En partant du postulat de l'importance de la création
des start-up dans le secteur des nouvelles technologies d'information et des
télécommunications en Tunisie ainsi que de la rareté des
recherches sur l'intention d'entreprendre des ingénieurs en nouvelles
technologies, ce travail a tenté, dans une démarche
hypothético-déductive, d'identifier quels sont les facteurs
environnementaux qui ont une influence sur l'intention de créer une
start-up. Cette question générale nous a conduit à:
- Tester un modèle conceptuel issu de la
littérature entrepreneuriale qui met en évidence l'interaction
entre l'intention entrepreneuriale et les facteurs de
l'environnement
socio-économiques,
- Déterminer la variable la plus déterminante dans
la formation de l'intention de créer,
- Cerner les déterminants contextuels pertinents dans la
formation de l'intention de créer une start-up en technologies,
- Rendre compte de l'impact de ces déterminants
environnementaux sur l'intention.
La partie théorique, a consisté dans un
chapitre introductif à mettre en évidence l'importance et les
atouts du secteurs des nouvelles technologies qui peuvent expliquer les
orientations entrepreneuriales vers la création des start-up en TIC (par
exemple le parc technologique d'El Ghazala) et à présenter
l'essaimage comme une politique d'encouragement à la création des
start-up pour les managers spécialisés dans les nouvelles
technologies.
Vu l'inexistence d'un véritable consensus dans la
délimitation et l'explication de certains phénomènes
entrepreneuriaux, le second chapitre de cette partie a essayé de
définir la création d'une start-up en TIC comme un
phénomène entrepreneurial selon la grille des
phénomènes entrepreneuriaux de Paturel (2005) et après
avoir évoqué les limites et les apports des différents
paradigmes de la discipline. Ensuite, nous avons essayé d'expliquer dans
ce chapitre le processus de création d'entreprise comme un processus
d'émergence organisationnelle ou l'intention occupe une place
déterminante.
Dans le cadre de troisième chapitre de cette partie,
nous avons essayé de présenter les fondements théoriques
de cette recherche en mettant en relief les différentes
modélisations théoriques qui essayent d'expliquer le
phénomène de l'intention entrepreneuriale avec les limites et les
apports de chacune.
De nature exploratoire, la partie empirique que nous avons
proposée construit et valide le modèle conceptuel de formation
des intentions de créer une start-up en nouvelles technologies par des
ingénieurs tunisiens. Elle offre une modélisation mettant en
oeuvre l'interaction entre les facteurs de l'environnement
socio-économique et l'intention d'entreprendre en TIC.
Dans le cadre du premier chapitre, un modèle
conceptuel de l'intention d'entreprendre en nouvelles technologies dans le cas
des ingénieurs tunisiens, un corps d'hypothèses de recherche,
l'instrument de collecte des données et les différents
critères d'évaluation de la qualité des instruments de
mesure et de l'adéquation des données aux résultats ont
été présentés.
Au niveau du deuxième chapitre, nous avons
vérifié la fiabilité et la validité de nos
échelles de mesure et nous avons validé deux de nos
hypothèses mettant en relief l'importance des variables de la
faisabilité perçue et de la désirabilité
perçue dans la formation de l'intention d'entreprendre.
Et finalement, dans le cadre du troisième chapitre,
nous avons spécifié les déterminants environnementaux
sous-jacents à la faisabilité perçue et à la
perception de la désirabilité et déterminé le poids
sur les variables explicatives (désirabilité et
faisabilité) et sur l'intention.
Les principaux apports de la recherche
Notre recherche n'est qu'une simple tentative de
connaître les déterminants environnementaux de l'intention de
créer une start-up en TIC dans le contexte des ingénieurs
tunisiens. Nous pensons cependant avoir apporté quelques implications
théoriques et managériales.
Les implications théoriques
- Cette recherche a permis de positionner la création
d'une start-up en TIC comme un phénomène entrepreneurial selon la
grille des phénomènes entrepreneuriaux de Paturel (2005).
- Vu la rareté des recherches sur l'intention
d'entreprendre en Tunisie, notre étude nous a permis de tester et de
valider dans le cas des ingénieurs tunisiens en TIC, le modèle de
formation de l'événement entrepreneurial de Shapero tel que
modifié par Krueger.
- Une autre contribution a consisté à
étudier les déterminants environnementaux de la
désirabilité et de la faisabilité et à
déterminer les facteurs sous-jacents à ces deux concepts. La
faisabilité perçue est expliquée par les systèmes
d'aide généraux et le facteur sous-jacent à la perception
de la désirabilité est l'entourage privé.
- Le dernier apport est de mettre en evidence l'impact de
l'environnement socio- économique sur l'intention d'entreprendre
à travers ces variables explicatives (la désirabilité et
la faisabilité perçues).
Les implications managériales
Les intérêts pratiques de cette recherche se
traduisent principalement en termes de sensibilisation des ingénieurs
opérants dans le secteur des TIC pour la création de start-up.
Cette orientation s'explique davantage parce qu'ils se sentent capable de le
faire plutôt que par l'attrait pour l'acte entrepreneuriale. Ce
résultat légitime les incitations et les politiques
gouvernementales en matière de création de la start-up en
TIC.
