WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les méthodes actives dans le système éducatif camerounais : le cas de la NAP dans l'enseignement de la philosophie en classes de terminale à Yaoundé

( Télécharger le fichier original )
par Blaise HAMENI
Université de Rouen - Master II 2005
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

II.2-15- Formation continue des enseignants

Ouedraogo Innocent met un accent sur la formation continue des enseignants dans son mémoire de Master deuxième année en sciences de l'éducation. Selon lui la fonction de recyclage disciplinaire est celle qui est la plus reconnue par les enseignants. Elle vise l'exploration et l'appropriation de nouvelles approches enseignantes. Elle concerne tous les enseignants dans la mesure où les savoirs théoriques qui sous-tendent les différentes disciplines sont en constante évolution. Il s'agit donc pour les praticiens de se mettre à jour pour qu'il n'y ait pas d'hiatus entre les savoirs enseignés et les savoirs épistémologiques. De même, les pratiques sociales de référence évoluent et l'apprentissage des savoirs ne saurait être décontextualisé. Aussi, les enseignants doivent-il réfléchir sur les savoirs-clés et sur le sens des savoirs enseignés qui constitue une des priorités de la formation continue de tous les enseignants.

Après cette présentation de quelques travaux de recherche sur la problématique de la nouvelle approche pédagogique, le recours aux théories explicatives permet de compléter ce moment de l'étude consacré à l'insertion théorique.

II.3-LES THEORIES EXPLICATIVES

Hotyat (1973 : 306) définit une théorie comme « une synthèse hypothétique couvrant l'explication d'un certain nombre de faits et s'appliquant à faire le point de l'état d'une science». Selon Cohen (1980 : 69), « une théorie scientifique est une ensemble intégré d'énoncés comportant des définitions et des relations supposées vraies et relatives à un domaine particulier».

Le paradigme quant à lui, désigne dans le vocabulaire de (Kuhn, 1983 : 29) «la recherche solidement fondée sur un ou plusieurs accomplissements scientifiques passés, accomplissements que tel groupe scientifique considère comme suffisants pour fournir le point de départ d'autres travaux». Ainsi, faisant référence à des textes scientifiques classiques tels que la Physique d'Aristote, les Principes de Newton ou la Chimie de Lavoisier, Kuhn (p.30) note que « ces livres et bien d'autres ont longtemps servi à définir implicitement les problèmes et les méthodes légitimes d'un domaine de recherche pour des générations successives de chercheurs ». Il ajoute que : « S'ils pouvaient jouer ce rôle, c'est qu'ils avaient en commun deux caractéristiques essentielles : leurs accomplissements étaient suffisamment remarquables pour soustraire un groupe cohérent d'adeptes à d'autres formes d'activité scientifique concurrentes ; d'autre part, ils ouvraient des perspectives suffisamment vastes pour fournir à ce nouveau groupe de chercheurs toutes sortes de problèmes à résoudre. ». Objet d'un relatif consensus au sein de la communauté scientifique d'une part, point de départ d'un vaste programme de recherche d'autre part, telles sont donc les deux principales caractéristiques de ces « performances » que T. Kuhn désigne comme paradigmes. C'est le paradigme descriptif que nous utiliserons dans le cadre de cette étude.

Le paradigme descriptif nous permettra de décrire une situation éducative, reposant sur une interaction entre l'enseignant et l'enseigné, dans le cadre de la pratique pédagogique inferentielle. Partant des méthodes actives inspirées de l'éducation nouvelle, ce paradigme facilitera la vérification de la nouvelle approche pédagogique dans l'enseignement de la philosophie en classes de terminale.

Il s'agit d'une enquête empirique reposant sur des données qualitatives. Notre investigation est effectuée à partir de la théorie de l'innovation. Une innovation est un changement délibéré. On parle parfois de changement planifié, mais cela évoque une entière préméditation. Or, sans être involontaires, beaucoup de changements n'apparaissent pas aussi fortement calculés. Parlons plutôt d'un changement intentionnel, sachant que la réalité est souvent ambiguë ou instable: les acteurs peuvent, par exemple, décider de renforcer ou de combattre un processus à l'origine spontané; certains changements, sans avoir été voulus, découlent d'une action délibérée, mais qui visait d'autres effets. Les acteurs sociaux s'affrontent constamment à propos des changements possibles et souhaitables. Les uns travaillent à les précipiter, les autres à les empêcher. Ce qui arrive en fin de compte est la résultante de la confrontation de ces stratégies contradictoires. Cette complexité nous conduit à conclure que l'objet le plus intéressant, ce sont les projets, les désirs, les stratégies d'innovation des acteurs, aussi bien que leurs peurs ou leurs résistances face aux innovations proposées par d'autres, avec les transactions tacites ou explicites qui s'engagent à ce propos. D'où une approche résolument constructiviste, interactionniste et anthropologique de l'innovation.

