait donc en être limitée. Des apports cumulés de
matières organiques ont ainsi reconstitué une perte liée
à l'accélération de la minéralisation au moment de
la défriche.
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