De la souveraineté de l'état congolais face au principe du patrimoine commun de l'humanité; cas du Parc National des Virunga( Télécharger le fichier original )par David Lingaya Bauna Université libre des pays des grands lacs - Graduat en droit public 2010 |
IV. METHODE ET TECHNIQUE DE RECHERCHEPour atteindre l'objectif de notre travail, nous avons recouru à la démarche du juriste qui consiste à faire l'exégèse. La méthode exégétique qui privilégie la critique et l'interprétation de la loi, la jurisprudence et la doctrine5(*). Elle nous a été utile dans l'interprétation des principaux textes juridiques de l'ONU, comme la convention de l'UNESCO. Nous avons fait recours aussi à la technique documentaire qui nous a permis de parcourir plusieurs documents et travaux notamment les ouvrages, les textes officiels, les cours et travaux pratique, les travaux de fin de cycle. V. SUBDIVISION DU TRAVAILHormis l'introduction et la conclusion notre travail est subdivisé en deux chapitres : CHAP I : PORTEE DU PRINCIPE DE SOUVERAINETE DE L'ETAT Section I : Effets de la Souveraineté Section II : Patrimoine Mondial CHAP II : PRINCIPE DE GESTION DES PARCS NATIONAUX Section I:statut du PNVi Section II : la gestion du PNVi
CHAP. I : LA PORTEE DU PRINCIPE DE LA SOUVERAINETE DE L'ETAT ET LA NOTION DU PATRIMOINE COMMUN DE L'HUMANITE.Dans le cadre de ce chapitre, nous nous donnons pour mission d'élucider les effets de la souveraineté de l'Etat (section première) et la notion du patrimoine commun de l'humanité (section deuxième). SECTION 1 : LES EFFETS DE LA SOUVERAINETE.La notion de souveraineté semble être ambiguït, elle renferme deux aspects : La souveraineté nationale et la souveraineté populaire qui visent l'origine du pouvoir, d'une part, d'autre part la souveraineté étatique qui est la qualité d'une collectivité autonome qui jouit de l'indépendance par rapport aux autres Etats, et se trouve sur un pied d'égalité juridique avec eux ; dans le cadre des obligations imposées par le droit international6(*). Dans cette section nous parlerons des effets de la souveraineté sur le plan interne et les effets de la souveraineté sur le plan externe. §1. Effets de la souveraineté sur le plan interneNous allons analyser la théorie du territoire objet point (A) et la théorie du territoire limite point (B) A. La théorie du territoire objet et le droit de propriété de l'Etat sur son sol et son sous-sol Dans cette théorie, le droit que l'Etat exerce sur son sol et son sous-sol relève du droit de propriété. Selon Aubry et Rau, la propriété est « le droit en vertu duquel une chose se trouve soumise d'une façon absolue et exclusive à l'action et à la volonté d'une personne ». Le droit de l'Etat sur son sol et son sous-sol ne pourrait être exclusif faute de quoi l'appropriation du sol et du sous-sol par les particuliers serait inconcevable. C'est essentiellement pour cette raison que de nombreux auteurs ont estimé que la qualification du droit de l'Etat sur son sol et son sous-sol comme un droit de propriété s'avéré inadéquate7(*). En effet, si l'Etat peut faire usage du sol et du sous-sol, s'il peut jouir de leurs fruits, en revanche, il ne peut en disposer que ce soit matériellement ou juridiquement. Aux termes de l'article 53 de la loi du 20 juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime des sûretés, le sol et le sous-sol sont inaliénables et imprescriptible. En conséquence, ils sont non seulement hors commerce, mais aussi imprescriptibles. Par ailleurs, dans la tradition africaine, le sol et le sous-sol n'appartiennent à personne, mais à la communauté dans son ensemble comprenant non seulement les vivants, mais aussi les morts.8(*) Il en résulte que nul ne peut en disposer faute de qualité pour le faire. La loi dite foncière relative à la propriété exclusive de l'Etat sur son sol et le sous-sol favorise le développement du pays car, grâce à elle le danger est écarte,de voir notre territoire national, scandale géologique par sa faune, sa flore et son sous-sol, faire l'objet de convoitise individuelle et de prétention d'aliénation sur telle ou telle portion. B. La théorie du territoire limite et la souveraineté de l'Etat sur le sol et le sous-sol A la différence de la théorie du territoire objet, la théorie du territoire limite ne s'entend pas sur le sol, le sous-sol et les autres éléments du territoire. Elle se contente plutôt de fixer une limite à la compétence de l'Etat ; sous réserve du respect de règles de droit