§2- Les services de l'administration judiciaire
L'intérêt supérieur de l'enfant commande
qu'il dispose d'une administration judiciaire distincte des adultes (B). Au nom
de ce même intérêt, il conviendrait de traiter les affaires
qui mettent l'enfant en conflit avec la communauté dans les structures
de médiation (A) avant d'arriver à la justice proprement dite.
A. Les structures de médiation pour enfant
La médiation a pour objet la facilitation, la
circulation de l'information entre les personnes en conflit. C'est le seul
moyen assisté par un tiers qui vise la liberté de décision
des protagonistes d'un conflit.
Le plus souvent la médiation est confondue avec la
conciliation qui peut conduire à des propositions de solutions. La
médiation fait partie des modes alternatifs de résolution des
conflits. Elle consiste dans l'accompagnement de la réflexion des
parties à un différend pour leur permettre de le résoudre
par eux-mêmes de manière pacifique, sans soumission ni contrainte.
Elle implique l'intervention d'un tiers, neutre, impartial et
indépendant, le médiateur, lequel est un intermédiaire
dans les relations.
Elle reste distincte de la négociation qui suppose un
parti pris du négociateur qui représente les
intérêts d'une partie. Elle se différencie aussi de
l'arbitrage qui fait intervenir un arbitre qui rend une décision qui
s'impose aux parties.
L'existence d'une instance de médiation pour enfant
permet de faire participer ceux-ci à la recherche de solutions aux
conflits qui les concernent. Elle signifierait la reconnaissance des
compétences des enfants pour pouvoir résoudre les conflits, et
partant de là, permettre la prise en compte de leur opinion. Elle
favoriserait aussi la responsabilisation de l'enfant. L'existence d'une
structure de médiation dans les conflits qui peuvent survenir entre les
parents d'un côté, et de l'autre les lois de la République,
pourrait contribuer à privilégier les intérêts de
l'enfant.
Mais malheureusement, il n'existe pas au Tchad de structure de
médiation institutionnalisée. Par ailleurs, les structures de
médiation traditionnelles qui existent ne peuvent aller dans le sens de
l'intérêt de l'enfant en considération du regard que porte
la société traditionnelle sur l'enfant, comme il ressort de
l'analyse que nous avons fait dans la partie précédente. Si la
médiation connaît des heures glorieuses pour les enfants sous
d'autres cieux, elle ne l'est pas encore pour l'enfant tchadien. Dès
lors la question de l'administration de la justice pour enfant se pose.
B. L'administration judiciaire
Le statut particulier de l'enfant impose que, lorsqu'il est en
conflit avec la loi, son cas connaisse une procédure distincte de
l'appareil judiciaire en général, et qu'il soit traité en
prenant en considération son intérêt supérieur.
Cette considération a trouvé un écho
favorable au niveau du pouvoir public tchadien qui, par la loi
n°007/PR/99, institue les tribunaux pour mineurs.
Cependant, la traduction concrète, en termes de
structures devant accueillir les tribunaux, connaît d'énormes
difficultés.
En effet, depuis 1999, date de la prise de loi concernant les
tribunaux pour mineurs, jusqu'à aujourd'hui, une partie du territoire
tchadien ne dispose pas du cadre judiciaire propre aux enfants. Ce type de
tribunal n'existe de manière visible qu'à N'djamena, la capitale.
Mais même là, cette structure n'existe que dans une petite
pièce au sein des structures du Tribunal de Grande Instance. Par
ailleurs, dans les régions et départements, on note une absence
totale, comme si la bonne volonté de l'Etat tchadien de respecter ses
obligations internationales se limitait à la capitale. Les enfants des
contrées lointaines sont-ils des sous enfants ? Ne sont-ils pas des
citoyens comme tous les autres enfants ? Cette situation laisse penser
qu'il s'agit en fait de « tribunaux de façade ».
Même si ces tribunaux doivent être logés au sein des
bâtiments abritant l'appareil judiciaire de manière
général, il faudrait leur accorder un espace assez grand pour un
fonctionnement efficient.
Outre cette question du cadre institutionnel, il ne faut pas
non plus occulter les dotations humaines et budgétaires qui constituent
une entrave à la protection effective des droits de l'enfant.
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