II.1- QUENTIN.(1)
II.1.A- LA MISE EN PLACE DE LA STRATÉGIE
THÉRAPEUTIQUE* S'EFFECTUE APRéS LA PREMIÈRE RENCONTRE AVEC
QUENTIN.
a- L'état de base de Quentin a
été établi à partir des
renseignements donnés par l'équipe
pédagogique et de mon observation durant notre première
rencontre.
ème
Quentin est un élève intellectuellement
précoce de quatorze ans en classe de 4et est arrivé au
collège Charcot en septembre 2009. Il a été orienté
par l'équipe pédagogique vers l'atelier d'art-thérapie.
En effet, Quentin m'est décrit comme un enfant
renfermé sur lui-même et très stressé sur sa
réussite scolaire (se projette dans l'avenir et a déjà
peur d'échouer au brevet
et au
baccalauréat) et sur son intégration dans un groupe
(il a toujours eu des problèmes relationnels avec les autres enfants,
n'a pas d'amis). Il est tellement angoissé qu'il est très tendu
physiquement et a tendance à somatiser (tout est source d'angoisse pour
lui : le chahut des autres élèves, le bruit, la
sévérité d'un professeur). Cette tension peut être
tellement insupportable qu'il arrive à Quentin de manquer volontairement
des journées de cours. C'est le seul élève
intellectuellement précoce à ne pas avoir senti de
différences entre ses anciens établissements et ce nouveau
collège. Il a tendance à attirer l'attention sur lui
malgré lui : il est en pleine puberté, a des problèmes
d'acné et les autres élèves le lui rappellent.
Juste avant notre première rencontre, son professeur de
français me dit: << Si vous pouviez le faire sourire !
È.
Ainsi ce premier atelier se déroule le mardi 12 janvier
2010, à 15h30. Le groupe est composé de Quentin et de deux
élèves de 3ème. Par la suite, je verrai ce
groupe tous les mardis de 15h30 à 16h30 (hors vacances scolaires)
jusqu'à fin juin 2010.
Je monte les escaliers menant au premier étage et suis
dans le même flot que les élèves après la sonnerie
de fin de récréation et les professeurs. J'arrive devant la salle
et aperçois Quentin déjà présent devant la porte
(quand aucun adulte n'est présent dans une salle, celle-ci est
fermée par mesure de sécurité). Dès qu'il comprend
que je suis l'art-thérapeute, il me demande s'il a << bien compris
les règles car personne n'était là È. Avant
même l'ouverture de la porte, je m'aperçois que ce garçon
est soucieux de bien faire.
Cette première heure doit permettre au groupe (donc trois
élèves et moi-même) de faire connaissance, de
conna»tre nos goûts et de réfléchir sur ce qu'on
pourrait faire ensemble. C'est ainsi que j'apprends que Quentin aime les
mangas, fait de la magie depuis quatre ans et a déjà
participé avec plaisir à des spectacles de fin d'année. Il
adore l'humour, les jeux de mots, et les comiques. Ses
préférés sont Éric et Ramzy, mais apprécie
également Mr. Bean, Franck Dubosc, Les deux minutes du peuple
(2).
J'observe que Quentin est un garçon qui s'exprime
très bien à l'oral. Il explique très clairement ses
idées. Mais j'observe aussi ses problèmes de relation. En effet,
Quentin parle
(1) : le prénom de chaque enfant a été
changé pour préserver leur identité.
(2) : sketches audio d'environ deux minutes créés
et enregistrés par François Pérusse.
quand c'est son tour, mais regarde rarement son interlocuteur. Il
ne fait para»tre aucune expression sur son visage (il est tellement
tendu). Même s'il ne regarde que peu de fois son interlocuteur, son
désir de communication* est sensible. Quand il parle de ce qu'il aime,
Quentin ne sourit pas et aucune émotion n'est captable. Il est difficile
de savoir s'il est content ou non, s'il a du plaisir d'être avec nous ou
non. Mais il participe quand même à la
discussion.