international pertinentes notamment, celles relatives à extraterritorialité en général et à la coopération internationale en particulier. Tout ce qui se fait ou se trouve à l'intérieur du territoire de l'Etat dans quelques matières que ce soit, qu'il s'agisse de l'administration de la justice du sol et du sous-sol..... relève de sa compétence exclusive. Mieux de sa souveraineté «le territoire sert ainsi de mesure et de limite à l'autorité du gouvernement de l'Etat ».9(*) Mais que faut-il entendre par souveraineté ? En quoi est-elle préférable à la propriété et quelles conséquences va-t-elle entraîner sur les forestiers congolais ? Selon ERIC DAVID, il n'est pas aisé de définir la souveraineté pour deux raisons au moins : La première, c'est que l'on distingue plusieurs acceptations de la souveraineté, souveraineté de l'Etat, souveraineté intérieure et souveraineté extérieure ou indépendante ; souveraineté populaire et nationale etc.... La seconde raison est que cette notion est tellement dynamique et évolutive qu'elle n`a pas toujours le même contenu dans l'histoire et dans l'Etat. Ainsi au départ, la souveraineté révélait un caractère politique. Elle était alors conçue comme « caractéristique d'un pouvoir qui ne dérive que de lui-même, qui n'est coiffé par aucun autre et qui s'exerce sans concurrence ».10(*) Cette affirmation doit cependant être nuancée dans la mesure où, pour ne prendre que cet exemple, la souveraineté de l'Etat n'exclut pas la soumission dudit Etat aux normes du droit international et au respect de la souveraineté des autres Etats. De même, l'appartenance aux organisations internationales, particulièrement celles d'intégration, a pour effet de limiter sensiblement la souveraineté des Etats sans pour autant la remettre en cause11(*). Quoi qu'il en soit, à l'ère de la mondialisation, ce phénomène s'avère incontournable. C'est ce qui explique du reste l'article 217 de la constitution du 18/02/2006 aux termes duquel « la RD Congo peut conclure des traités ou accord d'association ou de communauté comportant un abandon partiel de souveraineté en vue de promouvoir l'Unité Africaine ».12(*) Il nous suffira de noter que contrairement à ce que d'aucuns ont soutenu, loin d'être une innovation de la constitution précitée, cette disposition est plutôt une constante du droit constitutionnel congolais dont on trouve d'ailleurs l'équivalent dans plusieurs constitutions à travers le monde. Ainsi circonscrite, la souveraineté de l'Etat est l'un des fondements du droit international public. Elle trouve son fondement juridique notamment dans la charte des nations unies et acte constitutif de l'Union Africaine. Elle est une des conditions essentielles de l'existence étatique et une pierre angulaire du droit international classique. Il en découle plusieurs conséquences notamment, le principe de l'égalité des Etats, le principe des droits des peuples à disposer d'eux-mêmes, le principe de non intervention dans les affaires intérieures, la faculté reconnue à l'Etat de contracter des engagements internationaux etc. Il faudra attendre le début des années 1950 à travers la consécration du principe de la souveraineté permanente des Etats sur leurs ressources et richesses naturelles. La souveraineté va revêtir, au-delà de son caractère politique initial, un caractère économique. A cet égard, il convient de noter que la souveraineté permanente de l'Etat sur leurs richesses et ressources naturelles est un complément nécessaire ou une partie intégrante du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Abordant dans le même sens, MOHAMED BEDJA OUI soutient que « la souveraineté sur les richesses et ressources naturelles apparaît incontestablement comme un élément composant du droit à l' autodétermination et comme un corollaire de la souveraineté ; le droit qui la consacre est désormais une norme obligatoire du droit moderne ».13(*) Bien qu'il se dégage clairement du principe de l'égalité souveraine des Etats, les droits des peuples à la souveraineté permanente sur leurs richesses et ressources qui s'étend à ce jour aux richesses et à toutes les activités économiques est consacré par plusieurs instruments juridiques internationaux notamment la déclaration 1803 (XVII) du 14/12/1962 sur la souveraineté permanente des peuples sur les ressources naturelles, la résolution 3201(S.VI) du 1èr mai 1974 portant déclaration sur l'établissement d'un nouvel ordre économique international, l'article 1 commun au