2.- Evaluation des effets des politiques sur la production
laitière :
a) Au niveau de la ferme :
A ce niveau d'analyse, il est utile de fixer au départ
la réalité économique : le lait cru est
cédé au niveau de la ferme au prix calculé sur la base de
l'échantillon d'exploitations retenues à 27, 59 DA le litre plus
une prime moyenne de 6,5 DA le litre calculée, (voir calcul en annexe).
Le prix de revient est calculé à partir de
l'échantillon des exploitations retenues par la méthode
d'Oscarsson (1971) tel que :
Prix de revient du litre de lait = (Total des charges -
Produits annexes) / Quantité de lait produite par l'exploitation. Il est
de 24,16 DA le litre.
Cette situation confirme que le soutien n'a pour but que de
compenser les incohérences et insuffisances de disponibilités des
intrants, supportées par le producteur. Ainsi, on peut qualifier le
soutien de prime compensatoire.
On peut observer au niveau des exploitations n° 3, 4 et
13 que le coût est négatif ce qui signifie que les produits
annexes qui ne sont autres que la vente des veaux, du fumier, etc..., couvrent
la totalité des charges d'élevage dont l'activité
principale est le lait.
Par contre pour les exploitations n° 10, 17, 19 et 20, le
prix de revient est très élevé ce qui signifie que les
charges d'exploitation de l'élevage sont très
élevées par rapport aux produits annexes et à la
quantité de lait produite. La cause principale de cette situation est,
notamment pour les exploitations n° 10 et 17, la faiblesse du nombre de
têtes de l'exploitation (5 et 9 VL respectivement). Pour les
exploitations 19 et 20, il s'agit d'insuffisance dans la gestion sanitaire du
cheptel.
Tableau N°37 : Prix de
revient du litre de lait (Exploitations de l'échantillon)
2003/2004
(Unité : Dinar Algérien (DA)
EXP
|
Charges totales d'élevage
|
production annexe
|
production laitière en litres
|
Coût du litre lait
|
EXP01
|
17 966 326
|
10 172 215
|
259 706
|
30, 01
|
EXP02
|
1 791 150
|
1 040 000
|
25 550
|
29, 40
|
EXP03
|
1 973 930
|
2 180 000
|
40 280
|
-5, 12
|
EXP04
|
1 895 500
|
2 780 000
|
23 475
|
-37, 68
|
EXP05
|
1 901 550
|
580 000
|
55 825
|
23 ,67
|
EXP06
|
2 400 100
|
900 000
|
43 300
|
34, 64
|
EXP07
|
2 661 400
|
2 200 000
|
36 725
|
12, 56
|
EXP08
|
3 861 340
|
1 280 000
|
94 170
|
27, 41
|
EXP09
|
1 448 840
|
1 138 000
|
40 550
|
7, 67
|
EXP10
|
1 479 925
|
130 000
|
18 000
|
75, 00
|
EXP11
|
3 225 700
|
2 400 000
|
51350
|
16, 08
|
EXP12
|
3 477 500
|
1 840 000
|
91 175
|
17, 96
|
EXP13
|
1 744 000
|
2 040 000
|
36 610
|
-8, 09
|
EXP14
|
1 313 100
|
488 000
|
60 750
|
13,58
|
EXP15
|
1 277 627
|
140 000
|
26 325
|
43, 21
|
EXP16
|
1 726 800
|
730 000
|
35 420
|
28, 14
|
EXP17
|
1 994 770
|
230 000
|
28 490
|
61, 94
|
EXP18
|
2 195 200
|
1 000 000
|
67 825
|
17, 62
|
EXP19
|
3 782 800
|
1 520 000
|
61 300
|
36, 91
|
EXP20
|
2 872 100
|
372 000
|
55 180
|
45, 31
|
MOYENNE
|
3 049 483
|
1 658 010,77
|
57 600,3
|
24, 16
|
Ces résultats mettent en évidence la
réalité de l'élevage en Algérie : une faible
maîtrise des techniques d'élevage (OFLIVE 2001) conduisant
à des dépenses de plus en plus importantes, que les ventes de
produits sont parfois incapables de couvrir.
