V.3.1.2 Le diaphragme
Le diaphragme est le principal muscle inspirateur. Il intervient
autant dans le contrôle postural que dans la phonation.
Au niveau de la posture, il assure un appui antérieur
puisqu'il repose sur les viscères abdominaux. Il limite ainsi les
déplacements antérieurs du corps et permet la stabilisation du
bassin164. De plus, la contraction simultanée du diaphragme
et des abdominaux entraîne une hyperpression abdominale, ce qui a pour
effet d'exercer une lordose sur la colonne lombaire. Par conséquent,
diaphragme et muscles abdominaux participent au redressement de la
colonne165.
163Hoit (1995), « Influence of body position on breathing
and its implications for the evaluation and treatment of speech and voice
disorders », Journal of voice, 9,4; 341-347.
164Busquet L, Op. cit. p65.
165Souchard PE. (1990), Le diaphragme: anatomie,
bio-mécanique, bio-énergétique, approche
thérapeutique in Daguenant C. Penigault, Op. cit. p87.
Au niveau de la phonation, la contraction diaphragmatique tire
la trachée vers le bas, ce qui entraîne également le
larynx. Le larynx est donc dépendant de la position du diaphragme.
D'autre part, le fait de chanter avec le diaphragme en position
extrêmement basse augmente fortement l'activité du muscle
cricothyroidien166.
V.3.1.3 La «synergie respi-statique» ou
«SRS» 167
La position debout suppose des mouvements posturaux et
respiratoires permanents. Partant de ce constat, Tardy a émis
l'hypothèse d'une synergie nécessaire entre ces deux types de
mouvements. Le thorax étant le support squelettique commun aux
mouvements posturaux et respiratoires, il a tout d'abord explicité
l'existence d'une synergie respi-posturale par la coordination des mouvements
du sternum, des côtes et des vertèbres. Les mouvements posturaux
étant eux-mêmes compensés par la statique, la <<
biomécanique du squelette thoracique implique finalement l'existence
d'une synergie respi-statique »168.
V.3.1.4 La respiration comme stabilisateur
postural 169
La ventilation est la fonction la plus fondamentale de
l'appareil musculosquelettique et elle prime sur toutes les autres
activités de celui-ci. Elle est biomécaniquement et
neurologiquement couplée au système stabilisateur du tronc. Dans
l'hypothèse d'une synergie, évoquée ci-dessus, la posture
et la ventilation seraient tantôt coordonnées, tantôt
dissociées selon l'adéquation ou non entre la stratégie
respiratoire et les oscillations posturales à un moment donné.
Par ailleurs, un segment du corps ne peut se mobiliser que par
rapport à un point fixe (relatif ou absolu). La réalisation
optimale d'un mouvement dépend de la qualité de la stabilisation,
donc de l'absence de compensations. Or, le tronc sert de point fixe à la
mobilité des membres ; pour cela, il doit pouvoir se rigidifier. Chez le
sujet sain, la rigidité du rachis lombaire dépend essentiellement
des muscles paravertébraux et de l'augmentation de la pression
intra-abdominale.
166Sundberg J., Leanderson R., Curt von Euler (2005),
<< Activity relationship between diaphragm and cricothyroid muscles
», Journal of Voice, 3,3; 225-232.
167Tardy D., << La synergie respi-statique ou << SRS
» », in Lacour M., Gagey P.-M., Weber B. (1997), Posture et
environnement, Montpellier: Saurampt Médical, pp29-54.
168Lacour M., Gagey P.-M., Weber B., ibid., p42.
169Scheer C., << La respiration, régulateur postural
oublié? », in Weber B., Villeneuve Ph., (dir.) (2010),
Posturologie clinique, Tonus, posture et attitudes, Paris: Masson,
pp138-149.
La stabilisation du tronc nécessite donc la
coactivation synergique du diaphragme, des muscles de la ceinture abdominale et
du plancher pelvien170. Inversement, la respiration nécessite
un travail antagoniste de ces mêmes muscles pour pouvoir alterner
inspiration et expiration. Par conséquent, la solution la plus efficace
pour avoir un «bon équilibre» semble être d'adopter une
respiration basse, de telle sorte que:
-le diaphragme et le plancher pelvien tendent à être
horizontaux et parallèles répartissant harmonieusement le tonus
sur toute la paroi abdominale
-les muscles accessoires de la respiration ne soient pas ou peu
recrutés, libérant ainsi les chaînes d'ouverture des
membres supérieurs
-le bassin se retrouve en position neutre, puisque la masse
viscérale est comprimée vers le bas et l'arrière
-la respiration thoracique basse permette une gestion du centre
de gravité, dans le plan vertical et sagittal.
Par ailleurs, la capacité ventilatoire du diaphragme ne
semble pas corrélée à sa capacité de stabilisation.
Néanmoins, au vu du rôle stabilisateur des muscles respirateurs,
tout élément susceptible de modifier la stabilisation pourrait
également être susceptible de modifier les stratégies
respiratoires d'un sujet.
Ainsi, Scheer explique qu'un sujet qui, pour diverses raisons,
va développer une stratégie respiratoire thoracique haute
quasi-exclusive, ne pourra pas activer efficacement son système
stabilisateur (puisque celui-ci nécessite une respiration basse). Il
aura donc recours à des compensations pour se stabiliser, et recrutera
les muscles respiratoires accessoires « occasionnant une fixation
scapulaire, des dysfonctions du périnée et des douleurs
rachidiennes 171». Il ajoute: « comment
ne pas avoir de cervicalgies en respirant 20 000 fois par jour en utilisant son
rachis cervical comme point fixe pour l'action des scalènes et des
trapèzes qui seraient devenus des muscles respiratoires quasi
principaux?172».
Sheer cite également une étude173 qui a
mis en évidence des liens étroits
170Les auteurs donnent comme exemple un haltérophile, qui
arrête momentanément sa respiration, les muscles inspirateurs et
expirateurs étant recrutés pour sa stabilisation.
171Scheer C., p145, Op. cit. p96.
172Ibid., p145.
173Chaitow L., Breathing patterns disorders, motor control ans
low back pain, journal of osteopathic medicine, 2004: 7 (1); 34-41 in Scheer
C., Op. cit. p96.
entre sujets hyperventileurs, niveau d'anxiété et
lombalgies.
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