pacte international relatif aux droits civils et politiques, au pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et l'article 21 de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples. Certes, d'aucuns pourraient mettre en doute la valeur juridique de certains des instruments juridiques particulièrement ceux adoptés par l'Assemblée Générale des Nations Unies toute- fois, cette réserve ne pourra s'étendre aux traités internationaux. IL convient aussi de noter l'affirmation de la Cour International de Justice (CIJ) dans son arrêt rendu le 19/12/2005, dans l'affaire opposant la RDC à l'Ouganda après avoir rappelé tous ces instruments, la Cour International de Justice (CIJ) a jugé que le principe de la souveraineté permanente des Etats sur leurs ressources naturelles relève du droit international coutumier14(*). Comme le note si bien Georges Saab, ce principe implique que l'Etat dispose sur ses richesses et ressources naturelles non seulement d'un pouvoir de contrainte ou imperium, mais aussi d'un pouvoir qui rappelle la propriété du droit privé et qu'on appelle le Dominum. L'imperium est la compétence d'injonction et d'exécution s'exerçant sur l'ensemble des personnes, des choses et des actes dans le cadre territorial de l'Etat. Quand au (DOMIQUE) Dominum, il renvoie aux pouvoirs inhérents à l'institution de propriété en droit privé.15(*) Concrètement, en tant que règle, la souveraineté permanente sur les ressources naturelles peut souffrir de quelques exceptions. A titre d'exemple, l'Etat peut accorder des concessions sur ses richesses et ressources naturelles. En fait, sauf exception, ces concessions ne peuvent pas portés sur les richesses et ressources naturelles en elles-mêmes, mais sur leurs produits. Il n'en saurait être autrement quand on sait que les richesses et ressources naturelles appartiennent toujours au domaine public de l'Etat. Comme le note si bien Jean Salmon «la compétence territoriale se caractérise par la plénitude et son exclusivité »16(*). Il n'est pas sans intérêts de souligner avec Georges Abi Saab que «la raison d'être juridique du principe (de droit des peuples à la souveraineté permanente sur leurs richesses et ressources naturelles) est de protéger l'Etat contre sa propre faiblesse, ou plutôt de protéger sa composante humaine, la population contre la faiblesse ou les carences de sa composante institutionnelle-le gouvernement »17(*). De même, pour des raisons liées au droit des peuples à la souveraineté permanente sur leurs richesses et ressources naturelles, plusieurs Etats se sont abstenus de se prononcer sur la licéité des mesures de nationalisation. Celle-ci s'avère plus favorable aux intérêts du peuple qui ne peut en aucun cas être dépossédés. Elle permet également à celui-ci de faire face aux convoitises extérieures sur ses richesses et ressources naturelles notamment sur son sol et son sous-sol : «les pouvoirs attachés à la souveraineté peuvent naturellement entrés en conflit avec les droits de propriété (par le biais de leur contrôle, de leur réglementation, de leur modification ou même de leur abrogation), mais ne constituent pas eux même des tels droits »18(*). C. Limite de la souveraineté sur le plan interne. L'Etat, dans les limites de ses frontières, jouit d'une compétence et l'exerce d'une manière discrétionnaire et absolue. C'est-à-dire que cette compétence échappe à l'autorité de tout autre sujet du droit international : c'est la compétence exclusive19(*). Cela peut s'expliquer en ce sens que l'Etat a des droits et des devoirs d'agir seul dans ses frontières. Ses actes jouissent de la présomption de la régularité : Ce domaine réservé de l'Etat se trouve bien souvent limité par sa volonté, en concluant des traités avec d'autres Etats sur une question qui touche une matière le concernant, un point de la matière qui le concerne. * 5 MIDANGU (B); Initiation à la méthodologie juridique, éd : CDIT, Kin 2002, p.2. * 6 MPONGO-B., Op. Cit., p.50. * 7 Ibidem p.50. * 8 MUKADI BONYI, Les analyses juridiques, Ed. St Paul Kin 2006 p. 28 * 9 Idem,p. 28. * 10 MUKADI BONYI, op.cit p.30 * 11 Idem P.29 * 12 Bidem p.30 * 13 MOHAMED B., Principes de la souveraineté permanente des Etats sur leurs ressources naturelles, 2011 * 14 ARRET DE LA CIJ du 19/12/2005. * 15 MOHAMED B.op.cit p.147. * 16 MOHAMED B., Op. Cit., p.32. * 17 MUKADI, Op.Cit, p.32. * 18 Idem p.33. * 19 Paul REUTER, Droit International, p.143. |
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