Pour procéder à l'analyse des effets des
politiques laitières au niveau de l'exploitation, il a été
retenu comme prix financier, le prix moyen de cession calculé à
partir de notre échantillon et comme prix économique, le prix
établi à partir d'une moyenne des prix à la ferme de
quelques pays européens comme référence (Hollande,
Allemagne, France, Portugal). Ce prix économique est obtenu aux termes
d'un taux de change retenu pour les besoins de l'analyse à 1 Euro = 100
DA(1 Euro=1.32 $, 1$=75 DA), et de la prise en compte des aides de l'Etat dans
les pays européens comme incluses dans le prix de
référence. (Veerman C.)
Tableau N°38 : Analyse des coûts du
lait cru : Base Exploitations de l'échantillon.
Unité : DA/Litre
Rubrique
|
Structure
|
Prix financier
|
Prix économique
|
Transfert
|
Produits
|
Prix du litre de lait
Aide par litre de lait
|
27.59
6.50
|
32,00
-
|
-4.41
6.50
|
Sous total 1
Prix Produit
|
|
34,09
|
32,00
|
2,09
|
Biens échangeables (BE)
|
Energie
Produits vétérinaires
Charges alimentaires
Charges diverses
Produits d'entretien
|
1.88
0.46
10,00
0.34
0.15
|
2.17
0.52
11.6
0.39
0.17
|
-0.29
-0.06
-1.60
-0.05
-0.02
|
Sous total 2
(BE)
|
|
12,83
|
14,85
|
-2,02
|
Biens non échangeables (BNE)
|
Terre
Main d'oeuvre
Maintenance
Amortissement
|
0.54
8.17
0.69
1.43
|
0.63
9.48
0.69
1.43
|
-0.09
-1.31
0
0
|
Ss total 3
(BNE)
|
|
10,83
|
12,23
|
-1,40
|
Sous total 4 =(BE+BNE)
|
23,66
|
27.08
|
-2.93
|
Autres charges (5)
|
0,49
|
-
|
-
|
Profit = 1 - ( 4 + 5)
|
9.94
|
4.92
|
5.02
|
A partir de ce tableau de l'analyse des coûts, on peut
déduire que le prix financier du lait cru sur le marché local est
supérieur au prix économique sur le marché international
d'environ 7%. Néanmoins les biens échangeables (BE) sur le
marché local ont un coût inférieur à celui du
marché international de 15% ainsi que les biens non échangeables
(BNE) de 13%.
En d'autres termes, les dépenses relatives aux
consommations d'énergie, de l'alimentation du cheptel et son entretien
et les coûts liés à la propriété de la terre,
la main d'oeuvre, la maintenance des infrastructures et leurs amortissements
sont moins élevés localement que sur le marché
international.
Cet état de fait conduit à un profit
supérieur localement pour la production du lait cru que sur le
marché international. Le profit moyen réalisé sur le
marché local est d'environ 30% par contre sur le marché
international le profit moyen n'est que de 15% environ
Tableau N°39 : Matrice d'analyse de la
politique du lait cru.
Unité : DA/Litre
Rubrique
|
Recettes
|
BE
|
BNE
|
Impôts, taxes, assurances
|
profit
|
PF
|
34,09
|
12,83
|
10,83
|
0,49
|
9,94
|
PE
|
32,00
|
14,85
|
12,23
|
inclus
|
4,92
|
Transferts
|
2,09
|
-2,02
|
-1,40
|
0,49
|
5,02
|
CPN
|
1,06
|
La détermination du coefficient de protection nominale
qui est le rapport entre le prix du marché local et celui du
marché international permet de connaître le niveau de
l'intervention gouvernementale. Lorsque ce coefficient est supérieur
à 1, il indique que le producteur de lait cru réalise un profit
supérieur à celui qu'il pourrait réaliser en l'absence de
l'intervention gouvernementale. Dans le cas présent l'effet net de
l'intervention est une protection positive. En réalité c'est plus
une compensation pour résorber le déficit engendré par le
prix de vente administré durant de longues années et la lenteur
de sa croissance.