Quentin est un garçon très pragmatique, soucieux de
l'ordre. Il applique les règles à la lettre. Il dit être
embêté de manquer une heure de cours de biologie. En effet,
ça ne lui laisse qu'une heure et demi d'enseignement de cette
discipline, alors qu'il a quatre heures d'enseignement pour d'autres
matières.
Ë la fin de cette première séance, les
trois élèves sont d'accord pour travailler sur des textes de one
-man-show* dans une perspective d'interprétation scénique. Je
m'engage donc à en apporter la prochaine semaine.
Tout au long de l'heure, je me permets de faire des blagues. Dans
les quinze dernières minutes, contre toute attente, Quentin
réagit à deux reprises par un sourire très furtif. J'ai
l'impression que l'expression du plaisir est vite ma»trisée.
b- Les objectifs de la prise en charge de Quentin
ainsi que les moyens utilisés pour les atteindre ont été
établis à partir des indications de l'équipe
pédagogique et de l'analyse de cette première rencontre.
Quentin est pénalisé dans ses relations avec le
monde extérieur à cause de son stress. Il a l'air agressé
par tout. Il a peur de l'avenir et est trop soucieux de bien faire. Sa tension
physique n'est qu'une réaction à tout ce stress. Pour se
protéger, Quentin s'isole des autres élèves. Aussi il ne
s'investit plus dans les ateliers (il a arrêté le club journal de
l'école). Son stress peut être tel, que parfois, il ne peut pas se
rendre au collège. L'équipe pédagogique relève de
nombreuses absences qui font craindre l'installation d'une phobie scolaire.
L'équipe pédagogique veut lui faire comprendre que
les résultats scolaires sont secondaires. Elle est avant tout
présente pour l'aider à se sentir bien et à
s'épanouir dans l'enceinte du collège. C'est très
important car, même de retour chez lui, son stress ne l'abandonne pas et
ses rapports avec sa mère (il vit seul avec elle) sont tendus. Quentin
dit ne pas se sentir bien dans son environnement scolaire et familial.
C'est pourquoi, les objectifs principaux de la prise en charge de
Quentin sont une diminution de son stress, et par voie de conséquence
une décontraction physique, ainsi qu'une amélioration de ses
capacités relationnelles avec ses pairs.
Il est certes vrai que toute l'équipe désire
voir un garçon pleinement épanoui en cours et dans l'enceinte de
l'école. Mais son stress est tellement ancré en lui que
l'objectif principal de la prise en charge se limite au cadre de l'atelier.
L'atteinte de cet objectif est à ce moment là difficilement
concevable pour les personnes côtoyant Quentin.
Au regard de l'hypothèse développée dans
la première partie, le moyen de la prise en charge de Quentin sera la
pratique du théâtre, et en particulier le one-man-show compte tenu
de son gout prononcé pour l'humour et les comiques.
c- La stratégie thérapeutique est
sous-tendue par l'exploitation de l'opération artistique*.
Faire l'expérience d'un plaisir esthétique peut
permettre une détente mentale et par conséquent une
décontraction physique. Or si l'expérience est assez forte, et
comme l'être humain est fait pour s'épanouir, il voudra la
reproduire et s'investira dans cette activité artistique. Ce plaisir
esthétique peut devenir tellement fort, que l'être humain voudra
le faire partager. La difficulté est de faire ressentir une
première fois ce plaisir esthétique, difficulté pouvant
être relevée gr%oce à la compétence de
l'art-thérapeute.
Pour Quentin, voici ma stratégie thérapeutique
:
- Quentin aime l'humour et les comiques.
- Plusieurs sketches sélectionnés en fonction de
son gout lui sont présentés. L'un d'entre eux devrait lui plaire
plus que les autres.
- Il peut avoir beaucoup de plaisir à lire ce texte pour
lui-même.
- Puisqu'il existe une volonté de communication avec son
entourage, il aura peut-être envie de partager sa lecture avec le
groupe.
