V.2 Etudes posturales sur la voix
Dans cette deuxième partie, nous présenterons de
nombreuses études réalisées à propos de la voix et
de la posture, tout d'abord sur la posture cervicale spécifiquement,
puis dans la cadre de la projection vocale, et enfin relativement à la
pathologie vocale.
V.2.1 Études sur la posture cervicale
Pour commencer, nous allons parler de deux études ayant
montré l'impact d'un changement de la posture cervicale sur les
qualités acoustiques de la voix.
V.2.1.1 Dans la raucité vocale infantile
En 1986 déjà, un mémoire d'orthophonie a
étudié la posture d'enfants ayant des troubles vocaux. Il a mis
en évidence une corrélation entre raucité vocale infantile
d'une part, et certaines limitations ou blocages du rachis cervical, voire des
premières côtes d'autre part140.
V.2.1.2 Influence de la posture cervicale sur la voix
Les qualités acoustiques de la voix varient avec la
position du corps uniquement si le changement de position affecte directement
le cou et donc le larynx141. Ainsi, une contraction des abdominaux
associée à une flexion des genoux n'affecte en rien la
qualité de la voix, contrairement à une hyper-flexion du cou.
Par ailleurs, un travail du redressement de la statique
vertébrale effectué spécifiquement au niveau de la colonne
cervical donne un timbre plus riche142.
140Genevee-Lacharme M. et Demeule-meester-arnould N. (1987),
Intérêt de la posturologie dans l'étude de la
raucité vocale infantile, Mémoire d'Orthophonie,
Université Paris IV.
141Mathonat L., Roux A.C. (1996), Changement de posture et
influence sur la voix, Mémoire d'Orthophonie, Université
Claude Bernard, Lyon1.
142Gras F. (1999), Incidence d'une correction de la
posture sur la qualité vocale de huit patients dysphoniques:
étude de cas, Mémoire d'Orthophonie, Université de
Franche-Comté, Faculté de Médecine et de Pharmacie.
V.2.1.3 Rôle clé des
sterno-cléïdo-mastoïdiens
Rubin et coll. ont observé des anormalités
musculo-squelettiques de même type chez tous leurs patients
dysphoniques143. Ces déviances s'expliquent en partie par
l'existence de comportements posturaux pauvres dans les sociétés
occidentales. Ainsi, les muscles postérieurs de la colonne
vertébrale, souvent contracturés, dominent sur leurs antagonistes
antérieurs, qui ne peuvent maintenir l'équilibre normal du
rachis, en particulier au niveau cervical. Par conséquent, les muscles
de la ceinture scapulaire ont tendance à abandonner leur mobilité
pour adopter un rôle de stabilisateur de la colonne. Ce
phénomène s'observe fréquemment chez les patients
dysphoniques.
Pour ces chercheurs, le
sterno-cléïdo-mastoïdien est le muscle le plus responsable des
tensions laryngées et péri-laryngées. En effet, c'est le
muscle dont les insertions, notamment sternales et claviculaires, permettent
les changements de position les plus importants de la colonne cervicale, en
particulier concernant son extension. Or, toute contraction excessive du
sterno-cléïdo-mastoïdien se répercute:
-sur le processus styloïde de l'os temporal, ce qui implique
une contraction du muscle stylo-hyoïdien
-sur le processus mastoïdien, ce qui peut entraîner
des contractions excessives du digastrique.
Tout raccourcissement des fibres des muscles
stylo-hyoïdien et digastrique a un impact sur la longueur des fibres des
autres muscles supra-hyoïdiens, ainsi que sur la position de l'os
hyoïde. C'est pourquoi, les tensions au niveau des
sterno-cléïdomastoïdiens, par un effet « boule de neige
» élèvent la position du larynx, contraignent les
mécanismes phonatoires et altèrent le timbre de la voix en
changeant la forme du tractus vocal.
Selon les auteurs de cette étude, il est
également possible de regarder ce schéma de transmission des
tensions en partant de la fin. Ainsi, un effort vocal soutenu accroit les
tensions des muscles péri-laryngés, particulièrement des
muscles suprahyoïdiens, tensions qui vont se répercuter à
leur tour sur les muscles de la ceinture scapulaire.
Même si ces déductions paraissent simplistes, Rubin
et al. en observent les
143Rubin S. J., Dlake E., Mathieson L. (2007), «
Musculoskeletal patterns in patients with voice disorders », Journal
of Voice, 21,4; 477-484.
conséquences chez leurs patients dysphoniques. Ils font
en outre le postulat de répercussions de ces tensions sur les mouvements
du cartilage thyroïdien (et donc sur la tension des cordes vocales). De
plus, l'avancée de la tête qui résulte de ces tensions
musculaires, augmenterait la pression s'exerçant sur les disques
inter-vertébraux. Finalement, les tensions musculaires de la ceinture
scapulaire ont des répercussions sur la phonation autant que sur la
posture cervicale.
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