PARTIE 2 :
DIVERSITE DES PRATIQUES PAYSANNES
D'USAGE DES MATIERES ORGANIQUES DANS
LES SYSTEMES DE CULTURE EN
AGRICULTURE URBAINE
CHAPITRE 1 : PRATIQUES PAYSANNES DE FERTILISATION ET
D'AMENDEMENT ORGANIQUE DES SOLS CULTIVES. DIVERSITE ET USAGE DES INTRANTS
ORGANIQUES
1.1. Introduction
Dans l'agglomération d'Antananarivo, l'agriculture
occupe 43% des quelques 425 km2 (Aubry, 2005). Elle est
caractérisée par la présence de riz (bas fonds,
périmètres irrigués), de maraichage et de cultures
vivrières des « tanety », auquel s'ajoutent des
petits élevages selon les zones (canard, volaille). L'agriculture est
diversifiée. Dans ce contexte, les systèmes de production avec
dominance maraichère se concentrent soit en ville (cresson des bas fonds
inondables, soit dans les zones collinaires (N'Dienor, 2006). Leur
diversité dans l'exploitation, leur degré d'intensification et
leur part dans le revenu des ménages sont cependant variables
(Rajoelison, 2003 ; N'Dienor, 2004).
L'agriculture urbaine d'Antananarivo est souvent en
difficulté dans la plupart des zones rizicoles, mais par contre
très dynamique dans le secteur maraîcher. Si le riz produit
localement participe, autoconsommation comprise, pour 15 à 25% aux
besoins en riz de l'agglomération, les travaux sur les filières
en légumes frais montrent une prédominance des origines
périurbaines, voire une exclusivité pour certains produits comme
le chou-fleur (Rajoelison, 2003). Le chiffre d'affaires des filières
maraîchères approvisionnant la Commune Urbaine d'Antananarivo
(CUA) s'élève à 29 milliards d'Ariary/an soit
10.000.000 euros/an (Dabat et Andrianarisoa, 2005; Ravoniarisoa, 2005).
Selon les mêmes travaux, la tomate est actuellement le produit
maraîcher le plus consommé par les citadins, 95% en consomment :
44 kg par habitant et par an, soit 43.000 tonnes annuelles.
Dans l'ensemble, les agriculteurs investissent peu dans
l'amélioration des sols. 30% des parcelles de culture seulement ont
reçu un apport en engrais organique (INSTAT, 2005), et 6% des terrains
agricoles ont reçu l'engrais minéral depuis 2001 (INSTAT, 2005).
Le faible apport en matière organique et minéral est lié
à la pauvreté des producteurs.
La dégradation des sols est reconnue comme l'un des
problèmes cruciaux auxquels le monde et en particulier l'Afrique est
confrontée. A Madagascar, l'évolution des caractères des
sols après défrichement et mise en culture a été
étudiée par de nombreux chercheurs (Milleville et al.,
2001; Brand et Rakotondranaly, 1997 ; Pfund et al., 1997).
La plupart de ces travaux en relation avec le travail du sol,
le système cultural et le type de culture, met en évidence une
dégradation des sols due à la mise en culture. Or la production
agricole, principale source économique, en Afrique,
particulièrement à Madagascar, repose encore sur le
système traditionnel de cultures itinérantes sur brûlis. A
Antananarivo, les techniques de culture s'adaptent aux conditions de milieu
tout en les transformant
progressivement au cours de la phase culturale, mais en mesure
d'artificialiser le milieu cultivé pour en rendre durable
l'exploitation.
D'après (Aubry et al., 2005), le projet ADURAA
a mis en évidence le fort besoin de matières organiques des
systèmes maraichers des collines de l'Est du fait de la colonisation
croissante de sols ferrallitiques pauvres des « tanety » par
le maraichage et de la faible production endogène de matières
organiques (N'Dienor, 2002). ADURAA a testé dans ces systèmes
comme alternative totale ou partielle aux modes actuels de fertilisations,
l'utilisation d'un criblé de décharge « terreau
d'Andralanitra » fabriqué artisanalement par une association
caritative (Ravalimanana, 1999).
Cette étude vise à étudier la pratique
paysanne de fertilisations et d'amendements organiques des sols cultivés
dans l'agglomération d'Antananarivo.
Des enquêtes auprès des paysans ont
été menées avec pour objectifs de :
- comprendre quelles sont les diverses ressources organiques
disponibles dans l'agglomération d'Antananarivo et dans les zones
périphériques pour les paysans. Quels sont les fertilisants
organiques utilisés par les agriculteurs.
- étudier les pratiques paysannes d'usage et de gestion
des matières organiques, c'est-à-dire comprendre quelles sont les
règles sur lesquelles se basent les agriculteurs pour s'approvisionner
en matières fertilisantes et quelles sont les règles
d'attribution des matières aux cultures dans leurs parcelles
(rôles des successions culturales, des associations culturales). On
cherchera à comprendre notamment quelles sont les fonctions que les
agriculteurs attribuent aux matières fertilisantes et plus
particulièrement les matières organiques utilisées.
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