Le droit des communauté à un environnement sain( Télécharger le fichier original )par Boris TCHOMNOU Université de Limoges - Master II 2006 |
INTRODUCTION GENERALE.
L'évolution des droits de l'homme s'est longtemps déroulée loin du droit de l'environnement1(*). Cependant, il est unanimement admis de nos jours que malgré son enfantement douloureux, le droit à l'environnement est le nouveau-né des droits de l'homme2(*). Tout comme le droit à la paix, le droit à la culture et le droit au développement, le droit à un environnement sain appartient à la 3ème génération des droits de l'homme encore appelée droit de la solidarité3(*). En effet, le droit à un environnement sain, proclamé d'une manière solennelle comme premier principe lors de la conférence des Nations unies sur l'environnement à Stockholm en 1972, en ces termes : Le droit de chaque Être humain à un environnement dont « la qualité lui permette de vivre dans la dignité et le bien-être », a été repris par la charte africaine des droits de l'homme et des peuples de 19814(*) et a reçu sa reconnaissance finale au sommet de la terre à Rio en 1992. Le droit à l'environnement est par ailleurs consacré au plan national par bon nombre de constitutions.5(*) Alors que toutes les autres catégories des droits de l'homme s'inscrivent dans le présent, le droit à un environnement sain structure le présent et l'avenir ; c'est le seul droit qui sert de pont entre les générations présentes et futures. De plus, en tant qu'un droit de l'homme, le droit à l'environnement sain est inhérent à la nature humaine c'est-à-dire que tout Etre humain peut s'en prévaloir depuis sa conception jusqu'à sa mort, en vertu de la maxime «Infans conceptus pro nato habetur»6(*). C'est dire que le simple fait d'être né vivant et viable suffit pour jouir de son droit à un environnement sain que l'on soit allogène ou autochtone, riverain ou habitant de la forêt. L'objectif de ce nouveau-né des droits de l'homme est clair : «protéger et améliorer l'environnement pour les générations présentes et futures ». Il convient de relever que cet objectif s'inscrit à coup sûr dans la logique du développement durable; lequel développement peut bien se réaliser par l'exploitation des ressources naturelles. A ce niveau, la question qui saute aux yeux est celle de savoir si l'exploitation des ressources naturelles et notamment forestières prend en compte l'objectif visé par le droit à un environnement sain. L'hésitation face à cette question est permise à partir du moment où, nous savons que la modernité avec sa raison scientifico-technique et le productivisme caractérisé par l'autodestruction «terricide et humanicide» ; ont favorisé la désacralisation de l'univers, la profanation du sol, la déforestation, et l'exploitation effrénée et irrationnelle des ressources naturelles en général et des ressources forestières d'Afrique centrale en particulier. C'est fort de ce constat que dans le passé récent, et plus particulièrement au cours de la dernière décennie, presque tous les pays africains en général et ceux d'Afrique Centrale en particulier ont entrepris des reformes législatives en vue de se doter d'un cadre juridique relatif à la gestion des ressources forestières7(*). Ces règles forestières nationales se sont tant bien que mal adaptées à l'évolution du contexte international et aux impératifs de celui-ci, qu'il s'agisse, hier d'une gestion rationnelle ou actuellement d'une gestion durable des ressources forestières8(*). La raréfaction des ressources forestières et l'érosion de la diversité biologique qui affectent le continent africain ont conduit à la mise en place d'instruments de planification et d'outils de gestion plus participative en vue de mieux assurer la conservation et l'utilisation durable du patrimoine forestier et de mieux satisfaire les besoins socio-économiques des populations nationales en général et des populations forestières en particulier en services forestiers. Tel est le contexte dans lequel se situe notre étude. Il convient à présent, avant d'entrer dans le vif du sujet et afin d'éviter toute querelle sémantique, de marquer un temps d'arrêt sur la précision terminologique (I); Ensuite, nous dégagerons la problématique qui guidera notre travail (II) ; Enfin, suivront l'intérêt, l'approche méthodologique (III).
I - Précisions terminologiques.Il s'agit ici de définir les notions suivantes : Communautés forestières (A), le droit à un environnement sain (B), l'exploitation(C), ressources forestières (D), et Afrique Centrale (E). A- la notion de communauté forestière.
La communauté9(*) peut désigner l'ensemble des habitants ou de personnes vivant ensemble et poursuivant des buts communs. Dans le cadre de notre étude la communauté forestière fait référence non seulement aux riverains (1), mais aussi bien aux habitants (2) des massifs forestiers. * 1 -Il s'agit d'une branche assez récente du droit qui a eu de la peine à affirmer son autonomie face aux autres branches du droit comme le droit de l'urbanisme, le droit de la mer. Et selon le Pr.Kamto M. le droit de l'environnement peut se définir comme « l'ensemble des règles, des techniques juridiques et des institutions relatives à la protection du milieu et à la conservation de la nature et des ressources naturelles ». In Droit de l'environnement en Afrique EDICEF /AUPELF Vanves 1996. p.21 * 2 -Mohamed A. Mékouar, Environnement et droits de l'homme, Unesco 1987 p.91 * 3-Les droits de la 1ère génération sont politiques et civils, ceux de la 2ème sont de nature sociale et économique. P.M. Dupuy. Droit international public. Précis Dalloz 6ème édition 2002.p.214 * 4-C'est l'Afrique qui, la première, a donné une consécration juridique formelle au droit à l'environnement sur le plan régional : L'art.24 de la Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples adoptée à Nairobi (Kenya) le 28 juin 1981 ; dispose que « tous les peuples ont droit à un environnement satisfaisant et global, propice à leur développement » * 5 -Voir le préambule de la constitution camerounaise du 18 janvier 1996 qui dispose « Toute personne a droit à un environnement sain. » Voir aussi l'article 35 de la constitution du Congo du 20 janvier 2002. * 6 -Cette règle de droit privé signifie que l'enfant simplement conçu est considéré comme né chaque fois qu'il y va de son intérêt à condition qu'il naisse vivant et viable. * 7-Justine Texier : Tendance de droit forestier en Afrique francophone, hispanophone et lusophone, Etude juridique de la FAO en ligne 28, mai 2002 * 8 -Stéphane Doumbe-Bille ; Le droit forestier en Afrique centrale et occidentale. Etudes juridiques de la FAO en ligne décembre 2004 * 9-Voir le petit Larousse illustré.2005 100éme édition.p.270 |
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