Coopération au développement et renforcement des capacités locales : Intervention des ONG et marges d'autonomie des acteurs à la base (cas des ONG GADEC et DIAPANTE )( Télécharger le fichier original )par Mamadou DIOUF Université GASTON BERGER de Saint Louis - Maîtrise de Sociologie du Développement 2007 |
Section dix-sept (17) : Les marges d'autonomie des acteurs à la base dans le cadre des interventions des ONG GADEC et DIAPANTEAnalyser les marges d'autonomie des acteurs à la base dans le cadre des interventions des ONG GADEC et DIAPANTE tel était notre objectif principal, pour y parvenir nous avons défini deux (2) niveaux d'analyse à savoir les marges d'initiative et les marges d'autonomie. Sans revenir sur le contenu précis que nous donnons à ces 2 dimensions rappelons qu'elles couvrent, à notre sens, chacune deux (2) indicateurs principaux que nous avons empruntés à G. BELLONCLE; il s'agit de l'auto analyse et de l'auto programmation pour les marges d'initiative et de l'auto organisation et de l'auto suivi pour les marges de manoeuvre. C'est justement au regard de ces indicateurs que nous chercherons à tirer des conclusions de nos analyses précédentes en partant notamment des données qualitatives recueillies sur le terrain et des résultats de l'analyse de contenu. 17.1 : Les marges d'initiative des acteurs à la base dans le cadre des interventions du GADEC et de DIAPANTE Derrière les marges d'initiative ou d'auto détermination il y a, comme nous le disions, cette capacité (pouvoir) pour les populations d'identifier par elles mêmes les problèmes et besoins prioritaires auxquels elles sont confrontées et d'initier par elles mêmes, aussi, les actions à entreprendre pour y remédier. En d'autres termes, quant on parle de marge d'initiative des populations dans une optique de développement endogène et participatif c'est surtout en référence aux capacités de ces dernières à prendre en charge leurs propres besoins et à leur trouver par la même des solutions adéquates. Dès lors si on doit juger valablement de la qualité ou du niveau d'initiative dont jouissent ces mêmes populations dans le cadre des interventions du GADEC et de DIAPANTE il est plus pertinent, pensons nous, de beaucoup plus s'intéresser à l'étape de l'élaboration des documents de projets ou programmes. Non pas que c'est uniquement au cours de cette phase que l'initiative des populations peut être amenée à s'exprimer, mais tout simplement parce que c'est surtout au courant de ce processus que l'on procède à l'identification des besoins, qu'on les priorise et que l'on défini et planifie les actions ou activités à entreprendre. S'agissant de l'identification des besoins et de leur priorisation il est clair, au regard des résultats de nos enquêtes, que les marges d'initiative dont jouissent les acteurs à la base dans le cadre des interventions du GADEC et de DIAPANTE sont plus que larges. On s'est bien rendu compte, en effet, que cette phase des projets ou programmes était celle où les approches et les méthodes de ces deux ONG laissent véritablement cours au principe d'auto détermination. Que ce soit pour les diagnostics ou tout simplement pour la priorisation des besoins identifiés, les ONG GADEC et DIAPANTE cherchent à chacune de ces étapes, non seulement, à impliquer les populations mais surtout aussi à leur laisser les coudés libres en terme de pouvoir décisionnaire. Là où le bât blesse c'est qu'à partir de la planification et plus généralement de tout le processus de « ficelage » du futur projet ou programme les marges d'initiative dont jouissent les populations commencent véritablement à être limitées. Il est vrai, et cela est à encourager, qu'elles sont effectivement invitées à émettre des avis et à proposer des alternatives...Mais nous pensons, comme le démontre d'ailleurs notre analyse sur ce point, que cette participation (qui ne devient en fait qu'une contribution) est très largement limitée dans le sens où en terme d'initiative (auto programmation) ce ne sont pas ces mêmes populations qui décident. Comme il ressort, en effet, des données de l'enquête de terrain plus de 50% des responsables du GADEC et DIAPANTE reconnaissent que le pouvoir de décision dont jouissent ces dernières dans de tels processus n'est déterminant que dans certaines limites. Grâce à l'analyse de contenu nous avons également pu relever dans le cas de DIAPANTE, par exemple, un fait qu'il nous paraît pertinent d'exposer ici pour mieux illustrer tout ceci. Dans le cadre de son atelier de planification stratégique tenu en avril 2002, il avait été établi un modèle d'analyse des relations entre DIAPANTE et ses environnements. Ce modèle d'analyse distinguait cinq (5) éléments constitutifs du système de relation entre DIAPANTE et ses environnements. Dans les différents classements proposés, les acteurs à la base (comités de jumelage de Mbagam et de Ndiathène) figuraient dans l'élément environnement immédiat. Mais le fait qui a surtout attiré notre attention est que dans les conclusions de l'atelier on note que parmi les différents constats qui ont été fait figure le fait que l'environnement immédiat en