Mesure et analyse de la pauvreté infantile au Togo en 2006( Télécharger le fichier original )par koffi dodzi KASSAMADA Université de Lomé - DESS 2008 |
CHAPITRE 3 : METHODOLOGIE ET ANALYSE DU PROFIL DE LA PAUVRETE INFANTILE AU TOGO
Méthodologie de la recherche La méthodologie développée23(*) pour atteindre les objectifs de la recherche consiste à utiliser une technique permettant d'agréger les différentes dimensions non monétaires de la pauvreté en vue de construire un indicateur composite de pauvreté infantile. En effet, en retenant l'approche non monétaire de la pauvreté basée sur les besoins fondamentaux ou vitaux, la présente recherche conceptualise le bien-être dans l'espace des accomplissements en opposition à l'approche monétaire. Dans cette optique, les principaux domaines pris en compte sont : la santé et la nutrition de l'enfant, l'accès à l'eau et à l'électricité, la possession de biens durables, l'habitat, l'environnement, l'assainissement du ménage etc. Les études concernant la répartition du revenu ou de la richesse distinguent nettement les questions liées à l'inégalité de celles relatives à la pauvreté. Les premières concernent la répartition dans son ensemble tandis que les autres se concentrent sur la base de l'échelle de la répartition. Autrement dit, alors que la pauvreté situe dans l'absolu le niveau de vie d'une partie de la population (les pauvres) à travers le seuil de pauvreté, l'inégalité analyse les différences de niveau de vie relatif au sein d'une société. Ce sont ces deux phénomènes qui seront étudiés dans la présente étude. 3.1.1 Analyse de la pauvreté multidimensionnelleDans la revue de la littérature sur les indicateurs et les indices composites de la pauvreté, on distingue deux cas : les Indicateurs Composites de Pauvreté et les Indices Composites de Pauvreté. Un indicateur composite de pauvreté est défini pour chaque unité d'une population donnée et représente la valeur agrégée de plusieurs indicateurs de pauvreté à l'aide d'une forme fonctionnelle, alors qu'un indice composite résulte de l'agrégation d'un indicateur composite de pauvreté sur une population donnée. Le calcul d'un indicateur composite de pauvreté se trouve donc être préalable à celui d'un indice composite de pauvreté. 3.1.1.1 Construction de l'indicateur composite de pauvreté (ICP) La technique d'analyse factorielle choisie par notre étude est celle de l'ACM étant donné que les indicateurs initiaux de la pauvreté tels que collectés sont sous forme qualitative et peuvent être codifiés sous forme binaire. Par l'ACM, l'étude disposera de critères pour sélectionner les variables pertinentes qui vont servir à la construction de l'ICP. Le principal critère généralement utilisé est celui relatif à la Consistance Ordinale sur le Premier Axe (COPA) factoriel qui décrit nettement une situation de bien-être. Les variables qui ont la propriété COPA obéissent à la règle selon laquelle le bien-être se détériore en passant d'une situation de richesse à une situation de pauvreté tout au long du premier axe. Pour les variables dichotomiques, la propriété COPA signifie tout simplement que la modalité décrivant une situation de pauvreté se trouve du côté des pauvres. Les autres critères du second ordre concernent les mesures de discrimination, l'étalement sur le premier axe, la fréquence élevée de non-reponse et les fréquences très faibles de certaines modalités. Au cas où donc certaines variables se trouvent être rejetées suite au critère COPA, elles peuvent être récupérées (reconsidérées) en procédant à de nouveaux regroupements des modalités. La forme fonctionnelle de l'indicateur composite est tout simplement la moyenne des poids des catégories qui est lui-même la moyenne des scores normalisés. Si m désigne l'indice d'un ménage donné et Cm sa valeur pour l'indicateur composite, Cm, la forme fonctionnelle de l'indicateur, telle que définie par Asselin (2002) est : Où K= nombre d'indicateurs catégoriels Jk= nombre de catégories de l'indicateurs k = poids (score de premier axe normalisé) de la catégorie Jk = variable binaire 0/1, prenant la valeur 1 lorsque l'unité a la catégorie Jk Les pondérations obtenues par l'ACM correspondent aux scores normalisés sur le premier axe factoriel. La valeur de l'ICP pour tout ùménage m correspond tout simplement à la moyenne des poids des variables catégoriques binaires. Avec n ménage, le poids d'une catégorie est tout simplement la moyenne des scores normalisés des unités de population appartenant à cette catégorie. Le tableau suivant fait ressortir les dimensions non monétaire de la pauvreté infantile qui seront considérées dans l'ACM : Tabeau 4 : Description des variables relatives aux dimensions non monétaires de la pauvreté infantile
