5.3. L'INTERVENTION DE L'ETAT
Elle a influencé les pratiques foncières locales
par le biais de la RAF, des politiques aménagements du territoire et de
reboisement.
5.3.1. L'influence des interprétations locales de
la RAF
Si la RAF a été promulgué pour assurer
la sécurité des exploitants agricoles et veiller à une
gestion rationnelle des ressources naturelles, elle est loin d'avoir atteint
ses objectifs dans les zones rurales, notamment à
Dèrègouè. Les enquêtes de terrain ont en effet
révélé que les textes qui la régissent sont
méconnus des paysans. Par ailleurs, même si ces derniers sont au
courant de l'existence de ces textes, leurs interprétations et
appréciations diffèrent d'un acteur à un autre, notamment
des migrants aux autochtones.
Les textes de la RAF qui stipulent que « la terre
appartient à celui qui la cultive ou celui qui la met en valeur »
et que « l'Etat propriétaire de la DFN » ainsi que « la
non- reconnaissance du droit coutumier » influencent les perceptions que
les paysans ont de la terre. Certains migrants, en s'appuyant sur la cette
législation foncière, adoptent des pratiques à l'encontre
des interdits dictés par les autochtones sous prétexte que
« la terre appartient à tout le monde ». Ils
empiètent sur les terres qui ne leur ont pas été
attribuées ou plantent des arbres sans l'accord des chefs de terre.
Cette situation crée du côté des propriétaires
terriens coutumiers des sentiments de crainte pour ce qui concerne l'avenir de
leur emprise sur les terres. Comme eux-mêmes le disent, de nombreux
migrants ne respectent plus les principes coutumiers ; et lorsqu'ils veulent
leur sanctionner, ils sont convoqués auprès des autorités
administratives.
Le sentiment d'insécurité foncière que
suscite la RAF est surtout vécu par les propriétaires terriens
qui les perçoivent comme une sorte de remise en cause de leur
autorité en matière de la gestion foncière. En effet, de
nombreux migrants qui ont acquis des parcelles
de culture par l'entremise de ces propriétaires
terriens, se basent sur la RAF pour s'opposer à certains principes
coutumiers en matière de gestion foncière : plantation d'arbres,
attribution de parcelles à une tierce personne sans accord des chefs de
terre. Pour ces migrants, la modernité devient de plus en plus une
garantie de la sécurité foncière au détriment de la
coutume.
Si l'avènement de la législation foncière
moderne a fragilisé le pouvoir coutumier, l'approche des politiques
d'aménagement du territoire ne l'a pas consolidé non plus.
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