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Pouvoirs publics et crises des entreprises publiques congolaises. Cas de la Gecamines au Katanga

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par Jean-luc MALANGO KITUNGANO
Université de Lubumbashi, RDC - Licence en sciences administratives 2007
  

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UNIVERSITE DE LUBUMBASHI

FACULTE DES SCIENCES SOCIALES, POLITIQUES ET ADMINISTRATIVES

DEPARTEMENT DE SCIENCES POLITIQUES ET ADMINISTRATIVES

POUVOIRS PUBLICS ET CRISE DES ENTREPRISES PUBLIQUES CONGOLAISES

Cas de la Générale des Carrières et des Mines (GCM)

Par :

MALANGO KITUNGANO, JEAN-LUC

Bachelier en philosophie,

Gradué en Sciences Politiques

et Administratives

Mémoire présenté et défendu en vue

de l'obtention du Grade de

Licencié en Sciences

Politiques et Administratives

DIRECTEUR : Professeur MBAYA

KABAMBA

Docteur en Sciences Politiques et Administratives

ANNEE ACADEMIQUE : 2007-2008

INTRODUCTION

Le présent travail s'intitule Pouvoirs Publics et crise des Entreprise Publiques congolaises : Cas de la Générale des Carrières et des Mines (GCM). Le choix de ce thème est à la fois subjectif et objectif.

Choix subjectif parce qu'en nous proposant d'investir cette étude sur les incidences des pouvoirs publics sur la crise de la Gécamines, nous n'échappons pas à l'écueil majeur du coefficient idéologique du chercheur dans le choix d'un thème. Cette idéologie est principalement patriotique : défendre les intérêts des congolais en face d'un capitalisme sauvage mondialisé.

Choix objectif parce qu'au cours de notre formation, dans la filière science administrative, nous avons eu l'opportunité de consolider les connaissances en Management des entreprises, en Déontologie et administration des affaires, en Macroéconomie, en Gestion financière, en Analyse des politiques publiques, en Aspects politiques et administratifs du Développement, en Problèmes et politiques du développement rural et agricole ...Cours qui nous ont permis d'aborder ce thème en toute lucidité c'est-à-dire dans une situation de neutralité praxéologique.

Au moment où différents acteurs politiques : société civile, gouvernement, parlement,...cherchent des voies et moyens pour faire sortir la RDC du marasme économique, nous trouvant au Katanga, traiter d'un sujet d'actualité qu'est la crise de la Gécamines, en usant des outils scientifiques, s'avère opportun. Ce thème nous permettra de comprendre et de faire comprendre l'origine, l'évolution et les voies possibles de sortie de la crise multiforme que traverse la Gécamines.

L'intérêt de notre travail est, à ce titre, à la fois théorique et pratique. L'intérêt théorique réside dans le fait que nous cherchons à partir de l'étude d'un cas, à vérifier, voire à construire modèle explicatif du rapport systémique entre les pouvoirs publics et la crise des entreprises publiques congolaises en général et celle d'une entreprise minière en particulier.

L'intérêt pratique réside dans la recherche des causes vérifiables résultant des incidences des pouvoirs publics sur la crise de la Gécamines et les pistes de solutions possibles.

Certes, nous ne sommes pas le premier chercheur ou analyste à nous intéresser à la crise de l'entreprise qu'est la Gécamines. Des chercheurs et analystes de tous les horizons s'y sont intéressés avant nous, soit de manière générale, soit de manière particulière.

C'est le cas de Didier Kilondo Nguya dans Ménages Gécamines, précarité et économie populaire1(*). Dans ce mémoire de DEA, Kilondo Nguya voulait savoir le rapport entre l'accumulation capitaliste à la Gécamines et la résistance populaire au Katanga. Son hypothèse est qu'il y a une relation problématique entre l'accumulation à la Gécamines et le développement au Katanga. Kilondo Nguya décrit le mouvement de l'accumulation du capital au Katanga et la fragilisation sociale des masses populaires qui en a résulté. Il soutient que la fragilisation des masses populaires a entraîné une résistance populaire face au processus actuel d'accumulation du capitalisme industriel mondialisé au Katanga.

