Notre contribution à la protection du patrimoine
culturel et la gestion efficiente de l'environnement va porter sur une
interrelation, une conciliation des deux actions et qui met en exergue une
interprétation, une consolidation réciproque et mutuelle entre la
culture et le développement durable. La protection du patrimoine
culturel et la gestion efficiente de l'environnement conduisent à une
logique de développement durable.
Selon l'UNESCO, « la culture crée un monde riche
et varié qui élargit les choix possibles, nourrit les
capacités et les valeurs humaines, et est donc un ressort fondamental du
développement durable des communautés, des peuples et des
nations»22. La protection, la promotion et le maintien de la
diversité culturelle sont une condition essentielle pour un
développement durable. C'est dans ce sens que la culture a
été reconnue, au sommet de Johannesbourg, comme l'une des
composantes du développement durable au même titre que
l'économie, le social et l'environnement. Si l'on reste sur cette
logique toutes les composantes du développement durable doivent aller de
pair, être combinées et conciliées. Il est donc
évident que l'une ne peut aller sans l'autre; ces deux actions sont
intimement liées. En l'espèce, le port de Loango et le domaine
royal de M'bé sont des sites situés dans la nature, en plein air
et les protéger suppose une gestion saine de leur l'environnement. A ce
propos, la convention de l'UNESCO de 1972 fait remarquer que «les
patrimoines culturel et naturel sont de plus en plus menacés de
destruction non seulement par les causes traditionnelles, mais aussi par
l'évolution de la vie sociale et économique qui aggravent leur
situation par des phénomènes d'altération ou de
destruction encore plus redoutables»23.
La conciliation de ces deux actions (protection du patrimoine
culturel et gestion de l'environnement) va permettre de sauver non seulement le
patrimoine culturel mais aussi la nature et l'environnement. En effet, au
delà de la protection du bien lui mème, les mesures d'inscription
et de classement exigent la délimitation de la zone d'inscription et de
la zone tampon; ceci pour préserver le bien et son environnement le plus
immédiat. En effet, pendant longtemps a prévalu l'idée que
l'homme est "maître et possesseur de la nature"24 . Par son
travail, l'homme domestique la nature tout en vivant d'elle. Mais, cette
volonté de maîtrise provoque aussi un mouvement de recherche
tourné vers la connaissance de la nature. Le respect de la nature est
alors une
22 Préambule de la Convention UNESCO sur la protection de
la diversité des expressions culturelles du 20 octobre 2005
23 Préambule de la Convention UNESCO de 1972 sur la
protection du patrimoine mondial, naturel et culturel
24 Descartes (R), discours de la méthode 1637,
réédition des Ed. Gallimard, Paris, 19876, 322p
préoccupation surtout scientifique. Au XXe
siècle est apparu un nouvel enjeu : comment intégrer l'homme
à la nature ? Il faut donc apprendre à connaître et
à respecter les écosystèmes : c'est l'écologie.
L'inquiétude pour la fragilité de l'environnement s'explique par
la détérioration massive et accélérée de la
planète. C'est l'ensemble de la biosphère qui se trouve
menacé. Il en va de même des paysages, élevés au
rang de patrimoine naturel ; il convient alors d'en assurer la protection. Dans
ce sens, la convention de l'Unesco de 1972 en son article 2 définit
comme patrimoine naturel :
- Les monuments naturels constitués par des formations
physiques et biologiques ou par des groupes de telles formations qui ont une
valeur universelle exceptionnelle du point de vue esthétique ou
scientifique.
- Les formations géologiques et physiographiques et les
zones strictement délimitées constituant
l'habitat d'espèces animales et végétales
menacées, qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue
de la science ou de la conservation.
- Les sites naturels ou les zones naturelles strictement
délimitées, qui ont une valeur universelle
exceptionnelle du point de vue de la science, de la conservation
ou de la beauté naturelle.
La législation congolaise ne fait pas de distinction
entre le patrimoine culturel et naturel dans leur protection. Il en est de
même dans bien d'autres pays comme Madagascar. En effet, si la loi
N°8-2010 du 26 juillet 2010 porte protection du patrimoine national
culturel et naturel au Congo, le législateur malgache a fait de
même par une ordonnance relative à la protection, la sauvegarde et
la conservation du patrimoine national. (Ordonnance n°82-029 du 6 novembre
1982 relative à la protection, la sauvegarde et la conservation du
patrimoine national)25 . Les législateurs congolais et
malgaches ont voulu protéger communément le patrimoine culturel
et naturel car il existe une interpénétration entre les deux, une
relation intimement liée et, de manière logique on ne peut
protéger l'un sans l'autre. En d'autres termes, on peut aisément
constater que la distinction entre la protection du patrimoine culturel et
celle du patrimoine naturel n'est que législative ; dans la pratique,
elles sont intimement liées en raison du fait que ces patrimoines sont
imbriqués et gérés par les communautés comme des
entités indissociables impliquant le milieu naturel, les croyances et
une intervention plus ou moins contrôlées des individus. Certains
constituent des paysages culturels comportant une double dimension culturelle
et naturelle26. Dans la gestion des deux patrimoines, la distinction
ne peut s'imposer car l'interaction est nécessaire sinon
inévitable. La protection du patrimoine naturel associe
principalement deux notions :
- La notion de patrimonialité qui évoque une
notion de valeur intrinsèque et un besoin de
conservation, voire de gestion restauratoire.