- Cet échange peut renforcer son plaisir esthétique
et reléguer ses angoisses au second plan, - et déboucher sur un
passage à l'action : interpréter ce sketch sur scène
devant le groupe.
En parallèle, une relation avec le groupe peut
appara»tre et se développer, ce cadre pouvant favoriser
l'émergence d'une amitié.
Voici la même stratégie thérapeutique au
regard de l'opération artistique:
- Pénalité de Quentin:
[4] (traitement sophistiqué des informations) trop
développé.
- Conséquence sur Quentin:
Passage au [5] (élan corporel) compliqué, ce qui
rend inexistantes:
- l'action définit par ce [5] et le [6] (le
savoir-faire),
- la production définit par le [7],
- et l'occasion de nouer une relation définie par le [8]
(le traitement mondain).
- Point fort de Quentin:
Il existe une volonté d'expérimenter le [8],
(Quentin cherche la relation aux autres mais n'y arrive pas).
- Objectif principal de la prise en charge de Quentin:
Faciliter un passage vers le [5].
- Stratégie thérapeutique
théorique:
- Trouver un [1] (un sketch humoristique) assez
intéressant pour Quentin.
- Faciliter la découverte de ce texte par le [2]
(rayonnement du texte et le mettre en situation de façon à
être capté par Quentin).
- Lui proposer de le lire [3] et [4].
- Le ressenti du plaisir et des angoisses se situent dans le [4].
Si le [1] est capable de rendre le plaisir esthétique plus fort que les
angoisses, un passage vers le [5] est alors possible,
- et engendrera un [5] et [6] (c'est-à-dire une action),
ainsi qu'un [7] (une production).
- Comme le [7] est une production théâtrale, le [8]
(le traitement mondain) existe simultanément que les [5], [6] et [7], et
met Quentin en relation directe avec le groupe.
- Les réactions du groupe [8], contrôlées par
l'animation de l'art-thérapeute, peuvent consolider le plaisir
esthétique de Quentin [4], et l'inciter à recommencer.
- Une fois la boucle de renforcement créée, le
passage du [4] au [5] sera de plus en plus fluide.
II.1.B- LA RÉALISATION D'UNE FICHE
D'OBSERVATION ADÉQUATE Ë LA PRISE EN CHARGE DE QUENTIN EST
NÉCESSAIRE AFIN D'ÉVALUER SON ÉVOLUTION PAR RAPPORT AUX
OBJECTIFS.
a- La fiche d'observation* concentre tous les faits
d'observation*
nécessaires à
l'évaluation.
Pour conna»tre l'évolution de Quentin entre son
état de base et ses objectifs, je crée une grille d'observation*
personnalisée. Elle concentre tous les faits d'observation qui me
paraissent pertinents par rapport aux objectifs. Pour être
précise, je détaille ces faits en items* ou faisceaux d'items*,
et je mets en place pour chacun d'eux une cotation sur une même
échelle qui va de 1 à 5 (1 étant toujours la valeur la
plus basse quantitativement ou qualitativement).
Ainsi, après chaque atelier, j'ai une heure pour remplir
cette grille et évaluer tous les items ou faisceaux d'items
d'observation en fonction de la cotation. Cette évaluation me permet de
rédiger de façon objective un bilan et une analyse de la
séance. Il est nécessaire de le faire directement après la
séance, car les items sont tellement nombreux et différents selon
les enfants, que la cotation peut se révéler impossible
passé un certain délai. Il m'a fallu plusieurs séances
pour affiner mon observation et entrainer ma mémoire afin d'être
la plus précise.
D'une séance à l'autre, la comparaison de
l'évaluation d'un même item ou faisceau d'items permet de
réaliser l'évolution de ce dernier en fonction de l'objectif
à atteindre. S'il le faut, elle me permet aussi de repenser la
stratégie mise en place.
b- Le choix des items et faisceaux d'items d'observation
s'est fait au
regard des objectifs de Quentin.