Selon lui, le modèle d'industrialisation qui avait fait peu à peu entrer tous les travailleurs du tiers monde dans le salariat moderne n'est plus porteur d'un projet social. Cette assertion est révélatrice d'une mutation profonde de toute la société. C'est l'expression d'une crise multiforme qui se manifeste à travers la détérioration des conditions d'accès aux services de base pour la majorité de la population. Cela traduit la fin de la montée en puissance du salariat comme mode principal de régulation économique et sociale.

L'économie de la province du Katanga, basée sur l'industrie minière en général et la Gécamines en particulier, n'est plus porteuse d'avenir pour les masses ouvrières qui dépendaient de la Gécamines de suite d'une mutation profonde. Cette mutation dans est perceptible à travers le déclin de l'industrialisation modelée sur les masses ouvrières et à travers la montée de la précarité et de la vulnérabilité du travail.

Alors que l'éthique du salariat s'était intériorisée dans la culture katangaise depuis la colonisation et que le secteur industriel y connut une remarquable expansion, il y a lieu d'admettre aujourd'hui, quatre décennies après la colonisation, que le modèle adopté de la modernisation du Katanga par une industrie minière (la Gécamines), est en panne.

L'apport de ce mémoire est le fait que son auteur s'est penché sur le cas de la Gécamines sous l'angle de la théorie de l'industrialisation et de la résistance populaire de la période coloniale à l'année 1989.

En 2006 paraissait, L'Etat contre le peuple : la gouvernance, l'exploitation minière et le régime transitoire en République démocratique du Congo2(*). C'est un rapport publié par l'Institut Néerlandais pour l'Afrique Australe (NIZA) et le service d'information d'International Peace (IPIS)3(*).

D'une part, ce rapport consacre son chapitre le plus important à la « gouvernance et à l'exploitation minière au Katanga » (pp. 32-69), et traite d'autre part, de différents contrats en rapport avec la restructuration de la Gécamines avec l'appui de la Banque Mondiale.

Sa problématique est de montrer le rapport entre la mauvaise gouvernance, l'exploitation minière et les conflits en RDC. Comme hypothèse, le rapport estime que la Communauté Internationale au travers de la Banque Mondiale encourage le bradage du patrimoine minier congolais. Les tentatives de privatisation des parastatales minières congolaises relèvent d'un projet ancien remontant au gouvernement de la 2ème République (1995), alors que Kengo - Wa-Dondo était premier ministre.

En effet, ces tentatives de privatisation ont été contrariées en 1996 et 1998 par les « guerres de libération ». Pendant les dites guerres, toutes les parties belligérantes ont négocié des modifications aux contrats existants. Depuis la mort de L.D.Kabila en Janvier 2001, la Banque Mondiale a supervisé la politique minière du gouvernement congolais. Cette supervision a largement consisté à prôner la privatisation des parastatales congolaises. La politique de gestion des ressources minérales de la RDC par la Banque Mondiale a soulèvé des graves préoccupations dénoncées par plusieurs ONG de la Société Civile et autres observateurs internationaux avisés.

La Banque Mondiale avait été critiquée pour plusieurs raisons, notamment pour son approche imposée d'en haut, sans véritable participation des bénéficiaires et pour sa négligence du rôle que les ressources naturelles jouent dans l'alimentation des conflits armés malgré les lignes directrices de sa propre Conflict Prevention and Reconstruction Unit. Il a été également reproché à la Banque Mondiale de négliger l'incapacité institutionnelle de la RDC à réguler le système du marché libre sur lequel le secteur minier se trouve actuellement. Un autre reproche est que la Banque Mondiale minimise la mauvaise gouvernance et les pratiques de corruption qui entravent une redistribution équitable des bénéfices tirés du secteur minier.

Le rôle des Pouvoirs Publics congolais qui ressort de ce rapport est principalement la complicité de ceux-ci face au bradage du patrimoine minier congolais, en général et celui de la Gécamines, en particulier. Comme apport, ce rapport sert principalement d'outil de lobbying des ONG locales et internationales contre l'exploitation illégale de ressources de la RDC et ne fait pas ressortir les données plus précises et détaillées relatives à la crise de la Gécamines.

