8. PRODUCTEURS ET INNOVATIONS AGRICOLES COTONNIERES
Dans ce chapitre, nous aborderons les rôles de chaque
catégorie d'acteurs (recherche, vulgarisation et paysannat) dans la
génération des technologies agricoles. Nous nous baserons sur la
Lutte Etagée Ciblée (LEC), nouvelle technologie de contrôle
des ravageurs, actuellement en vulgarisation dans les milieux cotonniers.
8.1 Une forme de IPM dans le contrôle des ravageurs
au Bénin: la Lutte Etagée Ciblée
L'augmentation de la production nationale en coton (de 272.371
tonnes en 1993 à près de 400.000 tonnes en 2000 (OBEPAB, 2002))
rythme également avec le niveau de consommation de pesticides ( de
1.972.764 litres en 1993 à 2.314.127 litres en l'an 2000 (OBEPAB, op
cit)). L'utilisation de pesticides dans la production cotonnière
présente de sérieux risques aussi bien pour les producteurs que
pour l'environnement, ce qui impose la recherche de méthodes
alternatives de contrôle des ravageurs. D'où l'initiative de la
Lutte Etagée Ciblée expérimentée au Bénin
depuis 1988.
La Lutte Etagée Ciblée (LEC), telle qu'elle est
pratiquée au Bénin, constitue une méthode de
contrôle des ravageurs qui consiste à choisir et à
appliquer, si nécessaire suivant le calendrier habituel de traitement,
une ou plusieurs matières actives en concentré emultionnable
selon le degré d'infestation du champ observé.
> Avantages de la LEC
La technologie présente de nombreux avantages à
savoir :
Selon la recherche, la technologie rend les producteurs plus
aptes à reconnaître les ravageurs avec leurs dégâts,
de même que les types de produits avec les doses à appliquer selon
l'intensité des infestations. En concentrant plusieurs matières
actives, la LEC permet de faire efficacement face à la résistance
observée chez certains ravageurs dont le cas le plus frappant du
H. amigera dans les zones de forte production.
Du fait qu'elle soit appliquée sur seuil, la
technologie permet de limiter les nombreux dommages (intoxication, pollution)
causés aux producteurs et à l'environnement au cours des
traitements phytosanitaires.
Pour les producteurs, l'avantage la plus en vue au niveau de
cette technologie reste la réduction des coûts de traitement, ce
qui améliore les recettes de production en fin de campagne. Les
traitements LEC coûtent environ 24.000F contre 53.000F pour les
traitements classiques. Les producteurs manifestent un intérêt
à la technologie, non pas à cause de son
caractère de protection (des producteurs et de
l'environnement), mais plutôt à la réduction des charges de
production.
> Contraintes de la LEC
A côté de ces multiples avantages, la technologie
demande plus d'efforts aux producteurs. Elle impose l'obligation d'aller
observer les ravageurs au champ, la veille ou l'avant-veille du traitement afin
d'évaluer la charge parasitaire. Pour des grandes exploitations, il est
souvent difficile aux paysans de faire ces observations, ce qui revient
à compter les insectes sur 400 à 500 plants pour les
exploitations de 10 à 12,5 Ha.
Dans le même temps, les paysans-observateurs
formés pour la tâche sont pris en charge par les producteurs (
à raison de 250F par Ha traité) pour leur prestation. Ces
diverses contraintes limitent l'adoption du paquet au niveau des paysans
(observation des champs et traitement avec les produits chimiques
recommandés pour la LEC).
Tableau 7: Pratique de la LEC dans les milieux
d'étude.
Paramètres
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Observation + produits LEC
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Produits LEC seulement
|
Observation traditionnelle + produits LEC
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Suanin
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3/15 (20%)
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5/15 (33%)
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7/15 (47%)
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Sakarou
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1/12 (08%)
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6/12 (50%)
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5/12 (42%)
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Dèbou
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2/8 (25%)
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4/8 (50%)
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2/8 (25%)
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Kori
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2/11 (18%)
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5/11 (45%)
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4/11 (37%)
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TOTAL
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17%
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43%
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40%
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Source: Enquête N'Dali, 2004
L'analyse du tableau 6 montre que très peu de
producteurs (17% de l'échantillon) pratiquent l'observation telle
qu'exigée par l'approche LEC. La principale raison évoquée
par les paysans pour justifier la «non-observation » des plants avant
traitement, suivant la méthodologie de la LEC, est la contrainte temps
qu'impose cette opération. En effet, pour 1 ha, il faut observer 40
plants pour évaluer le degré d'infestation et juger de la
nécessité de traiter ou non le champ.
La pratique traditionnelle consiste à observer les
plants sous ombrage (plants situés sous les arbres laissés dans
les champs) et à apprécier leur état par rapport à
ceux exposés au soleil. Si un grand nombre des plants situés
à l'ombre (environ 45%) présentent un état de
flétrissement par rapport à ceux exposés au soleil, la
pression parasitaire est forte et le champ devra être traité.
Cette pratique traditionnelle permet aux paysans de gagner du temps.
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