Paragraphe 2 : Les biotechnologies agricoles, une
révolution doublement
Verte
Le terme de révolution verte désigne le bond
technologique réalisé en agriculture au cours de la
période allant de 1944 à 1970, à la suite de
progrès scientifiques de l'entre deux guerres. Elle a été
possible par la mise au point de nouvelles variétés de cultures
à haut rendement, notamment de céréales (blé et
riz), grâce à la sélection variétale. L'utilisation
des engrais chimiques et des produits phytosanitaires a fortement
contribué au succès de cette agriculture, lequel succès
s'est traduit par un accroissement soutenu de la productivité agricole.
La révolution verte a permis d'éviter des famines
catastrophiques, qui seraient la conséquence naturelle de l'augmentation
sans précédent de la population mondiale depuis 1950. Le Mexique,
premier pays à s'engager dans cette voie en 1949 est ainsi passé
entre 1956 et 1964 d'un statut d'importateur net de blé pour la
moitié de sa consommation à un statut d'autosuffisance,
permettant l'exportation de cinq cent mille tonnes par an. La révolution
verte a connu ses plus grands succès en Inde et au Pakistan où
l'on estime qu'elle a permis de sauver un milliard de personnes de la faim.
Pour aller plus loin sur la révolution verte, consulter Wikipedia,
l'encyclopédie libre sur le site http://fr.wikipedia.org). Pourtant
force est de constater que la révolution verte qui eut un écho
favorable à une certaine époque se trouve dépassée
devant les défis sans précédent auxquels est
confrontée l'agriculture au 21ème siècle. En
effet, au cours des trente années à venir, nos ressources d'une
fragilité croissante devront nourrir deux milliards de gens de plus.
Pour aider à assurer la sécurité alimentaire, aux huit
milliards d'habitants escomptés en 2025, l'Organisation des Nations pour
l'Alimentation et l'Agriculture estime que le monde a besoin d'une autre
révolution verte comme l'auraient demandé de nombreux
délégués au sommet de l'alimentation en 1996. S'il est
vrai qu'en doublant ou en triplant les rendements, elle a accordé aux
pays en développement un répit qui leur permet de commencer
à s'attaquer au problème de leur rapide croissance
démographique, on doit tout de même avouer avec Normand BORLAUG
que la révolution verte n'a été qu'un «
succès limité ». En effet, si la
première révolution verte a fait augmenter la productivité
des trois principales cultures alimentaires de base que sont le riz, le
blé et le maïs, Entre 1950 et 1990, les rendements
céréaliers ont augmenté de près de 1,06 tonnes
à 2,52 une deuxième révolution verte devrait aussi
permettre de relever la productivité d'autres cultures vivrières
importantes, comme le sorgho, le millet, et le manioc, aliments produits et
surtout consommés par les pauvres. Un changement de paradigme est donc
prôné pour apporter un souffle nouveau à l'agriculture
mondiale. Les apports que l'on anticipe de l'emploi du génie
génétique sont notables. L'augmentation de la production agricole
sur les quarante dernières années serait davantage due à
une amélioration du rendement à l'hectare qu'à un
accroissement des superficies. De ce point de vue les biotechnologies modernes
ne manquent pas d'arguments en leur faveur. En effet, la
transgénèse en tant que science du vivant permet
d'accroître les connaissances de base du fonctionnement cellulaire, du
déterminisme génétique, des voies métaboliques et
de leur régulation dans le règne végétal. Les
retombées pratiques pour l'agriculture pourraient être
considérables. Déjà, comme le pense Didier SPIRE, des
solutions originales et d'utilisation simple ont été
apportées pour répondre aux problèmes et
difficultés rencontrées avec certaines productions. Par exemple
les biotechnologies ont permis grâce à la description plus
précise du polymorphisme intra variétal, de mieux gérer et
conserver les espèces. Le génie génétique a
sûrement l'avantage de franchir la barrière des espèces. En
effet de nombreux végétaux cultivés ont des
difficultés d'hybridation. La transgénèse permet de
s'affranchir de ces barrières de stérilité et
d'incompatibilité qui posent problème à
l'amélioration des cultures. Les nouvelles cultures permettent aussi
d'introduire des gènes nouveaux intéressant le rendement,
à travers des caractères de résistance ou de
tolérance. Par exemple, enrichie de quelques gènes
prélevés sur la bactérie bacillus
thuringiensis, une plante peut fort bien devenir toxique pour les
insectes ravageurs. En ce sens, les biotechnologies modernes peuvent aider les
fermiers à réduire leur dépendance vis-à-vis des
insecticides et des herbicides. On a souvent reproché à
l'agriculture conventionnelle l'utilisation excessive d'intrants chimiques, ce
qui a des répercussions néfastes certaines sur la
sécurité alimentaire. L'agriculture biotechnologique comblerait
cette lacune par la mise sur pied de cultures peu exigeantes en produits
chimiques et phytosanitaires.
Avec le génie génétique, il serait
désormais possible de transférer les gènes
intéressants sans redistribuer les autres. La précision est
considérablement plus grande qu'avec la génétique
classique ou naturelle, le transfert du matériel génétique
se fait au hasard. Considérés à bien des égards
comme une percée technique, les OGM ouvrent des perspectives immenses.
Aujourd'hui, grâce à la transgénèse, on peut
ralentir le pourrissement de certains fruits et légumes (tomates
à mûrissement retardé) ; lutter contre les herbicides
(soja) ; éviter certaines maladies aux plantes cultivées
(maïs résistant aux virus et à la maladie) ;
s'affranchir des contraintes climatiques ou géographiques avec la
culture de plantes résistant à la sécheresse, à la
salinité ou au froid (blé)... Alain WEIL fait remarquer que l'un
des avantages principaux des OGM serait de faire pousser des plantes sur des
terrains qui ne sont pas pour l'instant propices à l'agriculture,
à cause de la salinité ou de la toxicité des sols...Les
biotechnologies agricoles modernes permettront selon lui, aux agriculteurs
d'envisager des plantes plus rustiques, qui résistent mieux aux
agressions de parasites ou de virus, à la sécheresse ou au
froid54.
En théorie, l'éventail des possibilités
est sans limite et certaines équipes consacrent aujourd'hui des moyens
importants à des projets aussi étonnants, par exemple, que la
création de variété de bananes dont la consommation
immuniserait contre l'hépatite ou le choléra ou la fabrication de
vaccins qui protègent les animaux dans la nature contre la rage. Comme
le pense le chercheur, «Les biotechnologies modernes peuvent apporter
aux pays du sud des solutions originales, et d'utilisation simple à des
problèmes qui leur sont plus spécifiques: variétés
de plantes rustiques à haut rendement, peu exigeants en intrants,
tolérantes à la sécheresse, au froid ou à la
salinité...». Elles permettraient aux paysans d'utiliser plus
efficacement des fertilisants, de disposer d'un temps de récolte
uniforme ouvrant la voie à de petites perspectives commerciales
grâce à la qualité de leurs produits.
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