3.1.1.2. Techniques de mesure de l'indice de pauvreté multidimensionnelle 3.1.1.2.1. La détermination du seuil de pauvreté multidimensionnelle Avec l'indicateur composite de pauvreté Ci calculé il est possible de calculer les indices de pauvreté multidimensionnelle une fois qu'il a été déterminé un seuil de pauvreté absolu. La détermination du seuil est justifiée par le fait que l'indice composite de pauvreté est un indicateur de bien-être qui ordonne les individus en fonction de leur niveau de vie. Il s'agit de trouver une valeur en dessous de laquelle, dans le cas présent, les enfants sont considérés comme n'ayant pas le minimum de bien-être acceptable. Plusieurs méthodes existent pour déterminer ce seuil absolu. Suivant Asselin (2002)26(*), le seuil de pauvreté multidimensionnelle peut être calculé suivant trois approches. Premièrement, on retient comme seuil le poids le plus faible des dimensions non monétaires de l'ACM. Il s'agit dans ce cas de considérer que l'individu pauvre est celui qui est pauvre dans au moins une des dimensions non monétaires. L'auteur juge ce critère nécessaire mais non suffisant. Deuxiémement, le critère suffisant mais non nécessaire est d'être pauvre dans toutes les dimensions considérées. Enfin, la condition nécessaire et suffisante est de considérer le poids maximal des dimensions comme seuil en considérant que l'indicateur composite de pauvreté moyen de l'individu est plus élevé que ce seuil. Une autre méthode est de considérer un enfant de référence non pauvre à qui on atribue certains traits caractéristiques, notamment, par exemple, être ou avoir été allaité, avoir consommé du sel iodé et de l'eau plate, être vacciné, être issu d'un ménage modeste. La moyenne des poids de ces modalités va constituer un seuil appelé S1. on calcule ensuite pour chaque individu un indicateur composite (ICP1) en considérant les poids des modalités retenues pour l'enfance de référance. De même, on calcule ensuite un autre indicateur composite (ICP2) à partir des poids des autres modalités non précédemment retenues. En effet, avec K variables, l'ICP peut être décomposé de la manière suivante : Où Score i1 : score de l'individu i, pour la variable 1 Score i2 : score de l'individu i, pour la variable 2 K = nombre de variables catégorielles = première valeur propre Le seuil S2 va être la moyenne des ICP2 pour tout ICP1 inférieur à S1. le seuil absolu se calcule comme : S = S1 + S2 (2) 3.1.1.2.2. La mesure de l'indice composite de pauvreté multidimensionnelle Etant donné que les indicateurs composites de pauvreté calculés peuvent prendre les valeurs négatives, il devient indispensable de procéder à des transformations de ces indicateurs en valeurs positives pour pouvoir calculer les indices composites de pauvreté multidimentionelle et effectuer les tests de dominance par exemple. A cet effet, la présente recherche a recours aux approches utilisées par, entre autres, Sahn et Stifel (2003a et 2003b) et Ki (2005)27(*). Suivant ces auteurs, dans le cas du calcul des indices composites de pauvreté, il est supposé que la moyenne et la variance de la distribution des indices sont arbitrairement définies à zéro et un. Ainsi, l'une des conséquences de cette hypothèse est que toute transformation positive finie des valeurs des indices ne changera pas l'information fournie étant donné que, bien que la moyenne de la distribution changera, l'ordre des ménages en terme de rang reste maintenu. Ainsi, pour obtenir des valeurs positives des indices calculés, il est indiqué d'ajouter à chaque valeur initiale de l'indicateur composite de pauvreté la valeur absolue de la plus grande valeur négative parmi les indicateurs. Toutefois, cette translation n'est pas sans conséquence, notemment sur les analyses de l'inégalité. Une fois que les ICP positifs sont obtenus par translation et qu'un seuil de pauvreté est défini, on peut calculer les indices composites de pauvreté. Parmi les différentes mesures de pauvreté sur la base des indices, la présnte étude choisit la mesure proposée par Foster-Greer-Thorbecke (1984)28(*). Ce choix est guidé par le fait que l'indice Foster-Greer-Thorbecke, dit indice FGT, possède plusieurs propriétés dont celle d'être décomposable ; ce qui permet de comparer le niveau de pauvreté entre des groupes spécifiques de ménages (ménages ruraux, ménages urbains). L'indice FGT peut être calculé suivant la formule ci-après : avec 0 Où est une mesure de la sensibilité de l'indice de pauvreté , z est le seuil de pauvreté, Gj est l'écart de pauvreté de l'individu j i.e Gj = z - xj avec x le niveau de revenu / dépense / richesse de l'individu j (avec