L'objectif principal de Quentin est de se sentir bien au sein de
l'établissement afin de bénéficier au maximum de la
qualité de l'enseignement.
Cet objectif est sous-tendu par deux objectifs
intermédiaires: - la diminution du stress et de sa tension physique,
- la sortie de l'isolement en nouant quelques contacts avec
d'autres élèves.
Pour évaluer le positionnement de Quentin par rapport
à ses objectifs, je vais observer attentivement ces faisceaux
d'items:
- sa capacité relationnelle aux autres
élèves,
- sa détente générale,
- sa spontanéité, car Quentin est un garçon
qui Ç calcule È tous ses faits et actes, - l'ambiance qu'il met
au sein de l'atelier.
Évaluer le faisceau d'items intitulé
capacité relationnelle de Quentin avec les autres
élèves revient à calculer la moyenne des
évaluations des items suivants:
- l'orientation de son corps quand il est sur scène (item
objectif) :
1 : jamais vers le public,
2 : s'est tourné une fois vers le public,
3 : par intermittence,
4 : s'est détourné une fois du public,
5 : toujours vers le public.
- l'orientation de son regard quand il est sur scène (item
objectif) :
1 : jamais vers le public,
2 : a regardé une fois le public,
3 : par intermittence,
4 : a oublié une fois de regarder le public,
5 : toujours vers le public.
- l'orientation de son corps quand il est spectateur (item
objectif) :
1 : jamais vers la scène,
2 : s'est tourné une fois vers la scène,
3 : par intermittence,
4 : s'est détourné une fois de la scène,
5 : toujours vers la scène.
- l'orientation de son regard quand il est spectateur (item
objectif) :
1 : jamais vers la scène,
2 : a regardé une fois la scène,
3 : par intermittence,
4 : a détourné le regard une fois de la
scène,
5 : toujours vers la scène.
- l'orientation de son regard quand il est en <<hors
production È quand il s'adresse à un autre élève ou
que ce dernier lui parle (item objectif) :
1 : ne regarde jamais son interlocuteur,
2 : a regardé une seule fois son interlocuteur,
3 : par intermittence,
4 : une seule fois, n'a pas regardé son interlocuteur,
5 : regarde toujours à son interlocuteur.
- la quantité de son discours vers les autres
élèves (item objectif):
1 : n'a jamais adressé la parole à un autre
élève,
2 : répond quelquefois aux questions des autres
élèves,
3 : répond à chaque fois qu'on lui adresse la
parole, mais ne va pas vers les autres,
4 : répond facilement et a lancé lui-même une
fois un sujet de conversation,
5 : participe à toutes les conversations, et lance
lui-même des sujets.
- la qualité de son discours vers les autres
élèves (item interprété par mes soins):
1 : la parole est agressive,
2 : la parole est << gênée È,
3 : la parole est neutre,
4 : la parole est amicale,
5 : la parole est très enjouée.
Il existe bien d'autres items ou faisceaux d'items d'observation
pour évaluer la capacité relationnelle de Quentin. Au
début, ma feuille d'observation en possédait beaucoup plus. Mais
j'ai écrémé cette grille au fur et à mesure de la
prise en charge. En effet, au début, je voulais presque tout coter. Je
me suis aperçue par la suite que beaucoup de ces items ou faisceaux
d'items n'évoluaient pas, car ils étaient toujours cotés
entre 4 et 5. Les conserver ne servait qu'à alourdir la fiche de
Quentin. C'était une perte de temps. Alors j'ai décidé de
n'évaluer que les items susceptibles d'évoluer, les autres
faisant partie de l'état de base.
Exemple : l'item Ç qualité du regard>> (item
évalué par rapport à mon propre ressenti) était
évalué gr%oce à cette cotation : 1 agressive, 3 neutre, 5
cordiale. Mais comme sa volonté d'être en relation avec d'autres
élèves a toujours été présente, son regard
était toujo urs cordial, voire amical. Dans le cas de Quentin, il
était inutile de garder cet item qui faisait partie de son état
de base. En revanche, l'item Ç quantité de regard>>
(évalué de manière objective) était à
conserver car dès notre première rencontre, j'avais
observé sa difficulté à regarder ses interlocuteurs.
