Envoyé Spécial : une approche de l'environnement à la télévision française (1990-2000).( Télécharger le fichier original )par Yannick Sellier Université Paris 1 Panthéon Sorbonne - Master 2 Histoire et Audiovisuel 2007 |
b- Les exigences d'un service public rénové.Toujours dans son rapport sur L'avenir de la télévision publique, remis en septembre 1993 au ministre de la Communication, Jacques Campet écrit que le programme d'une chaîne doit savoir offrir les repères essentiels d'une histoire, d'une culture, d'un savoir vivre. Il précise encore que l'indépendance relative du « service public » à l'égard de l'audience doit favoriser l'innovation, le risque, la recherche. Cet ensemble de recommandation doit à terme apporter au téléspectateur, à la fois citoyen et consommateur20(*), des moyens d'information, d'orientation et d'intelligence21(*). Si Jacques Campet peut émettre, en 1993, de tels avis, c'est que la commission de réflexion qu'il préside, peut aussi s'appuyer sur des programmes de référence passés et contemporains. Parmi lesquels figure Envoyé spécial ; en témoignent les commentaires qui furent faits par la suite à son égard : « Si peu de concession avec autant d'audience fait l'honneur du service public ... et de téléspectateurs tenus pour intelligents. »22(*) « un public lui-même informé et qui attend d'une télévision d'Etat qu'elle fasse ce qu'on attend d'elle et qu'on n'attend pas toujours de la concurrence privée. »23(*) Pour le comprendre, revenons en 1989. Au mois d'octobre de cette même année, Philippe Guilhaume, le nouveau président des deux chaînes publiques (Antenne 2 et FR 3), réunit les cadres de la rédaction à Dijon avec pour objectif de différencier leur programmation de celle des chaînes privées.24(*) Sa politique se démarque d'emblée de celle du précédent directeur d'Antenne 2, Claude Contamine, qui préconisait au contraire de s'inspirer directement de la programmation des chaînes privées. Ce dernier n'était pourtant pas parvenu à résoudre les difficultés que le secteur public accumulait depuis 1986, tant en terme d'image qu'en terme financier. Et c'est avec la même volonté d'impulser une dynamique salvatrice à la chaîne publique généraliste, que les cadres de la rédaction proposent, lors de cette réunion, de mettre en place « un magazine d'information à 20h30 ». En décembre, Jean-Michel Gaillard, directeur général d'Antenne 2, confie à Paul Nahon et Bernard Benyamin la gestion et la responsabilité du magazine qui sera intitulé Envoyé spécial. Cet intitulé se rapporte aux journalistes de la rédaction en poste à l'étranger que l'on désigne alors comme des « envoyés spéciaux ». En complément du journal télévisé plutôt axé sur l'actualité nationale, le magazine a pour vocation de traiter plus spécifiquement de l'actualité internationale et de s'appuyer en terme d'effectif sur ces « envoyés spéciaux ». Cependant, dès la préparation de la première émission, l'effectif est élargi à des reporters et des cinéastes, de même que l'ambition du magazine en charge d' « expliquer au téléspectateur le monde dans lequel il vit »25(*). La pertinence de la programmation d'un tel magazine sur une chaîne publique généraliste va donc s'affirmer assez vite. Et ce d'autant plus que la France s'engage dans un processus accru d'internationalisation des échanges et des prises de décisions politiques (Traité de Maastricht et Conférence de Rio en 1992, création de l'Organisation Mondiale du Commerce en 1994...) pour lesquels l'ensemble de population française n'est pas encore nécessairement préparé. * 20 Ce deuxième élément, explicitement cité, est particulièrement intéressant à propos du traitement télévisuel de la gestion de l'environnement. * 21 Campet Jacques (commission de réflexion présidée par), « L'avenir de la télévision publique », Paris, Rapport au ministre de la Communication, Septembre 1993, p. 16 * 22 Cornu Francis, « Envoyé Spécial, l'info en vedette », Le Monde Télévision-Radio-Multimédia, Paris, 22-23 juin 1997, cité dans Dossiers de l'Audiovisuel n°76, Paris, Ina/La documentation Française, 1997, pp.. 39-40 * 23 Auteur Inconnu, « Envoyé Spécial, La 200e »,Télérama, n° 2351, Paris, 1er février 1995, p. 119 * 24 Follea Laurence, « Jeudi 18 janvier Envoyé spécial : A2, 20h35 La rédaction d'A2 mobilisée », Le Monde, Paris, 15 juin 1990. * 25 Cf. notre entretien avec Paul Nahon et Bernard Benyamin en annexe. |
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