En appliquant une marge bénéficiaire de 15%
(celle du marché international) au prix de revient du lait cru produit
localement (24,16 DA/litre) et sans l'aide de l'Etat, le prix du marché
local serait au même niveau que celui du marché international
lorsque l'on déduit les subventions aux producteurs des pays
européens (estimées à environ 10%). Ce prix que l'on
pourrait appeler un prix d'équilibre, est de 28, 26 DA/litre à la
porte de la ferme. Ce prix constitue une base de négociation non
négligeable lorsqu'il s'agira de faire partie d'une zone de libre
échange.
|
CPE
|
1,24
|
Le coefficient de protection effective (CPE) est nettement
positif et supérieur à 1, il montre que les coûts
d'utilisation des Biens Echangeables (intrants) locaux sont faibles par
rapport à ceux du marché international et qu'il existe une marge
d'amélioration importante. Plus ce rapport est important plus il indique
l'ampleur des marges de manoeuvre pour une grande efficience dans l'utilisation
des moyens de production locaux..
Il indique par ailleurs que le gain sur le litre de lait
produit localement est supérieur à celui obtenu sur le
marché international. Il n'en demeure pas moins que l'aide
gouvernementale a un effet réel, dans la mesure où sa suppression
conduit irrémédiablement à un gain nettement
inférieur à celui que l'on obtient sur le marché
international. Cette situation est principalement due à la faiblesse de
la production laitière par unité de mesure.
|
CRD
|
0.71
|
L'efficience de la filière production laitière
est faible, d'autant que l'utilisation des ressources domestiques n'est pas
optimisée, ce qui laisse une marge de manoeuvre qui peut
générer plus de profit. Par rapport au niveau économique
international, l'optimisation de la filière (0,71) se situe juste au
dessous des ¾ de 1 (qui est l'optimum) indiquant que les réserves
d'amélioration sont loin d'être épuisées.
Comparée à la situation locale, ce rapport implique que la
filière lait locale est fortement affectée sur le double plan de
son efficience interne (0,50) et de celle du niveau économique.
|
b) Au niveau de l'unité de
transformation :
A ce niveau d'analyse, il est utile de souligner que la
participation du lait cru local est très faible. Elle s'exprime sous
forme de rapport entre les volumes utilisés pour la satisfaction des
besoins à la consommation, sortie de la transformation.
Le prix réel de cession du lait pasteurisé,
sortie de l'usine est de 23, 35 DA / litre, il est à l'échelle
internationale l'équivalent de 35 DA / litre.
Au stade de la transformation, la matière
première est composée des produits en approvisionnement (poudre
de lait, MGLA) et de lait cru. L'ensemble Biens Echangeables (BE) est la somme
des coûts des produits relatifs à la matière
première utilisée, des produits nécessaires aux
opérations de conditionnement (emballage) et d'entretien de
l'unité de transformation (produits de nettoyage, etc.).
L'ensemble Biens Non Echangeables (BNE) est la somme des
coûts relatifs aux services, (réception, pasteurisation,
conditionnement), l'amortissement des équipements et la main d'oeuvre.
Tableau N°40 : Analyse des coûts du
lait en sachet de la laiterie de DBK.