- La notion de nature, vivante ou morte (sous forme de
patrimoine géologique, paléontologique,
etc.) et donc un principe de naturalité.
25 Negri (V), Droit et patrimoine en Afrique, Version
réactualisée, Recueil de législation relatives à la
protection du patrimoine culturel, Université Senghor, 2002
26 De Souza (A) : Présentation des institutions de
promotion et de valorisation du patrimoine culturel au Bénin. Actes de
séminaire de Praia, décembre, 1996.
C'est en 1965 aux USA (lors d'une conférence à
la Maison Blanche) que l'on a eu l'idée de concilier la conservation des
sites culturels et naturels. Au cours de cette conférence a
été demandée la création d'une Fondation du
Patrimoine Mondial pour nouer des partenariats internationaux dans le but de
protéger < les lieux, les paysages et les sites historiques les plus
extraordinaires pour le présent et l'avenir de toute l'humanité
». Lors de la conférence des Nations Unies sur l'environnement
humain en 1972, l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature
(UICN), a présenté à ses membres des propositions
formulées en 1968. Un texte unique concernant tous les Etats membres fut
adopté lors de cette conférence et la convention sur la
protection du patrimoine mondial culturel et naturel fut adoptée le 16
novembre 1972 par la conférence générale de l'UNESCO.
Cette convention met en exergue l'action de cohabitation entre l'homme et son
environnement le plus immédiat, une composante indispensable de leur
équilibre. Ainsi, il s'agit pour nous de créer une harmonie entre
les populations locales et leur environnement naturel et culturel
immédiat. Il ne faut surtout pas croire que le patrimoine est une
matière morte.
Dans le cadre de notre travail, il nous a été
donné de consulter les sources scientifiques ; celles-ci ont
été d'un apport considérable, mais il faut faire remarquer
que la protection du patrimoine culturel doit intégrer le cadre du
développement durable. Aujourd'hui, la ceinture verte court bien de
risques de disparition parce qu'en partie, les dimensions culturelles ne sont
pas prises en compte. Aussi, tout est culturel ; le commerce,
l'économie, le sport, l'habitat, la nourriture... ont chacun un fond
culturel indiscutable. Il paraît alors indispensable d'assurer la
protection des patrimoines culturel et naturel qui sont des traces de la
mémoire collective. Dans le cas d'espèce, si rien n'est fait le
port de Loango et le domaine royal de M'bé vont disparaître. Nous
entendons par notre projet non seulement entretenir et perpétuer cette
civilisation aussi remarquable mais aussi contribuer à
l'amélioration des conditions de vie des populations locales,
détentrices de ce patrimoine.
Les patrimoines naturel et culturel forment donc un ensemble
faisant partie des biens précieux non seulement pour une
communauté mais pour l'humanité tout entière. La
convention de 1972 est en effet, l'un des rares documents qui abordent les
liens entre ces deux types de patrimoine à l'intérieur du
même document. La perte d'une de ces valeurs constitue la perte d'une
partie de notre environnement culturel et naturel. Il devient alors
indispensable d'élaborer des stratégies visant à assurer
un équilibre entre le développement de nos sociétés
et la conservation des ressources culturelles et naturelles. Ce qui permet de
déterminer l'impact que les différents chantiers peuvent avoir
sur l'environnement et le patrimoine culturel ou naturel. À cet effet,
la convention invite les états signataires < à assurer la mise
en valeur et la transmission aux générations futures du
patrimoine culturel et naturel situé sur son territoire » par :
- L'adoption d'une politique générale visant
à assigner une fonction au patrimoine culturel et
naturel dans la vie collective, et à assigner la
protection de ce patrimoine dans les programmes de planification
générale.
- L'institution sur leur territoire d'un ou plusieurs services
de protection, de conservation de mise
en valeur du patrimoine culturel.
- La prise de mesures juridiques, scientifiques, techniques,
administratives et financières
adéquates pour l'identification, la protection, la
conservation, la mise en valeur et la réanimation de ce patrimoine pour
favoriser la création ou le développement de centres nationaux ou
régionaux dans ce domaine et encourager la recherche scientifique.
D'une manière générale, la vie dans les
communautés est marquée par une relation dynamique entre l'homme
et son environnement car l'homme consomme, utilise, transforme les
éléments composant son environnement immédiat pour assurer
sa survie. En somme, la qualité de la vie est sujette au comportement de
l'homme face à son environnement.