- Dans notre contexte pour développer la
création des entreprises des ingénieurs spécialisés
en TIC, les institutions de la Société ( pouvoir public ,
universités , O.N.G , secteur privé etc....) devraient en
priorité renforcer les mécanismes ou les outils
nécessaires a l'encadrement et au soutien de l'initiative privé
en ciblant cette population favorable à l'entrepreneuriat
(plus
de la moitié des ingénieurs tunisiens
interrogés dans le cadre de cette étude (59 ,6%) déclarent
q'ils ont l'intention de se lancer en affaire).
-Par ailleurs, plus des 2/3 des ingénieurs
(63,7 %) ignorent l'existence de la loi n°2005- 56 relative à
l'essaimage économique, seul 6,2 % entre eux déclarent être
informés de son contenu. Il faut donc mener des campagnes
informationnelles auprès des ingénieurs opérant dans les
sociétés publics ou privées en montrant que la
création d'entreprises est pour eux, un bon moyen de valorisation de
leur savoir-faire et en les renseignant sur les incitations offertes par la
dite loi, les avantages fiscaux, administratifs et sociaux accordés aux
entrepreneurs et sur l'infrastructure d'investissement disponible en Tunisie
dans le domaine des TIC.
- Nos travaux devraient également inciter les
sociétés spécialisées en TIC à créer
des cellules d'essaimage qui encouragent les ingénieurs dotés
d'idées innovantes à les concrétiser dans des projets de
création de start-up et soutenir les dits projets. Ces cellules peuvent
être créées en favorisant certains avantages fiscaux et
sociaux pour ces sociétés.
- Enfin, nos conclusions suggèrent qu'il serait
pertinent de mener des programmes de formation entrepreneuriale mis en oeuvre
par la Société civile (par exemple ATDGE, ordre des
ingénieurs tunisiens, UTICA, chambres de commerce et d'industrie ect...)
auprès des ingénieurs en mettant l'accent sur les incitations
étatiques disponibles et sur les « Success Stories » de
certains ingénieurs qui ont réussi à monter leur
start-up
Les limites de la recherche
Néanmoins, notre travail de recherche présente un
certain nombre de limites qu'il est important de mentionner .Celles-ci sont
à la fois méthodologiques et conceptuelles.
Les limites méthodologiques
Trois limites nous semblent pouvoir être
mentionnées :
- La première limitation de notre travail est
liée à la structure de notre échantillon. Celui-ci est
composé de 146 ingénieurs, tous spécialisés dans le
secteur des TIC et issus des différentes régions de la Tunisie.
Il n'est donc pas représentatif de l'ensemble des ingénieurs
tunisiens opérants dans tous les secteurs.
- Les représentations du chercheur concernant les
variables étudiées (et définies par les modalités
de réponses proposées dans le questionnaire) constituent une
limite, dans la mesure où elles interviennent dans les différents
choix effectués tout au long de la recherche, et laissent quelques
traces de subjectivité.
- Ce travail est uniquement basé sur une recherche
quantitative des déterminants environnementaux de l'intention
d'entreprendre. L'investigation pourrait être approfondies si nous avions
recours à une étude qualitative a fin de donner une
interprétation plus détaillée des résultas
obtenus.
Les limites conceptuelles
- Une première limite réside dans le fait que
certains aspects sociologiques, psychologiques (la propension a l'action) et
culturels (l'impact de la religion ou de l'appartenance géographique)
traités théoriquement comme variables déterminantes dans
l'explication de l'intention n'ont pas pu être complètement
approchés empiriquement. Cette limite est due d'une part à la
nature des données recherchées (celles-ci peuvent être
perçues comme étant personnelles, voire secrètes pour les
ingénieurs contactés), et d'autre part à la non
disponibilité des ingénieurs contactés lors de
l'enquête préliminaire à répondre à un
questionnaire très long.
- La prise en compte des variables relatives à
l'environnement socio-économique en Tunisie est certes importante dans
la détermination de l'intention d'entreprendre surtout dans le contexte
du secteur des nouvelles technologies malgré les limites de l'approche
contextuelle évoquée par la théorie entrepreneuriale mais
on peut légitimement penser que l'intention d'entreprendre est
également expliqué par certaines variables individuelles et / ou
organisationnelles.
- Enfin, nous n'avons pas distingué les perceptions
entre les ingénieurs intentionnels et non intentionnels. Une comparaison
des deux profils pourrait enrichir notre recherche en permettant la
détermination des variables environnementales qui freinent ou augmentent
l'intention de créer une start-up.
Les perspectives de la recherche
- Comme nous venons de le suggérer, le prolongement
principal de cette étude (qui nous tient à coeur) est une
comparaison de perception de la désirabilité et de la
faisabilité entre les ingénieurs intentionnels et non
intentionnels par le test de Student.
- Une autre perspective consisterait à tester le
modèle de l'événement entrepreneurial de Shapero en
mettant en relief l'impact des variables contextuelles ainsi qu'individuelles
sur l'intention de ces ingénieurs de créer une start-up en
TIC.
- Le modèle de Shapero pourrait aussi être
utilisé pour d'autres contextes ou échantillons (étudier
l'intention chez les étudiants en écoles d'ingénieurs ou
mener une étude sur l'ensemble des ingénieurs tunisiens en
coordination avec l'ordre des ingénieurs tunisiens).
- Enfin la conduite d'investigations sur le passage à
l'acte entrepreneurial des ingénieurs intentionnels au moyen d'une
étude longitudinale nous semble aussi pertinente.
Toutes ces possibilités constituent des voies de
recherches susceptibles de compléter et d'étendre le travail que
nous avons initié.