Les acteurs qui veulent certains changements sont en quête de savoir d'innovation (Gather Thurler, 1998). L'outil le plus pratique est sans doute une bonne théorie des processus d'innovation. Tentons d'en énumérer quelques éléments :

1. L'innovation, avant d'être - éventuellement - un changement effectif, est un changement rêvé, imaginé, anticipé, préfiguré. Elle est donc de l'ordre des représentations.

2. Cette représentation ne se limite pas à dire ce qui pourrait ou devrait changer, mais s'étend aux raisons de ce changement, aux obstacles prévisibles, aux avantages et inconvénients présumés.

3. Proposer une innovation n'est jamais, en soi, une chose éminemment rationnelle et allant dans le sens d'un progrès indiscutable. Ce qui constitue un progrès ne fait pas l'unanimité, car les raisons d'innover ou d'inciter les autres à innover sont rarement entièrement désintéressées, simple expression du bien public ; ce dernier, d'ailleurs, fait l'objet de visions fort diverses.

4. De la même manière, aucune résistance à l'innovation n'est a priori irrationnelle ou réactionnaire. Comme les tenants de l'innovation, les résistants ont leurs raisons, souvent réfléchies, sinon toujours avouables.

5. L'innovation est rarement un but en soi, elle est reliée à des visions du monde, des idéologies, des stratégies plus vastes. Elle n'est parfois qu'un moyen pour que rien d'essentiel ne change.

6. L'innovation en éducation concerne rarement un seul acteur, même s'il en est l'initiateur. Lorsqu'un enseignant innove dans sa classe, cela a des implications pour les élèves et leurs parents, parfois - au moins indirectement - pour ses collègues ou sa hiérarchie. Un professeur qui renonce à donner des devoirs ou des punitions provoque, par exemple, une comparaison avec ses collègues.

7. Les acteurs concernés ont rarement le même rapport à une innovation définie. Tout dépend de leurs projets, de leurs attentes, de leurs compétences, de leurs peurs, des alternatives dont ils disposent, de leurs alliances, des autres enjeux, du calcul coûts/bénéfices qui leur est propre.

8. L'innovation fait donc en général l'objet d'une transaction, d'un marchandage (Huberman, 1982) aboutissant à un compromis entre plusieurs intérêts, plusieurs systèmes de valeurs, plusieurs projets, plusieurs logiques d'action.

9. Les transactions relatives à diverses innovations possibles, souhaitables, redoutables sont au coeur du fonctionnement des organisations et du monde du travail. Elles renvoient constamment aux rapports de pouvoir et au sens des activités.

10. Le sens d'une innovation est toujours, en dernière instance, construit par chacun des acteurs, même si chacun subit des influences et ne pense pas l'innovation tout seul.

Ces propositions, qui restent d'une grande généralité, permettent cependant de rendre plus intelligibles les jeux sociaux qui se jouent autour des innovations en éducation. Si le sort d'une innovation dépend fortement du sens que lui attribuent les acteurs, en particulier ceux auxquels on demande de transformer leur pratique, il importe de mieux comprendre :

- comment les acteurs perçoivent, se représentent et évaluent les innovations qui leur sont proposées ou imposées ;

- comment ils développent de leur propre chef des projets d'innovation pour eux-mêmes ou une partie du système dont ils font partie.

Au-delà des contextes et des enjeux spécifiques, deux leitmotivs émergent de la réflexion sur l'innovation :

1. le degré de professionnalisation du métier d'enseignant et des métiers connexes;

2. la dimension réflexive de la pratique (Schön, 1994).

