1.2.2 Généralités sur les
modèles de frontière
Les définitions et les méthodologies de
quantification des scores d'efficience ont connu une certaine évolution
en passant de mesures directes, qui sont relativement
pauvres, à des mesures indirectes
établies à partir de techniques plus élaborées.
· S'agissant de la première catégorie de
mesures (mesures directes), deux types de mesures ont
été identifiés, au niveau de l'input ou de l'output. Selon
le premier type, l'efficience est mesurée par le montant des ressources
allouées au domaine d'intervention concerné, tel que
l'éducation et la santé. Ainsi, on considère qu'un
pays est plus efficient s'il consacre une part de son PIB plus
élevée au secteur en question qu'un autre pays. L'approche
-output considère que ce sont les réalisations d'objectifs et non
les inputs qui mesurent le mieux l'efficience et l'effort fourni par les
pouvoirs publics. Selon cette approche, les pays qui atteignent les niveaux
d'éducation et de santé les plus élevés sont
jugés etre les plus performants ; abstraction faite de l'importance
des ressources qu'ils consacrent à ces fins.
· Selon SAouSSEN BEN RoMDHANE (2006), ces deux approches
ne sont pas satisfaisantes pour éclairer la question d'efficience
puisque ni l'une ni l'autre ne rend compte du phénomène de
gaspillage de ressources publiques. En effet, SAouSSEN BEN RoMDHANE justifie
cela par le fait qu'un gouvernement peut consacrer une
part très importante de son budget à
l'éducation ou à la santé sans que les performances ne
soient bonnes en raison d'une mauvaise gouvernance se caractérisant
notamment par une corruption très répandue. Inversement, des
niveaux élevés d'indicateurs sociaux pourraient être le
résultat de dépenses publiques excessives et donc de beaucoup de
gaspillage de ressources qui auraient pu être utilisées dans le
secteur productif.
Compte tenu de ces limites, plusieurs autres techniques de
mesures dites indirectes sont développées par
différents auteurs, qui mettent en rapport les inputs et les outputs et
rendent compte de l'écart entre l'output potentiel permis par des
quantités d'inputs données et le niveau d'output effectivement
atteint avec ces mêmes quantités.
Deux différentes grandes méthodes permettent
dans la littérature économique d'évaluer l'efficience des
services publics : les méthodes paramétriques et les
méthodes non paramétriques.
1.2.2.1 Les méthodes paramétriques
Les spécifications stochastiques
(paramétriques) de la frontière de production tiennent compte des
éventuelles aberrances et des erreurs de mesure soit en supposant que le
terme d'erreur a deux composantes, l'une représentant les erreurs
aléatoires et l'autre l'inefficience technique (modèle à
effets individuels aléatoires, AIGNER, LOVELL et SCHMIDT
1977)5, soit en admettant des interceptions variables (modèle
à effets fixes, EVANS et AL. 2000)6.
La méthode stochastique la plus courante pour estimer
les frontières de production remonte à AIGNER, LOVELL et SCHMIDT
(1977). Dans cette méthode, on évalue une fonction de production
paramétrique et la spécification de cette fonction explicite le
fait que les écarts par rapport à la variable de sortie maximum
observée peuvent également être causés par des
facteurs non liés à l'inefficience. Pour traiter ce
problème, on suppose que le terme d'erreur a deux composantes : l'une
représentant les erreurs aléatoires et l'autre l'inefficience
technique.
De façon formelle, Le modèle à effets
individuels aléatoires peut être représenté
5Cité par GUPTA, HONJO et VERHOEVEN (1997),
« The efficiency of Government Expenditure: Experience from Africa»
IMF Working Paper WP/97/153.
6Cité par GUPTA, HONJO et VERHOEVEN (1997),
op.cit
mathématiquement ainsi :
Yit = a + X' it/3 + vit
-- ui (1.1)
Dans l'équation (1.1), Yit
désigne la variable de sortie de l'unité i au temps
t, Xit un vecteur d'entrées, vit
est un terme d'erreur de moyenne nulle et ui une variable
aléatoire représentant l'inefficience (technique)
spécifique à une unité. Il est supposé que le terme
d'erreur ui est non négatif (ui ~ 0)
L'efficience technique (ET) peut être calculée
comme le ratio de la valeur attendue de la variable de sortie observée
pour le pays i par rapport à la valeur attendue de la variable
de sortie lorsque ui = 0.
Soit :
E(Yit/ui, Xit)
ETi = (1.2)
E(Yit/ui = 0, Xit)
Le dénominateur de l'équation (1.2)
représente la frontière de production, puisque le terme
d'inefficience ui est zéro.
Les coefficients du modèle (1.1) peuvent être
estimés en utilisant des méthodes du maximum de vraisemblance. On
suppose en outre que v et u peuvent être
séparés. Pour l'estimation soit robuste, il faut également
faire certaines hypothèses quant à la distribution de u.
Étant donné que les u doivent être non
négatifs, on suppose généralement qu'ils sont
distribués selon une loi semi-normale et normale tronquée.
Mais la frontière de production estimée de cette
façon n'englobe pas forcément toutes les observations. Alors que
la valeur de la variable de sortie attendue doit se situer sur ou sous
l'enveloppe, la valeur réelle de la variable de sortie peut se situer
bien au-dessus si l'erreur aléatoire pour cette observation est
suffisamment grande.
De plus, si cette approche traite les distorsions
potentielles introduites par les observations extrêmes, elle introduit
potentiellement d'autres distorsions en imposant une forme fonctionnelle
particulière sur la frontière.
Dans la littérature, les deux approches sont
communément utilisées et la pratique des méthodes non
paramétriques semble prendre le dessus.
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