En 2007, paraissait à Lubumbashi La Générale des carrières et des Mines (GCM) : une culture et une civilisation4(*) . Cet ouvrage écrit par un ex-travailleur de la Gécamines, Ikos Rukal Diyal, a comme problématique la recherche des causes de la chute de l'entreprise minière qu'est la Gécamines. Son hypothèse stipule que ce serait la mauvaise gestion due tant aux dirigeants externes qu'internes. Malheureusement, dans le corps du travail, il ne ressort aucune description précise des responsabilités.

L'apport de cet ouvrage est, néanmoins, la description de certains faits historiques ou l'auteur est impliqué comme participant-observateur, notamment la baisse des avantages sociaux, la chute de production (...) résultant de la crise.

Cet ouvrage demeure principalement une autobiographie telle que l'auteur le souligne lui-même dans l'introduction. L'auteur se raconte dans l'entreprise jusqu'en 2001. Le livre demeure donc une perception d'un ex-agent de la Gécamines sur sa situation.

Pour notre part, nous voudrions donner tout son sens au rapport entre les Pouvoirs Publics et la crise de la Gécamines.

Il s'agira donc de montrer les incidences tant politiques, économiques que sociales des Pouvoirs Publics congolais sur la crise de la Gécamines. C'est dire que nous ferons notre les grandes interrogations relatives à la théorisation de la crise des entreprises publiques, en générale, et celle de la Gécamines, en particulier. Nous tenterons à partir des indicateurs vérifiables d'établir ces incidences. A ce titre, nous nous démarquons des travaux précités.

Sur le plan théorique, nous essayerons d'apporter une contribution à l'enrichissement de la science administrative en tant que discipline toujours en construction. Nous voudrions ainsi contribuer au renforcement de la théorie du « Management des entreprises publiques congolaises ». Cette étude permet aussi d'exercer une critique nuancée a posteriori de certaines mesures prises par les Pouvoirs Publics congolais dans le cadre de la restructuration de la Gécamines.

Nous partons du constat selon lequel la plupart des programmes économiques et financiers qui ont été entrepris avec l'appui de la Banque Mondiale et le FMI pendant plusieurs années n'ont pas pu mettre la RDC sur la voie du développement. Malgré l'apport dans le programme dit de restructuration de la Gécamines, par exemple, celle-ci n'a pas résolu sa crise multiforme. Sans accroître sa production, cette entreprise en 2003 avait une dette globale qui atteignait 1 milliards de $ US. De 1997 à 2000, elle devait à une autre entreprise publique, la Société Nationale des Chemins de fer du Congo (SNCC), 16.188.083 $ US5(*). En 2004 la GCM demeurait incapable d'assurer le payement régulier des salaires et avantages sociaux de ses travailleurs et n'aurait apporté au trésor public que 400.000 $ US d'impôt6(*).

Notre problématique, considérée comme l'ensemble des questions que le chercheur se pose a priori et dont il se fixe de vérifier les réponses provisoires à l'issue des résultats de recherche, se comprend aussi dans le sens de « définir exactement l'objet de la recherche et, en même temps, le mode d'approche de cet objet »7(*).

Créée en 1906 sous le régime colonial dans un processus d'accumulation capitaliste et nationalisée sept ans après l'avènement d'une République du Congo indépendante, l'UMHK/Gécamines a eu la vocation de poumon économique de la province du Katanga et la principale source de recettes en devises du pays sous Mobutu.

Quatre décennies après la colonisation, on estime que le modèle adopté de modernisation du Katanga par une industrie minière nationale serait en panne. Le signe révélateur serait la crise multiforme que traverse la Gécamines.

Pour notre étude, la problématique se présente de la manière suivante :

Quelles sont les incidences (négatives) des Pouvoirs Publics congolais sur la crise de la Gécamines ?

