2.3.3. Estimation de la valeur agronomique
Au terme de ces analyses, deux critères
d'évaluation des matières peuvent être distingués
:
1. l'entretien à long terme de la fertilité du sol
par l'augmentation de la matière organique
2. la fourniture d'éléments nutritifs pour la
plante à plus court terme.
Ainsi, étant donné les teneurs initiales en
carbone et en azote des matières organiques testées et le rapport
C/N ainsi que le taux de minéralisation du carbone et de l'azote
organique; on peut proposer deux indicateurs synthétiques permettant de
comparer les matières entre elles selon leur valeur amendante (pour
l'entretien de la fertilité du sol à long terme), et selon leur
valeur fertilisante (pour la fourniture d'éléments essentiels
comme l'azote) (Tableau 2.12 et 2.13). L'indicateur d'entretien de la
fertilité sur le long terme se construit à partir des
quantités de MO apportées minéralisées en fonction
de la quantité de carbone initial dans la matière organique.
L'indicateur de fertilisation par la fourniture d'azote se construit à
partir des C/N (vitesse de minéralisation) et des teneurs en azote
initial dans la matière.
D'après la littérature citée par Francou
(2003), les C/N des matières organiques compris entre 25 et 40
permettent un compostage satisfaisant, donc une vitesse de décomposition
de ces matières satisfaisante. L'azote total représente
généralement de 1 à 4% de la matière sèche
de ces produits résiduaires organiques et le carbone organique total
(COT) représente de 20 à 30% pour les déchets verts et de
25 à 50% pour les ordures ménagères. Au vu des
résultats de l'analyse et de la plus faible dispersion des
matières organiques étudiées ici, notamment au niveau de
la teneur en azote total, nous considérons les seuils suivants :
- de 40 et de 70% de minéralisation de la matière
organique apportée pour maintenir les potentiels d'entretien de la
fertilité des différentes matières ;
- de 1% et 2% d'azote, pour la valeur fertilisante
Tableau 2.12 : Potentiel d'entretien de la
fertilité à long terme des matières
fertilisantes
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Min>70%
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40% < Min < 70%
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Min < 40%
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C > 20%
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Fumier de Bovin (FB) Fumier de Volaille (FV)
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Compost de feuille (CF)
Taroka (Tk)
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10% < C < 20%
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Ordure Incinérée (OI)-
Compost Zinabio (VE)
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Terreau d'Ilafy (CAi)-
Prochimad (Pm)
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Terreau d'Andralanitra(TA) Ordure compostée OC
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C < 10%
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Fumier de porc (FP)
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Guanomad (Gm)
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Potentiel négatif à nul Potentiel nul à
faible Entretien modéré Entretien important
Tableau 2.13 : Potentiel fertilisant par la fourniture
d'azote à court terme
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C/N>25 (fort)
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C/N < 25 (faible)
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N > 2%
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Activateur biologique de
Prochimad (Pm)-
Guanomad (Gm)
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1% < N < 2%
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Fumier de Bovin (FB)- Compost de feuille (CF)
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Fumier de volaille (FV)-
Compost Zinabio (VE)
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N < 1%
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Ordure compostée (OC) Ordure incinérée
(OI)- Taroka (Tk)
Terreau d'Ilafy (CAi)
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Fumier de porc (FP)
Terreau d'Andralanitra (TA)
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Libération lente et faible rapide et faible +/- rapide,
+/- important rapide et important
Ainsi au regard des tableaux 2.12 et 2.13 résumant ces
mesures, le compost de feuille (CF) et le taroka (Tk), riches en carbones
organiques et peu décomposés au terme de l'incubation contribuent
à l'augmentation de la matière organique du sol, donc à
l'entretien de la fertilité sur le long terme.
Les fumiers (bovin et volaille) ont également un fort
pouvoir amendant. Dans le cas du fumier de bovin, la fourniture d'azote est
très faible. Au contraire, son apport entraînerait une faim
d'azote et cet azote est puisé dans les réserves du sol alors que
le fumier de volaille fournit une quantité d'azote disponible qui
cependant reste assez faible, 15 mg de N.kg-1 de sol.
Les meilleurs fertilisants, au sens de la mise à
disposition d'éléments minéraux en quantité sont le
Guanomad et l'activateur biologique de Prochimad, tous deux des fertilisants
commerciaux. La fourniture d'azote est importante au départ,
respectivement 62 et 32 mg de N.kg-1 de sol, bien qu'il ne soit pas
minéralisé au cours du temps. Leur effet sur l'entretien du
stock de matière organique, s'il semble
modéré pour le Guanomad et l'activateur biologique de Prochimad,
il reste discutable compte tenu de la possibilité de priming effect
entraîné par l'apport de ces matières. Le
dégagement de CO2 observé pourrait alors venir de la MO du sol,
c'est-à-dire que l'incorporation de ces matières ferait baisser
la teneur en carbone du sol. Elles auraient donc un effet négatif sur
l'entretien de la MOS; auquel cas, leur utilisation en combinaison avec un
apport organique plus carboné pourrait s'avérer
intéressante.
Enfin, étant donné les quantités d'azote
apportées par ces matières, il serait intéressant de les
comparer à celles apportées par un engrais chimique. Au prix
où elles sont vendues (Guanomad: 800 Ar.kg-1, activateur
biologique de Prochimad : 740 Ar.kg-1), elles apparaissent nettement
plus intéressantes que l'engrais chimique (NPK universel 3080
Ar.kg1). Mais le NPK fournit d'autres éléments en
quantité comme le phosphore et le potassium, il peut parfois être
enrichi en oligoéléments. Une analyse complète de la
qualité du Guanomad et de l'activateur biologique de Prochimad est
nécessaire pour juger de leur avantage coût/efficacité.
Les produits issus du recyclage des déchets ont un
faible potentiel de fertilisation, ils ne fournissent que peu d'azote et
entraînent même une éventuelle immobilisation en
début d'incubation. Leurs effets sur l'entretien de la MOS sont plus
dispersés. Les terreaux de décharge (Terreau d'Ilafy, Terreau
d'Andralanitra) et le compost d'ordure participent modérément
à l'entretien de ce stock tandis que les ordures
incinérées et le compost zina bio de Vohitra Environnement sont
fortement minéralisés au terme de l'incubation libérant
les éléments à court terme.
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