général et les populations en particulier, n'ont aucune incidence sur le sous système stratégique de DIAPANTE. Autrement dit il n'a pas de rôle déterminant dans la détermination des stratégies d'intervention. On peut dans la même veine citer, dans le cas du GADEC, une donnée de l'analyse de contenu portant sur la catégorie générique expérience et qui confirme que les protocoles d'élaboration des documents de projets ou programmes (et un peu plus particulièrement les phases de planification) laissent souvent à désirer. Dans le texte introductif à la première session du forum des partenaires, le GADEC reconnaît qu'un premier bilan sur l'exécution du PTDI (programme triennal de développement intégré) en attendant une évaluation qualitative globale de ses actions, leur permet d'avancer quelques éléments parmi lesquels le point suivant « bien que la conception de ce programme ait été faite de manière participative sur une longue durée (6 mois environ), il y a eu des insuffisances dans sa méthodologie d'élaboration..... »93(*). Le plus important, pour nous n'est pas de se dire que dans le cadre du PCD/CMN par exemple lorsqu'il s'est agit de déménager le village de Ndiathène, le besoin de disposer d'une source permanente d'eau a était un besoin exprimé (identifié) par les populations elle mêmes (bien que cela soit encore une fois nécessaire et à encourager). Mais l'important reste plutôt de se demander si ce sont vraiment ces mêmes populations qui ont décidé que la source d'eau soit plutôt une station de pompage qu'un puit communautaire (ce qui leur aurait épargné des coûts financiers supplémentaires) ? Ceci est une question parmi d'autres qu'il est essentiel de se poser. Mais ce que nous voulons surtout dire c'est qu'il était primordial pour nous d'aller au-delà des intentions et du discours afin de mieux nous rendre compte des marges d'initiative qui sont effectivement laissées aux populations dans le cadre des interventions des ONG GADEC et DIAPANTE. De cela, il ressort que dans le fond même si les populations sont appelées à contribuer au processus de définition et de planification des activités ; il reste qu'elles n'en demeurent pas moins dépourvues de tout véritable pouvoir de décision. L'auto programmation est presque nulle dans le sens où ce n'est que quand les idées (initiatives) de l'EIVC ou des comités de jumelage rejoignent les schémas et cadres de référence (termes de référence) des potentiels bailleurs que l'ONG les valide et les fait figurer dans la programmation. Cette analyse des faits se confirme au regard des données qualitatives recueillies sur le terrain. Par saturation on remarque, en effet, que sur le thème 3 du guide d'entretien la plupart des personnes rencontrées estiment que même si des efforts sont fait pour prendre en charge leurs besoins spécifiques reste que le niveau d'implication, de responsabilisation et de concertation d'avec les acteurs à la base sur les actions et activités à mettre en oeuvre est plus que déplorable et mérite d'être revu sur de nombreux points. 17.2 : Les marges de manoeuvre des acteurs à la base dans le cadre des interventions du GADEC et DIAPANTE Les marges de manoeuvre recoupent deux principaux indicateurs que sont l'auto organisation et l'auto évaluation. L'analyse des niveaux d'auto organisation dans les procédures d'intervention du GADEC et de DIAPANTE peut se faire à l'étape d'exécution ou de mise en oeuvre. En ce sens il peut être facile, à première vue, d'affirmer que l'auto organisation est effective en ce sens où les populations qui exécutent par elles mêmes les tâches à mettre en oeuvre parviennent d'une manière ou d'une autre à s'auto organiser. Autrement dit, il y a toujours dans l'exécution des projets et programmes une certaine part d'auto organisation du côté des populations surtout si elles en sont les principaux exécutants (ce sont les jeunes ou les femmes qui vont chercher l'eau et ce sont les hommes mûrs qui font les briques...). Mais, ceci n'est qu'une échelle d'auto organisation peu déterminante dans le processus d'exécution. Les rubriques les plus déterminantes dans l'organisation et la gestion de l'exécution des activités sont, comme nous avons pu le voir, à la charge des ONG. Pour tout ce qui est décaissement, approvisionnement en inputs ou encore définition des critères de suivi, l'ONG est en effet seul maître du jeu. Cette situation déteint bien évidemment sur les marges de manoeuvre dont disposent effectivement les populations, d'autant plus que c'est une situation similaire qu'il est donné de constater pour ce qui est de l'auto évaluation. Comme nous avons eu a le voir, en effet, autant leur participation à l'étape d'exécution est biaisée autant également elle l'est à l'étape de suivi/évaluation. Ce que confirment les données qualitatives. Jusqu'à saturation les populations auxquelles nous avons soumis le guide d'entretien estiment sur le thème 5 que l'ONG est celui à qui appartient les « grandes décisions ».
* 93 GADEC. Texte introductif à la première session du forum des partenaires. Décembre 1993, p.5. |
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