Ce qui caractérise les Pouvoirs Publics congolais, c'est le contexte politique et économique de crise. Politiquement, le pays a été successivement le théâtre de la colonisation, de la dictature et des rébellions. A ce contexte d'instabilité des régimes politiques s'est ajoutée la crise économique chronique.

Selon Raymond Quivy et Luc Van Campenhoudt, l'hypothèse peut prendre deux formes : soit la forme entre un phénomène et un concept, soit entre deux phénomènes8(*). Ceci nous pousse à poser quelques hypothèses9(*) :

Les incidences des Pouvoirs Publics congolais sur la crise de la Gécamines seraient négatives et situées à trois niveaux interdépendants.

D'une part, le phénomène de crise qui caractérise la Gécamines serait fondamentalement lié à un système politique et administratif sous-développés.

D'autre part, nous estimons que les Pouvoirs Publics congolais auraient une incidence négative sur la Gécamines étant donné que les Pouvoirs Publics résulteraient d'un système politique de prédation qui à son tour aurait engendré le néopatrimonialisme dans les entreprises publiques en général, et la Gécamines en particulier.

Comme incidences politiques, la consolidation de l'Etat colonial, puis de l'Etat post-colonial en RDC se serait effectuée au niveau du pouvoir central par la constitution des classes sociales qui collaborent à l'extraversion des ressources minérales du pays. Au niveau de la Gécamines des strates se seraient formées dans la « néopatrimonialisation » des ressources de l'entreprise. Les implications de la prédation par le pouvoir étatique sur la Gécamines auraient exacerbé la mauvaise gestion de l'entreprise par les acteurs locaux.

Comme incidences économiques et financiers, le capitalisme congolais serait embryonnaire, dépendant très fortement des forces économiques extérieures. Ce fait rendrait les entreprises publiques minières fragiles en face d'un marché financier fluctuant et de plus en plus prédateur vis-à-vis des pays à faible compétitivité industrielle et commerciale.

L'adoption d'un modèle d'accumulation extravertie et basé sur les recettes d'exportation du Cuivre et du Cobalt, dont la Gécamines était la première entreprise publique dans le secteur, renforcerait la relation systémique de prédation entre les pouvoirs publics - dans un contexte d'instabilité politique - et la Gécamines. Cette dernière a toujours supporté le poids de l'économie congolaise en termes de recettes en devises. Elle ne peut prétendre à l'autonomie de gestion vu son importance dans le financement de différents régimes politiques et son régime juridique en tant qu'entreprise publique.

Si d'une part, l'importance de la Gécamines résidait dans son monopole sur les sites miniers très étendus, possédant des réserves importantes de cuivre et de cobalt, d'autre part, le régime en place ayant opté pour le libéralisme aurait été contraint de brader le patrimoine de la Gécamines au profits des entreprises minières privées étrangères.

Comme incidences sociales, la dépendance financière, technologique et politique envers l'extérieur constitue un goulot d'étranglement en aval, tandis qu'en amont, avec la politique de restructuration mis en place par la Banque Mondiale, c'est la décomposition-récomposition des structures de la société katangaise toute entière qui serait en train de d'opérer. La restructuration de la Gécamines visant à réduire les coûts d'exploitation en diminuant l'effectif du personnel se serait répercutée sur l'environnement social tout entier.

Dans cet environnement longtemps marqué par une gestion paternaliste de la population active groupée autour de la Gécamines, les agents licenciés dans l'Opération Départ Volontaire (ODV) ne bénéficient plus des revenus conséquents ni des avantages sociaux ou d'une politique publique de reconversion. Ceux resté en fonction, seraient incapables, avec leurs salaires modiques et avantages sociaux réduits au minimum, d'assurer la redistribution des revenus jadis prolifiques.

Pour mener à bien cette étude, nous usons de la méthode systémique. Le propre de cette méthode est d'aider le chercheur à comprendre et à faire comprendre au sens le plus large, non seulement les résultats de la recherche scientifique, mais aussi le processus de recherche lui-même10(*).

L'interdépendance des parties par rapport au tout est le fondement de la notion même de système. La méthode systémique a pour but dans notre étude de construire un modèle explicatif du rapport entre les pouvoirs publics et la crise de la Gécamines.