Évaluer le faisceau d'items intitulé
détente générale de Quentin revient à
calculer la moyenne des évaluations des items ou faisceaux d'items
suivants:
- l'absence d'hypertension physique au début de la
séance (faisceau d'items objectif dont la nuance entre la cotation 1 et
2, ou 3 et 4, est basée sur mon propre ressenti) :
1 : particulièrement très tendu,
2 : tendu,
3 : neutre,
4 : calme,
5 : détendu et à l'aise.
- l'absence de stress au début de la séance
(faisceau d'items objectif, car je demandais clairement à Quentin
à chaque début de séance comment il allait. Mais il y a
aussi une part de subjectivité pour coter ce faisceau d'items car, en
plus de sa réponse, je me basais sur sa manière de me le dire)
:
1 : énervé, mauvaise humeur, stressé
2 : embêté, gêné,
3 : neutre,
4 : calme,
5 : serein et de bonne humeur.
- la même évaluation d'absence d'hypertension
physique et de stress pendant et à la fin de la séance, mais
seulement d'après mes ressentis cette fois-ci (car je ne voulais pas
interrompre l'action en demandant à Quentin comment il allait),
- l'absence de retrait et d'isolement volontaire (attitude
qu'il peut avoir quand il y a trop d'agitation autour de lui et qu'il manifeste
en s'asseyant à une table pour relire un cours) (item d'observation
objectif) :
1 : du début jusqu'à la fin de la séance,
2 : implication puis retrait brutal,
3 : retrait au début puis trouve sa place dans le
groupe,
4 : un retrait bref puis est revenu dans le groupe,
5 : aucun retrait ou isolement.
- le Bon (comment je Bien (1)
me suis senti) et le (comment je trouve ma prestation) de son
auto-évaluation (2).
Évaluer le faisceau d'items intitulé
spontanéité de Quentin revient à calculer la
moyenne des évaluations des items suivants:
- le passage sur scène (item objectif):
1 : ne passe pas du tout sur scène car ne le veut pas,
2 : ne passe pas sur scène en premier car ne le veut
pas,
3 : passe en premier sur scène mais ne le veut pas,
4 : ne passe pas le premier sur scène mais le veut,
5 : passe en premier sur scène et le veut.
- la justification de ses paroles ou actions (cotation objective
car cette justification se fait à voix haute):
1 : se justifie systématiquement,
2 : ne s'est pas justifié une ou deux fois,
3 : se justifie de temps en temps,
4 : s'est justifié une seule fois,
5 : ne se justifie jamais, sauf sur demande.
- la quantité de rires et de sourires (item objectif) :
1 : inexistante,
2 : a souri une fois,
3 : a ri une fois,
4 : sourit et rit de temps en temps,
5 : sourit et rit à chaque occasion.
Ces items définissant la <<
spontanéitéÈ de Quentin auraient pu faire partie du
faisceau d'items << détente È, car si on est
détendu, peu importe l'ordre de passage sur scène. On ne se
soucie pas de l'opinion des autres (justification) et on rit facilement. Mais
ce manque de spontanéité de la part de Quentin était si
criant, que j'ai voulu l'évaluer séparément pour la mettre
en valeur, et ne pas la << noyer È dans la détente.
Évaluer le faisceau d'items intitulé ambiance
mise par Quentin revient à calculer la moyenne des
évaluations des items suivants:
- la quantité de blagues dirigées vers
l'art-thérapeute (item objectif, même si l'humour est une notion
très subjective car elle est sous-tendue par le gout de la personne)
:
1 : aucune blague,
2 : une blague,
3 : rarement,
4 : de temps en temps,
5 : très souvent.
La manière de coter l'item précédent, qui
est objectif (car c'est une quantité), se fait à travers mon
ressenti, ce qui peut rendre difficile la différence entre le 3 et le 4
par exemple.
