Approche et évaluation de la notion de pauvreté ; Entre besoins et capacités des personnes, quelles attitudes pour les acteurs du Secours Catholique ?( Télécharger le fichier original )par Claude BOBEY Institut Catholique de Paris - Master II Solidarité et Action Internationales (SAI) 2007 |
3.3. Difficultés et ouvertures face aux bénévoles.Le bénévolat est complexe et change : « [...]un nomadisme associatif croissant, le passage d'une logique militante à une logique plus contractuelle, nous obligent à tempérer l'euphorie de ceux qui s'appuient sur des chiffres globaux (13 millions de bénévoles - plus d'un million d'associations...) pour en tirer des conclusions hâtives sur la bonne santé du bénévolat... »57 Cette citation nous révèle deux choses. Le bénévolat est en perpétuel mouvement. Ce mémoire n'est pas le lieu de l'analyse du bénévolat aujourd'hui mais des difficultés à appréhender la lutte contre la pauvreté pour ce public. En ce sens, la perte de la logique militante peut être une difficulté dans le temps. Comme nous l'avons noté, renforcer les capacités des personnes, en terme d'accessibilité et de potentialités est long, s'insère dans un processus. Un bénévolat « nomade associatif » et « contractuel » peut ne pas rentrer dans cette logique à long terme. Aujourd'hui le bénévolat a la volonté de réaliser une action plus 57 Sous la direction de de Jacques MALET, « La France Bénévole », Cerphi, Quatrième édition - mars 2007, p 3 http://www.francebenevolat.org/PDF/La_France_Benevole_2007.pdf qu'adhérer à un projet associatif : « En effet, l'« utilité sociale » est aujourd'hui le moteur principal des engagements bénévoles, plus encore que la cause défendue »58. Le Secours Catholique est une structure avec un projet fort, les orientations. Nous présentons celles-ci comme fondamentales et incontournables pour l'action. Les bénévoles demandent de l'action à faire. Où est la place des personnes quand les bénévoles sont centrées sur l'action ? Ce n'est pas incompatible mais peut vite dériver vers des chantiers d'actions balisées dans le temps où le point focal sera mis sur les résultats. Une bénévole me disait récemment : « Quand j'étais au 'petit'dèj', j'en ai sorti un, au moins un ! ». Elle se centrait sur les résultats uniquement et non sur les accompagnements réalisés. Nous n'avons pas questionné ce que voulait dire « sortir » mais cela aurait certainement décrit une vision de la pauvreté et du développement des personnes. La vision reste ici utilitariste et non centrée sur le renforcement des capacités des personnes. Le bénévole exerce un métier avec une approche altruiste au départ. Cependant, les bénévoles du Secours Catholique sont majoritairement des retraités et la motivation première est la reconnaissance sociale en tant que retraité. « Si vous ne faites rien, vous ne servez à rien ». Ici encore l'utilitarisme est de mise et risque de se centrer sur les résultats. Une autre difficulté est le manque de capital humain des bénévoles au départ de l'action. Les nouveaux bénévoles veulent agir vite et obtenir des résultats. Une fois formés et à la rencontre des personnes, des évolutions s'opèrent. Par exemple, les bénévoles du monde de l'entreprise, marqués par le progrès comme seul horizon et fondamentalement bon, appréhendent la lutte contre la pauvreté comme une question technique. La pauvreté ainsi que le pauvre deviennent réifiés. Le bénévole va alors devoir faire un chemin de « conversion » pour développer une approche altruiste et gratuite. Cette démarche est une véritable ouverture et un chemin pour donner place et parole aux personnes en difficulté. 3.3.1. Le choc de la rencontrePour beaucoup de nouveaux bénévoles, le pauvre a la figure du SDF crasseux et dormant dehors. Il le voit dans le métro ou à la télévision. Au Secours Catholique, ils le rencontrent lui et bien d'autres visages de la pauvreté. Ils vont rencontrer des familles, des étrangers, des Rroms et des enfants. Ils rentrent dans un processus de découverte. Parfois il y a la volonté de vouloir voir qui pourrait paraître malsaine, elle est plus à la découverte pour 58 Idem, p. 17. comprendre, se rendre compte, analyser, etc. C'est déjà se mettre dans une attitude de rencontre avec l'autre qui pose problème à des représentations d'une société qui s'appelle la France, pays des Droits de l'Homme, de la devise : « Liberté, égalité et fraternité. » |
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