Unité : DA/Litre
Rubrique
|
Prix en DA/L
|
Prix financier
|
Prix économique
|
Transfert
|
Produit
|
Prix de vente/litre
|
23.35
|
35
|
-11.65
|
BE
|
Matières premières (poudre lait, MGLA)
Lait cru
Emballage
Produits de nettoyage
Autres consommations
|
15.65
0.95
1.09
0.06
0.44
|
15.65
1.28
1.09
0.06
0.88
|
0
-0.33
0
0
-0.44
|
BNE
|
Services
Dotation / amortissement
Frais du personnel
|
0.15
0.43
1.88
|
0.55
0.43
2.88
|
-0.4
0
-1
|
Autres charges
|
Impôts et taxe
Frais financiers
|
1.93
0.01
|
-
-
|
1.93
0.01
|
BE+BNE + Autres charges
|
22.59
|
22.82
|
-0.23
|
Profits
|
0.76
|
12.18
|
-11.42
|
Tableau N°41 :
Matrice d'analyse de la politique du lait pasteurisé
conditionné en sachet
Unité : DA/Litre
Rubriques
|
Recette
|
BE
|
BNE
|
Impôt, taxes, assurances
|
Profit
|
PF
|
23.35
|
18.19
|
2.46
|
1.94
|
0.76
|
PE
|
35
|
18.96
|
3.86
|
-
|
12.18
|
Transfert
|
-11.65
|
-0.77
|
-1.4
|
1.94
|
-11.42
|
CPN
|
0.66
|
Le rapport entre le prix du marché local et celui du
niveau international est en défaveur de la transformation: il est
nettement inférieur à 1. Ceci indique que l'effet net de
l'intervention de l'Etat est une protection négative vis-à-vis du
producteur transformateur du lait pasteurisé et conditionné en
sachet. Ce producteur reçoit un prix inférieur à celui
qu'il recevrait dans une situation sans intervention gouvernementale. L'effet
de taxation à la production en faveur de la consommation pénalise
fortement la transformation et le conditionnement Cette pénalité
est de l'ordre de 21% du prix du marché, elle s'exprime par la
différence entre le prix de revient du lait (23,35) prévu
à la transformation et le prix d'équilibre (28,26). Elle est
encore plus fortement ressentie (environ 50%) par rapport au prix du
marché international au vu des quantités transférables
(-11, 42).
Sans l'intervention gouvernementale le prix du litre de lait
pasteurisé et conditionné en sachet coûterait environ 34,77
DA le litre.
|
CPE
|
0.32
|
Dans la mesure où les coûts des biens
échangeables sont à peu de choses près les mêmes au
niveau du marché local et international pour la transformation et le
conditionnement du lait pasteurisé, la forte faiblesse du coefficient de
protection effective provient du fait que l'intervention de l'Etat se situe au
niveau de l'absence de profit. En effet le coût des transferts
compenserait totalement les profits qui auraient dus être ajoutés
au prix de vente à la porte de l'usine. En d'autres termes
l'activité de production de lait pasteurisé et conditionné
en sachet est maintenue par l'intervention gouvernementale au stade de la
suppression quasi-totale du profit. Le gain obtenu par l'activité de
transformation dans ces conditions est presque nul, il est de l'ordre de 0,76
DA par litre cédé à 23, 35 DA à la porte de
l'usine.
|
CRD
|
0.24
|
La filière de la pasteurisation et conditionnement du
lait au plan international est loin d'être à son niveau optimal.
De grandes possibilités subsistent encore en l'état, du fait de
l'existence d'un potentiel considérable en ressources non
échangeables. Les niveaux de production bien maîtrisés par
rapport au marché, ont fait que l'utilisation de ces ressources est
restée faible au niveau international. Comparée au niveau local
dont l'efficience se situe aux environs des 50%, cette situation reste
dominante par la marge de manoeuvre dont elle dispose. Dans le cas de
l'ouverture plus grande du marché local avec l'absence de l'intervention
gouvernementale et la participation au libre échange, le lait
pasteurisé et conditionné provenant de l'extérieur risque
d'être concurrentiel à plus d'un titre : outre la
qualité, la réduction des niveaux de profits et la compensation
à l'exportation d'une partie des coûts en biens
échangeables et non échangeables.
|
Tableau N°42 : Analyse des
coûts de production du fromage à pâte molle
(En équivalant
litre de lait de la laiterie de DBK).
|
|