Gj = 0 losque xj > z). Les principales questions auxquelles on peut être soumis lorsque l'on parle de la pauvreté sont : le nombre de pauvres, la profondeur de la pauvreté observée (mesurée par le niveau de la richesse nécessaire pour éliminer la pauvreté), enfin la sévérité (gravité) de la pauvreté. Quelques indices sont utilisés dans la littérature pour tenter de répondre à ces interrogations. Il s'agit des indicateurs tels que : l'indice FGT (0)29(*) ou indice numérique pour dénombrer les pauvres ; l'indice FGT (1) ou écart moyen de pauvreté, qui donne une estimation de la quantité moyenne de ressources nécessaires pour éliminer la pauvreté ; l'indice FGT (2), qui tient compte de l'inégalité de la distribution des dépenses de consommation des pauvres. Toutefois, étant donné que la présente étude devra effectuer une translation sur les indicateurs composites de pauvreté avant de pouvoir calculer les indices, seul l'indice FGT (0) sera mesuré et analysé étant donné que les indices FGT(1) et FGT (2) n'ont pas de sens socio-économique dans ce cas. L'analyse de l'indice FGT peut être renforcée par l'utilisation des courbes FGT, ce qui permet de traiter de la dominance en pauvreté des distributions des ICP les unes par rapport aux autres. Ansi donc, les courbes FGT (0) permettent d'étudier la domination stochastique de premier ordre, c'est-à-dire de pouvoir confirmer ou non que, par exemple, la proportion de pauvres d'une distribution A est robustement plus élevée ou faible que celle d'une distribution B. 3.1.1.3. Techniques de décomposition régionale de l'Indice de pauvreté De ce qui précède, il convient de procéder à une comparaison de la pauvreté infantile selon le milieu de résidence en ayant recours aux techniques de décomposition de Sahn et Stifel (2000, 2003a et 2003b). L'approche consiste à décomposer l'indice de pauvreté sur la base du critère de résidence (milieux urbain et rural) en vue d'apprécier si les variations d'ensemble dans l'indice de pauvreté sont dues aux variations de l'un ou de l'autre ou aux mouvements entre milieu de résidence avec différents niveaux de pauvreté. Soit deux secteurs de résidence (u pour le secteur urbain et r pour le secteur rural) ; en considérant les mesures de pauvreté FGT (Pá, pour á > 0) pour deux distributions (A et B) d'indicateurs, on peut écrire : Où est la pauvreté mesurée dans le secteur j pour la distribution t, et est la part de population du secteur j dans la distribution t. Les deux premières composantes à droite de l'égalité mesurent les effets intrasectoriels, i.e la contribution de la variation intervenue respectivement dans la pauvreté urbaine et rurale dans la variation totale de la pauvreté de la population issue de A. La troisième composante mesure la part de la variation dans la pauvreté résultant des mouvements de population dans la variation totale de la pauvreté. La dernière composante indique l'interaction entre les variations sectorielles et les mouvements de population. * 23 L'étude s'est largement inspirée de la méthodologie déjà utilisée par différents travaux au sein du réseau PEP ces dernières années, notamment, Ki et al (2005) et Lawson-Body et al (2006). * 24 Parmi les indicateurs anthropométriques de mesure de la malnutrition généralement calculés, la présente étude retient, à l'instar de Sahn et Stifel (2002), taille pour-âge qui reflète un retard de croissance dû a une déficience alimentaire de longue durée. Le critère de définition de l'état de malnutition d'un enfant est celui de l'OMS (1983) en comparaison avec les caractéristiques de la population de référence dont le score a une distribution normale (moyenne nulle et écart-type égal à 1). En effet, l'OMS recommande que soit considéré comme malnutri, un enfant dont le score est inférieur au u-seuil de -2 écart-type de la médiane de référence. En dessous de -3, l'enfant est considéré comme chroniquement malnutri. Ces normes ont pourr utilité de pouvoir faire des comparaisons au niveau international en désignant la proportion d'enfants en dessous de ce seuil et comparer cette proportion à celle de la population de référence qui est 2,3% (pour le seuil u-score < -2). * 25 Cet indice est déjà disponible dans la base de données de l'enquête MICS-2 * 26 Asselin L.M , 2002. Op cit. p.31. * 27 Sahn D.E, et Stifel D.C , 2003a et 2003b, Ki J. B, Faye B et Faye S.,2005 Op. cit.p.31. * 28 Le logiciel DAD (Duclos et al., 1999) sera utilisé pour le calcul de l'indice FGT et des différents indices d'inégalité tout comme lors de la construction des différentes courbes d'inégalité. * FGT (0) indice FGT lorsque á = 0 et ainsi de suite |
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