V.2.2.2 Mouvements et effort vocal
Une étude, menée en collaboration par plusieurs
phoniatres français, a mis en évidence l'existence d'une
anticipation des mouvements corporels sur la phonation147. En voix
de détresse, cette anticipation des mouvements s'observe tout
145Bouché C., (2008), Modifications posturales
contemporaines de l'effort vocal, Mémoire d'Orthophonie,
Université de la méditerranée, Ecole d'Orthophonie de
Marseille.
146Papon, p41, Op. cit. p85.
147Grini-Grandval M.-N., Ouaknine M., Giovanni A. (2000),
« Forçage vocal et variance de la vitesse: corrélation entre
la vitesse de déplacement du centre de gravité et le travail des
muscles posturaux », Rev. Laryngol. Otol. Rhinol., 121,5;
319-323.
d'abord au niveau du tronc, puis au niveau des cuisses et
enfin au niveau de la tête. Par conséquent, les mouvements du
tronc sont plus fortement corrélés à l'effort vocal que
ceux de la tête, et leur présence signe une projection vocale
efficiente. Ainsi, la coordination entre les mouvements des différents
segments corporels et la phonation montre que tout mouvement n'est pas
délétère pour la production vocale.
V.2.2.3 Douleurs rachidiennes et stabilométrie en
voix projetée
Daguenant C. et Penigault P. se sont également
basés sur des observations de la voix projetée148. Ils
ont pu observer des corrélations entre douleurs musculaires et
limitation des possibilités vocales.
Ainsi, la voix est moins efficace en présence de
douleurs du rachis en général, et de la colonne dorsale en
particulier. Lorsqu'il y a un problème de voix, les hommes
éprouvent également des douleurs des membres inférieurs,
alors que les femmes ont plus souvent des douleurs touchant la colonne
cervicale. De plus, les sujets présentant des douleurs au niveau dorsal
éprouvent des difficultés pour crier. Dans la même
perspective, les sujets exprimant un problème de voix sont aussi ceux
qui se plaignent de douleurs dorsales.
Concernant les femmes, les auteurs ont mis en évidence
une corrélation entre des problèmes de voix et des fuites
urinaires. En effet, lors de la projection vocale, le diaphragme repousse les
viscères exerçant ainsi une pression sur la vessie. La bascule du
bassin protège un peu la vessie en répartissant au mieux les
forces du péritoine, mais la musculature périnéale reste
indispensable à l'antagonisme adbominaux-diaphragme dans la projection
vocale. Une faiblesse du plancher du périnée peut donc retentir
sur l'efficacité de la voix, que ce soit du fait d'une moins bonne
efficacité du souffle abdominal ou d'une inhibition du souffle par
crainte de fuites.
Par ailleurs, comme on pouvait s'y attendre, plus la longueur
du statokinésigramme est élevée, et moins la voix
projetée est efficace. Enfin, toujours lors des épreuves en voix
projetée, leur étude stabilométrique a mis en
évidence des déplacements en Y négatifs (c'est-a-dire vers
l'arrière) pour les personnes sans plainte vocale. Au contraire, les
personnes exprimant des plaintes vocales ont des
148Daguenant C. Penigault P. (1999), Posture et projection
vocale: analyse stabilométrique et recueil de données,
Mémoire d'Orthophonie, Université de Paris IV.
déplacements en Y positifs (c'est-à-dire vers
l'avant). Nous verrons par la suite que ces résultats sont loin
d'être unanimement retrouvés. Toutefois, lors de la phonation en
voix projetée ou en présence d'une dysphonie, les autres
études observent également des déplacements de la
projection du centre de gravité dans le sens
antéro-postérieur149. Giovanni précise que,
chez un même sujet, ces déplacements ont toujours lieu au
même moment de la phonation (c'est-à-dire avant, pendant, ou
après la phonation).
Un autre mémoire, utilisant les données d'une
plate-forme stabilométrique, a montré que, en voix
projetée, un sujet sain disposait de différentes
stratégies d'adaptation posturale150. Cependant, quelle que
soit la stratégie adoptée, la voix projetée implique
toujours une augmentation du tonus de base ainsi qu'un déplacement
antéro-postérieur du centre de gravité.
La Macchia n'observe pas d'augmentation de l'écart-type
de la vitesse de déplacement du centre de gravité, mais une
augmentation de « l'indice posturologique en corrélation avec le
travail musculaire ».
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