Comme l'Entreprise Publique entretient des rapports étroits avec les pouvoirs publics, la méthode systémique nous permettra de saisir les rapports d'interactions entre ceux-ci et l'entreprise publique d'une part et, d'autre part, le processus de transformation au sein de l'entreprise elle-même, et ses rapports à son environnement social.

Dans le cadre de ce travail, c'est la méthode systémique telle qu'elle est d'usage chez David Easton et Jean-William Lapierre qui nous intéresse particulièrement. En effet, elle nous permettra de saisir le rapport entre un système politique, dont relève les pouvoirs publics, et les entreprises publiques qui en sont une partie intégrante mais qui, en même temps, subissent les pesanteurs tant du pouvoir législatif, exécutif, judiciaire que de l'environnement social11(*).

En plus de la formule classique « input / processus de transformation / output », tout système comprend trois composantes essentielles: la communauté (les membres du système), le régime (détermine les règles du jeu), les autorités (les occupants des rôles d'autorité).

Vu sous cet angle, nous tenterons d'identifier les membres de la communauté, les acteurs catégoriels, les régimes politiques en place et ses mécanismes de reproduction, les autorités politiques et les gestionnaires de l'entreprise, leurs actions et réactions en face de la crise de la Gécamines.

La méthode systémique chez Easton est intéressante dans la mesure où le système comporte plusieurs activités essentielles dont la formulation des exigences, le choix ou conversion de ces exigences par la législation ou les coutumes, la prise de décision, l'exécution par les moyens administratifs, le soutien au système et moyens de le renforcer12(*). Ces différentes activités relevées dans la méthode systémique d'Easton nous permettront d'analyser les incidences réelles des Pouvoirs Publics sur la crise de la Gécamines.

La méthode systémique nous offre ici le schéma d'exploration et d'explication de nouveaux secteurs de la science administrative (les politiques publiques en matière de gestion des Entreprises publiques en RDC, la bonne gouvernance, ...). Elle nous permet, par ailleurs, de comprendre que le système et sous-systèmes politiques nationaux, tels l'Etat et les entreprises publiques, ne jouissent que d'une autonomie restreinte mais pas irréversible, en face de la prédation de l'économie internationale. Ceci explique la nécessité de la volonté politique des pouvoirs publics en face des conséquences locales négatives de la mondialisation.

En transformant l'environnement du système politique congolais, la mondialisation modifie les conditions de fonctionnement de ses entreprises publiques. Car celles-ci doivent faire face à des demandes et à des contraintes nouvelles, avec des ressources de plus en plus limitées, tandis que leurs compétences sont remises en cause par les régulations tant des pouvoirs publics nationaux que des Institutions Financières Internationales (IFI), et que les acteurs économiques et financiers (multinationales) qui entrent en compétitions avec les entreprises publiques minières congolaises échappent largement à la capacité de contrôle des pouvoirs publics nationaux des pays sous développés comme la République Démocratique du Congo.

Les pouvoirs publics congolais ont-ils la capacité d'inverser les vapeurs de la crise des ses entreprises publiques dans un contexte où ils contrôlent, de moins en moins, les ressources minérales ? La situation de crise multiforme que traverse la Gécamines exige-t-elle une action globale rapide ? A quel niveau agir précisément ? A ces questions, la méthode systémique nous aidera dans la précision des lieux d'actions.

Cette méthode a des apports indéniables aux sciences humaines : « un vocabulaire commun, une technique pour traiter les grandes organisations, une approche synthétique là où existent de nombreuses interactions, la substitution de la notion dynamique de relations aux anciennes entités statiques, une possibilité d'atteindre l'essentiel de la vie sociale en termes de communication et d'information, enfin un moyen d'étudier de façon opérationnelle les notions de buts, de besoins, de symboles, de conscience de soi, de processus socio-culturels »13(*)

Cependant, la méthode systémique ne se suffit pas à elle-même, certains auteurs lui reprochent même de n'apporter qu'un langage, c'est-à-dire une rigueur conceptuelle qui n'est pas celle de la précision quantitative des recherches empiriques. Ils lui reprochent également de ne rien découvrir qu'on ne savait déjà14(*). Ainsi allons-nous la compléter par une approche multidisciplinaire et des techniques de recherche diverses.