(1) : j'exploite l'auto-évaluation du Bien dans ce
faisceau d'items car le résultat dépend du niveau de
détente de Quentin. Par exemple, il a tendance à << noter
È sévèrement sa prestation quand il est tendu.
(2) : l'auto-évaluation sera développé dans
le chapitre suivant.
- la quantité de blagues dirigées vers les autres
élèves:
Même évaluation que pour la quantité de
blagues vers l'art-thérapeute.
- la qualité du moment dans son
auto-évaluation(1).
Ce dernier faisceau d'items <<ambiance mise par Quentin
>> aurait pu être inclus dans le faisceau << capacité
relationnelle >>. Je l'ai évalué à part, car il me
semble important de pouvoir montrer à l'équipe pédagogique
à quel point Quentin peut être un boute-en-train, et changer
l'image qu'elle a de lui.
c- Ma propre évaluation a été
complétée par l'auto-évaluation de
Quentin.
En fin de séance, l'art-thérapeute peut proposer
à la personne d'auto-évaluer le beau (est-ce-que l'action et/ou
la production me pla»t ?), le bien (est-ce-que la production est bien
faite ?) et le bon (est-ce-que j'ai passé un bon moment ?) sur une
échelle établie par l'artthérapeute.
Cette auto-évaluation p eut permettre à la
personne de faire le point sur la séance, et de l'impliquer dans la
continuité de la prise en charge. Par exemple, une personne
réalise un modelage. En fin de séance, elle évalue que sa
sculpture lui pla»t moyennement, car elle découvrait le modelage
pour la première fois et n'avait donc pas de technique. Par contre, elle
a passé un très bon moment. Ainsi, elle pourra parfaire sa
technique au fur et à mesure des séances pour être
satisfaite de sa production.
Dans le cas de Quentin, son auto-évaluation me permet
de comparer cette dernière au bilan de la séance dressé
par mes soins, certains faits d'observation pouvant être <<
parasités>> par une analyse psychologique faussée.
J'ai aussi utilisé certaines auto-évaluations de
Quentin dans l'évaluation de certains faisceaux d'items (voir le
détail dans le chapitre ci-dessus) afin de rendre encore plus objectives
les conclusions de mes évaluations.
d- Mais d'autres items et faisceaux d'items
d'observation ont étayé ma fiche d'observation
(2).
La fiche d'observation ayant aussi pour fonction d'être
la mémoire du déroulement de la séance, d'autres items
d'observation complètent ceux retenus pour l'évaluation de la
prise en charge de Quentin.
Il s'agit notamment des faisceaux d'items concernant le
phénomène artistique*, c'est- à-dire sur l'intention de
Quentin durant la séance, sur son action et sa production,
complétée par sa capacité esthétique* et la
dynamique de la séance. Evaluer le phénomène artistique
est d'autant plus important, car dans l'activité théâtre,
une fois la production réalisée, il ne reste rien de sensible qui
puisse permettre de me souvenir d'elle et du contexte de sa
réalisation.
La mémorisation du déroulement de la séance
permet d'expliquer, en remettant dans
(1) : une grille d'auto-évaluation est
présentée en annexe n°1 à la fin de l'ouvrage.
(2) : une grille d'observation est présentée en
annexe n°2 à la fin de l'ouvrage.
son contexte, l'évaluation d'un item d'observation
paraissant << anormal È. Par exemple, à la fin d'une
séance, Quentin a auto-évalué la qualité du moment
passé à 2 sur 5, alors que cette auto-évaluation se situe
entre 4 et 5 pour toutes les autres séances. Hors contexte, on ne peut
pas comprendre. Mais si je relie la fiche d'observation, je me remémore
le fait que cette
séance était << spéciale È pour
Quentin car il avait intégré un nouveau groupe plus agité
que son groupe habituel. Ë la lumière de cette explication, je
comprends l'évaluation de certains faits d'observation tel qu'un volume
vocal très faible lors de l'action sur scène.
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