le souci comme être du Dasein chez Heidegger Martin( Télécharger le fichier original )par Serge MUTUMBO Institut saint Jean Bosco kansebula - Graduat en philosophie et sciences de l'éducation 2003 |
1. 3 l'être-soi quotidien et le « on ».
Dans le monde ambiant, le Dasein rencontre l'autre tel qu'il est et il se préoccupe de lui. Dans cette rencontre, il y a le souci constant de se distinguer avec les autres. C'est un mode existential de l'être-en-commun qu'est le distancement. Il est une caractéristique de l'être-avec-autrui qui démontre clairement que le Dasein est sous l'emprise d'autrui dans son être-en-commun quotidien. « Les possibilités d'être quotidien de l'être-là sont à la discrétion d'autrui »24(*). Cet autrui n'est personne de déterminé. Il est n'importe qui et n'importe qui peut le représenter ! Il est neutre, c'est le « on ». Il est tout le monde même s'il n'est pas la somme de tous. Dans le « on », chacun est semblable à tout autre et chacun est dissous dans l'autrui. « La moyenne est un caractère existential du « on »25(*). Le « on » réside toujours dans la moyenne du convenable, d'acceptable de ce qui est et n'et pas reçu tout comme de ce qui mérite notre accord et de ce qui ne le mérite pas. Ce souci de la moyenne contrôle et surveille tout ce qui veut se rendre exceptionnel. Tout ce qui est original n'est pas considéré à sa juste valeur dans le « on ». L'original est dévalorisé, dévalué et déconsidéré. Tout ce qui veut sortir dans la manière globalisante du « on » est vu d'un mauvais oeil. Il faut faire comme tout le monde. Quand on veut faire autrement, le Dasein est vu comme nuisible. C'est ainsi que Martin Heidegger dit: « Ce qui a été conquis au prix de l'effet devient objet d'échange. Tout secret perd la force de son mystère »26(*). Le souci de la moyenne donne lieu au nivellement. L'opinion publique est le mode d'être du « on » qui est constitué du distancement, de la moyenne et du nivellement. Le public est celui qui a le monopole de l'interprétation du monde et de l'être. Le public a toujours raison et il décide tout. Son interprétation du monde est erronée car il refuse d'entrer dans le fond des choses. Il digère mal les distinctions de niveau et d'authenticité. Il a le caractère obscurcissant et fait croire aux autres que ce qu'il a dissimulé est une réalité, une chose connue et accessible à tout le monde27(*). Le « on » s'engage dans tous les domaines et propose à chaque fois les jugements et les décisions qu'il faut. Avec cette façon de faire, le « on » rend l'être-là irresponsable. L'être-là dans le mode d'être de « on » n'a pas de responsabilité concrète car le « on » peut porter n'importe quelle responsabilité, puisque nul ne sera interpellé dans ce mode d'être de l'être-là. C'est le mode de l'inauthenticité de l'être-là. Quand il reste dans le « on », le Dasein reste dans l'inauthenticité. Bien de choses accomplies dans notre existence quotidienne se font dans ce mode de l'inauthenticité. Le « on » décharge l'être-là de ses responsabilités voire de son être. L'être-là tombe dans la frivolité et la facilité dans ce mode. Tout le monde est tout le monde. Il y a une confusion-fusion comme Heidegger l'explicite en ses termes : « Chacun est l'autre et personne n'est soi-même. Le « on » qui répond à la question de savoir qui est l'être-là quotidien n'est personne. A ce « personne », l'être-là, mêlé à la foule, s'est toujours-déjà abandonné »28(*). Tout ceci constitue la nature permanente et immédiate du Dasein. La permanence est un mode d'être du Dasein comme être-avec-autrui. Il ne faut pas le comprendre dans le sens de la continuité d'un étant subsistant. Dans ce mode d'être du Dasein, l'ipséité du Dasein et celle de l'autrui n'apparaissent pas encore. Ce mode ne signifie pas pour autant que le Dasein perd sa facticité, car du fait que dans le mode du « on » celui-ci n'est personne, il n'est donc pas un néant mais il est un ens réalissimum. Même dans ce mode, le Dasein n'est pas un néant, il est toujours quelque chose à réaliser dans ses possibilités d'être comme étant. « L'ipséité de l'être-là quotidien est celle du « on », que nous avons à distinguer de l'ipséité authentique, c'est-à-dire de celle d'un soi qui se saisit lui-même »29(*). Dans le premier cas, le Dasein est distrait et dispersé dans ce « on » dans lequel il se trouve. Toute interprétation du Dasein en ce qui concerne le monde et l'être-au-monde est prescrite par le « on ». Ainsi, « c'est de prime abord que je ne ``suis'' pas ``moi'' au sens de l'ipséité authentique mais que je suis les autres sur le mode du ``on'' »30(*). Je me donne à moi-même à partir du « on ». Le Dasein reste souvent dans ce mode et il y demeure ! La découverte authentique du monde et le rapport de cette découverte à soi peut arriver que lorsqu'on élimine et détruit les occultations, camouflages et dissimulations dans lesquels l'être-là s'enferme à soi-même. Le Dasein explique préontologiquement son être propre grâce au « on » qui est son mode d'être immédiat. Et le même chemin est par l'explication ontologique qui comprend le Dasein à partir du monde et le rencontre parmi les étants intramondains. Comme le dira l'auteur : « C'est l'être-au-monde lui-même qui, par son mode d'être quotidien, se dérobe et se dissimule à soi-même de prime abord »31(*). L'ipséité authentique du Dasein est une modification existentielle du « on ». Il existe un profond abîme entre l'identité du soi existant authentiquement et l'identité du moi qui gît sous la multiplication de ses actes conscients32(*). * 24Idem, op. Cit. , 159. * 25 Ibid. * 26Ibid ,160. * 27 Cf. Ibid., 160. * 28 Ibid, 160. * 29 Ibid, 162. * 30 Ibid. * 31 Ibid., 163. * 32 Cf. Ibid, 163. |
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