Parmi ces approches, nous userons de l'approche historico-critique qui nous permettra de baliser le terrain historique dans la compréhension de la crise actuelle de la Gécamines. Nous recourons également à l'approche juridico-institutionnelle15(*) pour saisir les différents textes en rapport avec les entreprises publiques et les contrats qu'elles passent.

Comme techniques, nous emploierons à la technique documentaire. Celle-ci nous permettra de procéder à l'analyse du contenu des documents en rapport avec notre sujet de recherche. Il s'agit d'ouvrages, des mémoires, des textes juridiques, des rapports, des comptes rendus, des lettres, des statistiques, et des journaux.

A cette technique, nous associerons l'observation directe. Etant au Katanga (Lubumbashi), nous mettrons à profit ce que nous y observons quotidiennement, d'une part. D'autre part, du 04 mars 2008 au 04 avril 2008, nous avons effectué notre stage académique de fin de second cycle universitaire à la Direction Générale de la Gécamines à Lubumbashi. En effectuant l'expérience d'observateur-participant, nous avons pu accéder aux lieux où l'entreprise Gécamines a ses bureaux et installations. Nous avons pu aussi par ces occasions nous entretenir avec les agents de la Gécamines et palper du doigt ses réalités internes.

Il importe de préciser la délimitation spatiale et temporelle de notre sujet : Notons que la présente recherche se limite à la Province du Katanga et n'a pas la prétention de couvrir toute l'histoire de la Gécamines. Nous nous sommes attelé de manière principale à la période allant de 2001 à 2007. La date de 2001 est prise en compte car elle marque le début du programme de restructuration (redémarrage rapide d'urgence) de la Gécamines par la Banque Mondiale dans un contexte de dialogues politiques et de transition politique et l'année 2007, l'an un du Gouvernement démocratiquement élu.

Quant à la référence aux périodes précédentes ou postérieure, elle ne le sera qu'à titre illustratif. Au lieu de revenir une fois de plus sur la période de prédation de la Gécamines sous Mobutu et sur la crise économique qui l'a caractérisée, note étude s'intéresse particulièrement aux incidences des pouvoirs publics sur la crise de la Gécamines pendant les six récentes années.

Comme difficultés rencontrées, nous pouvons mentionner d'abord les difficultés généralement liées à la recherche en science administrative. Comme science carrefour, elle emprunte des approches multiples : économique, sociologique, politique...que le chercheur ne maîtrise pas toujours à suffisance16(*). Il y a ensuite le fait que la recherche en science administrative est confrontée au milieu, c'est-à-dire à une entreprise qui est couverte par le secret professionnel (ne pas divulguer certaines données). D'où, les difficultés liés à la non fiabilité de certaines sources disponibles. Comme l'avait déjà relevé B. Rubbers et G. Iyenda17(*), les statistiques produites par l'administration en charge des matières économiques en RDC sont, d'une part, sujettes à cautions, d'autres part, nous avons reçu tout simplement un refus net d'y accéder. C'est le cas des données de la direction de Impôts en rapport avec les taxes versées par les entreprises minières partenaires de la Gécamines ou encore les taxes de la Gécamines. La motivation suspecte qui nous était prêtée par certains agents du milieu de la Gécamines a constitué aussi un obstacle de taille.

Enfin, il y a eu la méfiance de certains agents de Direction de la participation de la Gécamines pour nous fournir certaines données financières ou économiques ou encore pour répondre à certaines questions en rapport avec les partenariats que la Gécamines a conclus avec plusieurs entreprises privées. Nous pouvons évoquer le cas où sollicitant par exemple la consultation sur place et sans prise de notes des contrats de partenariat concluent entre Kinross Forrest, Anvil Mining, Ridgepointe... et la Gécamines, un refus catégorique nous fut donné par un agent de la direction de gestion des contrats, M. LUMUNA. Malgré la présentation de tous les documents relatifs à notre qualité d'étudiant faisant des recherches dans le cadre d'un mémoire de licence et la présentation du permis de stage délivré par la Gécamines qui nous admettait comme stagiaire à la Direction de Ressources humaines18(*). Il en fut de même au service de la qualification de l'emploi où notre questionnaire n'a jamais été rempli, car bloqué au niveau du secrétariat.