Le professionnel est au contraire un des moteurs de l'innovation. Confronté à des problèmes, il se met en quête de solutions nouvelles, se forme, expérimente, réfléchit sur sa pratique et ses outils de travail. Plus une organisation fait appel à des professionnels, plus elle décentralise les processus d'innovation et les instances de décision, multiplie les foyers et les dynamiques, délègue en quelque sorte l'invention du changement aux praticiens réflexifs, Professionnaliser le métier d'enseignant et développer sa dimension réflexive (Perrenoud, 2001) apparaît à terme plus efficace que de multiplier les prescriptions et les incitations autoritaires au changement. Si elle réussit, une telle stratégie facilitera l'innovation plus sûrement que les efforts ponctuels engagés dans chaque réforme. Tout changement des pratiques est un processus, le résultat d'une lente construction sociale. Il ne peut être provoqué par une simple décision politique ou administrative. Aucun projet d'innovation, aussi séduisant soit-il, ne peut aisément convaincre les enseignants d'abandonner des routines ayant fait leurs preuves en faveur de pratiques qu'ils maîtrisent mal et qui ne leur garantissent pas un fonctionnement économique et efficace.

Dans cette optique la théorie de l'innovation qui porte sur l'introduction d'une nouvelle approche pédagogique dans un système éducatif, fait nécessairement appel au fonctionnalisme et au constructivisme. Il s'agit d'établir le rôle de cette approche nouvelle et celui des acteurs dans la consolidation d'un système d'enseignement. De la même manière que le constructivisme se rapporte à l'ensemble des processus mentaux que les acteurs du système éducatif en réformation mettent en place pour s'adapter et à apporter une touche particulière à l'approche qui leur est imposée.

Le contexte de notre recherche nous met face à trois intervenants majeurs dans le système éducatif qui doit subir une réforme, à savoir : les inspecteurs pédagogiques qui initient les réformes, les enseignants qui sont appelés à appliquer la réforme et les élèves qui sont les bénéficiaires de la réforme.

En ce qui concerne les inspecteurs, le souci de la réforme est motivé par deux facteurs ; d'abord le constat de l'inefficacité et de l'improductivité du système en cours, ensuite le souci de se conformer aux réformes éducatives que connaissent la plupart des système éducatifs du monde afin de s'arrimer à la modernité. Pour rendre un projet de réforme possible, il est nécessaire de tenir compte des invariants de la théorie de l'innovation : toute chose nouvelle, avant d'intégrer un système, doit reposer sur la prise en considération de la perception sociale de la réforme et des résistances inévitables auxquelles il faut faire face.

Pour ce qui est des enseignants, en tant que maîtres d'oeuvre de l'éducation, ils sont formés sur une certaine base pédagogique, ils appliquent ces théories de base au quotidien et ils en ont fait une habitude. Lorsqu'on sait que « l'habitude est une seconde nature », on peut imaginer que l'arrivée d'une nouvelle approche pédagogique pose un véritable problème de réadaptation, de recyclage et d'acceptation.

Quant aux élèves, ils n'ont jamais été consultés en ce qui concerne l'approche pédagogique dont doit se servir le maître dans ses enseignements. Comme il en est ainsi, ils se résignent au rôle de réceptacles et d'observateurs du système éducatif. Leur sentiment ou leur perception des choses c'est que tout leur est imposé.

A partir de la théorie de l'innovation, il revient que la réforme n'est pas un acte spontané qu'on pose mais tout un processus qui doit se construire sur une durée plus ou moins longue selon le degré de perception des acteurs du système. Une nouvelle approche pédagogique fait donc appel à une préparation psychologique du maître et à un ensemble d'activité d'imprégnation afin de minimaliser au maximum les résistances et les rejets. Dans le cadre de cette recherche, nous vérifierons dans quelle mesure toutes les conditions qui entourent la mise en place d'une réforme sont remplies. En nous référant à la théorie de l'innovation qui suppose celles du constructivisme et du fonctionnalisme, nous évaluerons le système éducatif camerounais en voie de réformation, si de façon systématique les changements ne sont pas juste des produits d'une génération spontanée, et si tel est le cas, quelles seraient donc les modalités pour une bonne imprégnation des acteurs à la nouvelle approche pédagogique ? Le cadre méthodologique permettra de poser les bases instrumentales de la recherche des solutions à cette interrogation.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault