I/ AUDIT :
L'audit a été un travail difficile mais
indispensable car il a permis d'entendre les acteurs quotidiens du droit de la
consommation. Dans cette phase la retranscription, de ce travail a
été scindée en deux parties : les acteurs du marché
en premier lieu et les instances en second.
Pour un souci de confidentialité les noms des personnes
auditionnées ne seront pas mentionnés, l'étude n'ayant
qu'une visée d'audit juridique cette confidentialité n'entrave en
rien la qualité du travail effectué.
1 /Les acteurs du marché :
Cette dénomination semble la plus correcte quand il s'agit
de regrouper les consommateurs et les professionnels sous une même «
bannière ».
L'audit des consommateurs a été faite auprès
de leurs représentants : les associations de consommateurs.
A- Les associations de consommateurs.
Il a été rencontré neuf associations sur
les douze établies à Toulouse. Sur celles qu'il a
été possible de rencontrer, deux ont accepté d'être
observées lors de leur travail quotidien.
En outre, une association au plan national a été
contactée et sondée sur ses relations avec les succursales
locales et sur son mode de fonctionnement.
Il y a deux types d'association : celles qui se
présentent comme généralistes et celles qui se
revendiquent spécialisées (logement, caractère familiale,
etc.). La plupart se disent généralistes, mais elles ont tout de
même en pratique un domaine de spécialisation : logement,
surendettement... On peut alors remarquer que parfois l'activité de
consommation dans son sens le plus large et général reste
secondaire et n'est pas la priorité.
Il ressort plusieurs aspects à développer de ces
entretiens.
1 Le fonctionnement inégal des associations.
Si les associations fonctionnent avec des moyens
très inégaux (matériel, personnel ou financement), elles
s'organisent toutes à peu près de la même manière
dans la gestion des dossiers.
Toutes travaillent par le biais d'un écrit. Rares sont
les associations qui appellent directement les entreprises. Mais dans le cas
où elles le font, l'entretien téléphonique se
concrétise quand même par un écrit. Il existe en fait une
certaine crainte que le professionnel ne s'exécute pas, traduisant un
manque de confiance dans la parole
donnée par le professionnel. Pourtant, chacun avoue que
les cas d'inexécution de l'accord trouvé restent de rares
exceptions.
Toujours dans la gestion des dossiers, les
associations attachent toutes une certaine importance à la constitution
du dossier en demandant les copies des originaux de contrats... afin que le
dossier soit le plus solide possible. De la même manière,
les associations ont quelque peu évoluée dans leur manière
de traiter un dossier : elles ne placent plus une confiance aveugle dans le
consommateur qui vient les consulter et qui leur explique son problème.
Chaque juriste consulté explique que maintenant, sans remettre en doute
la parole du consommateur, il s'en méfie beaucoup plus qu'auparavant.
Sans appeler directement le professionnel pour avoir son avis, il essaie
toujours de sonder celui-ci pour pouvoir confronter la version des faits de
chacune des parties. Nous sommes dans une application concrète du
principe du contradictoire.
Enfin sur « l'activité juridictionnelle
» des associations, il faut noter que toutes ne vont pas ester en justice.
Il y a en fait quatre profils d'associations :
· Certaines ne sont carrément pas favorables
à l'action en justice opposant un manque de confiance envers les
magistrats et le caractère trop aléatoire de l'action.
· D'autres se refusent à ester en justice parce que
cela ne correspond pas à la philosophie de l'association.
· D'autres ne peuvent simplement pas engager une action
compte tenu de leur manque de moyens financiers et du coût d'une telle
action.
· D'autres, enfin, estiment ne pas avoir besoin d'aller
en justice pour solutionner le litige en raison de leur poids médiatique
et de leur groupe de pression qu'elles représentent.
En règle générale, il est quand
même assez rare qu'une association se constitue partie civile dans une
action auprès d'un consommateur, quand bien même elle n'y est pas
opposée. Si elle agit, ce sera sur des points particuliers, des sujets
bien spécifiques.
Au civil, ne pouvant agir ou s'y refusant de toute
façon, certaines aident et soutiennent le consommateur le plus possible.
Par exemple en l'aidant à rédiger des « conclusions »,
des actes de procédure telle que l'assignation, en l'aidant dans la
saisine de la juridiction quand elle se fait de manière
simplifiée, ou tout simplement en l'aidant dans l'argumentation sans
qu'il y ait réelle rédaction.
2. Le manque de communication et de concertation.
C'est un point qui paraît pourtant
nécessaire à une bonne cohérence de l'action associative.
Néanmoins, aucune concertation ni aucune communication ne se fait entre
l'ensemble des associations. C'est étonnant, puisque les
associations sont peu nombreuses par rapport au nombre de sollicitations
(chacune des associations faisant valoir qu'elles sont
débordées), aucune concurrence n'est alors à craindre.
D'un autre côté, elles ont toutes le même objet et le
même but : défendre les intérêts du consommateur.
Par exemple, plusieurs associations ont dit avoir beaucoup de
dossiers avec un cuisiniste. Mais personne n'a proposé de réunir
les dossiers et de travailler ensemble pour arriver à un
règlement des litiges.
On peut également donner un autre exemple. La DRCCRF a
demandé aux associations d'intervenir dans le domaine de la
sécurité domestique (sujet d'actualité), mais chacune des
associations intervient de son côté. Certaines se sont
associées pour créer une école de la
sécurité domestique, d'autres agissent par interventions
ponctuelles et individuelles pour sensibiliser les gens. Une autre a
décidé de cibler son action en faisant appel aux
médias.
Cela serait amplement plus efficace si toutes
travaillaient dans le même sens. Mais actuellement il ressort de
toutes ces actions un certain manque de cohérence.
Il existe tout de même une concertation et un travail
en commun imposés. Cependant cela se fait dans un domaine en
particulier. Ainsi trois associations spécialisées dans le
domaine du logement se sont regroupées autours de leur
spécialité. Les associations en question, conscientes de
défendre les mêmes intérêts, se sont
concertées pour travailler et établir une grille de
vétusté des équipements locatifs.
Ce travail serait bénéfique pour tout le monde,
tant pour les associations que pour les professionnels et d'avantage pour les
consommateurs, mais cela reste trop marginal et ponctuel.
3. Le Centre Technique Régionale de Consommation (Le
CTRC).
Le Centre Technique Régionale de Consommation
est institué afin d'assurer une assistance technique aux associations
(soutien juridique, documentaire et matériel). Toutefois il faut
constater que les associations ne font que rarement appel à ce
centre. En fait le problème résulte surtout du fait que
dans les formations dispensées, le niveau juridique reste assez faible
et ne se révèlent utiles que pour les personnes peu
confirmées, voire profanes. Le CTRC devrait plus s'impliquer pour
assurer de réelles mises à niveau et permettre d'assurer la
veille des connaissances des juristes. Plus qu'une assistance technique
pour bénévoles, il devrait être un organisme de formation
continue en droit. Il devrait également être un organe de
coordination pour les juristes des associations qui ne disposent d'aucun lieu
d'échange inter associatif.
Au niveau du soutien documentaire, certaines associations
disposent de plus de documentation que le CTRC puisque quelques associations
publient leurs propres revues ou manuels. Dans ces cas, l'association dispose
d'une base plus solide que le CTRC lui-même.
Dans les autres cas (où l'association ne publie aucun
ouvrage), elles disposent pour la plupart d'une unique source de documentation
(fiches de l'INC, Institut National de la Consommation, revues de
« 60 millions de consommateurs »...).
Il est regrettable que le CTRC ne serve guère que
comme organe de consultation ou centre de recherche.
4. L'interprétation de la loi défavorable aux
associations.
Sur ce point, il faut d'abord rappeler le texte de la loi de
1971 en son article 63 : « Les associations reconnues d'utilité
publique (...) peuvent donner à leurs membres des consultations
juridiques relatives aux questions se rapportant à leur objet
».
Ce texte plutôt clair est pourtant source
d'interprétation. Mais dans un sens qui n'est guère favorable aux
associations.
En effet, cela conduit d'une part à modérer
l'intervention des associations. Le texte utilise l'expression «
consultations », mais beaucoup comprennent plutôt ce terme dans le
sens de conseil. Cela conduit à limiter l'implication de ces
associations dans le travail de fond du dossier.
D'autre part, cela conduit à restreindre les actions
des associations. Le cadre fixé, par le fait qu'elles ne peuvent faire
de consultations auprès d'autres personnes que leurs membres,
empêche la participation des associations de consommateurs dans des
institutions telles que les Maisons de la Justice et du Droit.
|