Néanmoins, nous avons pu contourner partiellement certains obstacles en mettant à profit notre temps de stage et les relations que nous avons eu à tisser avec certains agents, pour recueillir des informations dont nous avions besoin. Bien plus, usant de l'intérêt scientifique avec certains agents enseignant à l'Université de Lubumbashi, comme le professeur Tshilonda  de la Faculté de psychologie, nous avons pu recevoir des orientations vers des personnes qui nous ont fourni certaines données essentielles.

Hormis l'introduction et la conclusion, notre étude proprement dite est composée de trois chapitres de répartition très inégale. Le premier chapitre est consacré aux précisions conceptuelles et les théories scientifiques de base. Le deuxième chapitre traite des incidences des pouvoirs publics sur la crise de la Gécamines. Une conclusion reprendra les acquis de notre travail ainsi que les propositions et suggestions éventuelles.

* 1 KILONDO NGUYA, Ménage Gécamines, précarité et économie populaire, Mémoire de DEA en développement, Université de Louvain, 2003-2004, inédit. http://www.mémoireonline.com/ consulté le 26 décembre 2007. La même année académique 2003-2004 était défendu un mémoire de licence en Sciences Politiques et Administratives de NGOIE SANKIA, Analyse de l'opération départ volontaire comme facteur de relance des activités économiques d'une entreprise publique (cas de la Gécamines), Mémoire , SPA, Université de Lubumbashi, 2003-2004, inédit. Ce mémoire a pour problématique l'analyse de l' « Opération Départ Volontaire » à la Gécamines. Comme hypothèse, l' Opération Départ Volontaire (ODV) n'aurait pas déclanché la relance économique de la Gécamines, ce que confirmerait la situation de crise persistante de celle-ci à l'époque.

* 2 NIZA, L'Etat contre le peuple : la gouvernance, l'exploitation minière et le régime transitoire en RDC, Institut néerlandais pour l'Afrique australe (NIZA) et le service d'information d'International Peace (IPIS), Amsterdam, 2006, 84 pages.

* 3 En Novembre 2007, le Forum de la Société civile de la RDC avait publié un rapport sur la revisitation des contrats en RDC, douze (12) contrats miniers ont été abordés. Nous parlerons largement du contenu de ce rapport dans le corps de notre travail.

* 4 IKOS RUKAL DIYAL, La Générale des Carrières et des Mines (GCM): une culture et une civilisation, Lubumbashi, Editions BAOBAB, 2007.

* 5 KALENDA NDAY, La politique de recouvrement d'une entreprise publique et son incidence sur la gestion financière : cas de la SNCC de 1997-2000, TFC, Lubumbashi, Institut Supérieur de Commerce (ISC - Lubumbashi), 2001-2002, p. 48.

* 6 NIZA, Op. Cit., pp. 36-37.

* 7 NADIA PATANELLA, Notes sur la Méthodologie de la science politique, Liège, Université de Liège, Cours DEA, 2002-2003, p. 10.

* 8 R. QUIVY, et L. VAN CAMPENHOUDT, Manuel de Recherche en Sciences Sociales, Paris, Ed. Dunod, 1988, p. 129-130.

* 9 Nous entendons par hypothèse, une proposition, un énoncé de fait qui anticipe une relation entre deux variables. En d'autres termes, il s'agit d'une réponse provisoire à une question. C'est une présomption qui est sujette à vérification.

* 10 A. KAPLAN, cité par M. GRAWITZ , Méthodes des sciences sociales, (11ème Edition), Paris, Dalloz, 2001, p. 15.

* 11 On distingue plusieurs tendances dans l'analyse systémique en général et dans la méthode qui en découle en particulier. Dans la première tendance, la conception du système est issue d'une orientation structuro-fonctionnaliste inspirée par les écrits de Talcott Parsons et de ses élèves dont G. Almond et D. Apter. Quatre groupes d'éléments relativement stables composant la structure sont analysés : les rôles liés aux activités des individus dans la société, les collectivités (familles, partis politiques...) les normes et les valeurs. Ces deux dernières relèvent à la fois du système culturel et du système social et sont riches en information tandis que les rôles et les collectivités sont plus riches en énergie. La fonction apporte un élément dynamique : tout système social réagit devant les facteurs de déséquilibre qui le menacent. Quatre fonctions sont chargées de faire face aux problèmes les plus habituels. Une fonction de stabilité normative, par définition la moins dynamique, la fonction d'intégration qui coordonne les éléments du système, la fonction de poursuite des buts, enfin la fonction d'adaptation qui porte sur l'ensemble des moyens dont dispose le système pour atteindre ses objectifs. Ces quatre fonctions sont hiérarchisées parallèlement aux structures. Les deux premières correspondent aux valeurs et aux normes, les deux dernières plus liées à la réalité, correspondent aux collectivités et aux rôles. Le plus grand reproche formulé au systématisme de Parsons est surtout son insistance sur la notion d'équilibre. Il a donc tenté dans son oeuvre postérieure d'intégrer le changement à sa théorie. M., GRAWITZ, op.cit, p. 436-437.

* 12 M., GRAWITZ, Ibid, p. 12.

* 13M. BUCKEY, cité par M., GRAWITZ, Ibid., p. 440.

* 14 C'est le cas de Marie-Nöel SARGET pour qui la méthode systémique reste enfermée dans des limites conceptuelles qui lui interdisent de rendre compte par exemple des décisions politiques les plus lourdes et les plus irrationnelles de ce siècle. M-N., SARGET, « problèmes et limites de l'approche systémique de la décision politique » Version Web : http://www.afscet.asso.fr/MNSand01.pdf, consulté le 06 janvier 2008. Sur la critique de la méthode systémique voire aussi GRAWITZ, op. cit., p. 440.

* 15 L'approche juridique use de plusieurs méthodes dont celle sémiotique (se fonde sur le langage), génétique (recherche de la connaissance de la volonté du législateur d'une loi), systémique (vise à éclairer un fragment du texte par un autre, voire par d'autres textes), fonctionnelle (donne au texte la signification lui permettant de remplir la fonction qu'on lui a attribuée). J-L. MALANGO KITUNGANO, L'interprétation de la loi par le juge et l'historien du droit : le problème de l'application dans vérité et méthode, Mémoire, Faculté de philosophie saint Pierre Canisius, Kimwenza/ Kinshasa, 2005-2006, inédit, p. 20.

* 16 Sur les limites de la recherche en science administrative, Cfr., NTAMBWE LUMANISHA, Epistémologie et Méthodologie de la science administrative, L1 SPA, FSSPA, Université de Lubumbashi, 2006-2007, Cours, inédit.

* 17 T., TREFON, et P. PETIT, (Dir.), Expériences de recherche en République Démocratique du Congo : Méthodes et contexte, Bruxelles, Université Libre de Bruxelles, 2006. p. 18.

* 18 M. Lumuna, de la Direction de la gestion des contrats nous a fait savoir que son service ne pouvait donner, même pour consultation sur place, les contrats conclus par la Gécamines avec certaines grandes entreprises telles le Groupe Malta -Forrest, Ridgepointe, Anvil Mining ...étant donné qu'il y a la clause de confidentialité qui lie la Gécamines à toutes ces entreprises. Son directeur de passage dans le bureau a confirmé cela. En outre, il était convaincu que j'étais un journaliste ou encore un membre espion de la société civile ou d'une ONG internationale qui dénonce les contrats léonins. Nous étant rendu à la Bibliothèque de la Gécamines, nous avons été reçu froidement par un agent qui a refusé de nous donner les rapports annuels de la Gécamines, même le plus anciens arguant qu'il s'agit des données confidentielles.

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