C. Des responsabilités collectives et
individuelles pour garantir à la protection sociale son caractère
solidaire
Il est tentant de réduire les actions de
prévention à des compétences techniques permettant de les
renvoyer à des spécialistes et à la seule
responsabilité de l'Etat et de manière générale,
des pouvoirs publics. Certes, le rôle de celui-ci est fondamental. Mais
nous croyons également que celui des entreprises et surtout des
salariés est indispensable à la transformation nécessaire
de la façon de travailler (DAVEZIES, in THERY, 2006). En effet, comment
aborder l'identification et la prévention des risques physiques et
psychiques dans l'organisation du travail sans l'engagement des principaux
72 De nombreux économistes libéraux se sont
ralliés à la thèse de l'élargissement de l'assiette
à la valeur ajoutée. Il n'est pas anodin que le rapport qui
inspire les projets de « réforme » libérale (et auquel
le FMI fait référence dans ses recommandations annuelles)
s'intitule Vers une société sociale professionnelle. Ce plagiat
du terme forgé par la CGT - dont Nicolas Sarkozy se réclame lui
aussi - montre qu'il est nécessaire d'avancer un certain nombre de
principes permettant de se démarquer de cette récupération
libérale (HUSSON, 2006). De nombreux auteurs, mettent en évidence
la contradiction entre le caractère de salaire indirect ou
socialisé que constituent les cotisations sociales et la fiscalisation
entrainée par une taxation de la valeur ajoutée (FRIOT, 1998,
THALLER, 2006, etc.).
intéressés ? La tradition solidaire de
l'assurance maladie en France a besoin d'un renouvellement de son organisation
et de l'implication de ses acteurs pour dépasser ses
difficultés.
a) La protection sociale : un modèle
inachevé
Si la pensée néolibérale prône
l'amoindrissement de l'Etat social au nom de ses échecs et de ses
dysfonctionnements, elle le fait dans un contexte d'autoritarisme
renforcé pour imposer son point de vue, ce qui ne constitue pas le
moindre de ses propres paradoxes (ROSAN VALLON 2005).
Il nous semble, a contrario, qu'il convient de reprendre un
édifice inachevé dans la première moitié du
XXème siècle, en impliquant plus et mieux tous les
acteurs dans la définition et dans la mise en oeuvre de nouvelles
politiques de régulations et de redistribution. C'est à la fois
une question de justice et d'efficacité au regard des enjeux de la
cohésion sociale et du développement de notre
société (ROSANVALLON, 1995). En effet, « l'économique
» et le « social », n'ont nullement besoin d'une
réconciliation pour réduire un supposé antagonisme, «
l'économique » n'a pas d'autre légitimité, que celle
de l'instrument de mesure de l'état de la société.
Dans ce sens, nous partageons avec RAMAUX (2006), la
thèse selon laquelle, on ne peut réduire « l'Etat Social
», à la seule protection sociale, mais se compose des quatre
piliers que sont :
· La protection sociale,
· Le droit du travail,
· Les services publics,
· La politique macroéconomique de soutien à
l'activité et à l'emploi.
S'il est vrai que les différentes politiques
libérales ou néolibérales conduites en Europe au niveau de
l'Union Européenne, tout comme par les gouvernements successifs en
France ont indéniablement ébranlé, chacun des 4 piliers
dans les 30 dernières années, il n'en demeure pas moins que leurs
arguments et leur action n'a pas permis de prouver ni l'inefficacité du
concept « d'Etat social », ni la pertinence de leurs thèses.
Cela constitue un encouragement à persister, à la fois dans la
résistance aux assauts du libéralisme de droite, comme de gauche
pour ébranler notre système, et dans la construction de solutions
qui gagneront en crédibilité par la confrontation avec les
politiques actuelles.
Les salariés et leurs organisations syndicales ont une
responsabilité centrale dans ce processus à un triple niveau :
· Empêcher ou du moins limiter les mesures de
déstabilisation,
· Proposer des mesures nouvelles en animant le débat
citoyen,
· Agir concrètement dans les entreprises sur
chacun des leviers de responsabilisation des salariés. Par exemple, Il
est significatif de constater les difficultés à mettre en place
le document unique dans les entreprises dont la réglementation a
prévu qu'il était de la responsabilité de l'employeur de
l'établir, mais qui a omis d'y associer les salariés et leurs
représentants autrement que par un avis devant être émis
par le CHSCT73. Cette procédure d'identification des risques
est
73 Comité d'Hygiène de Sécurité et
des Conditions de Travail
pourtant fondamentale pour intervenir sur l'organisation du
travail et les effets des changements permanents qui y sont apportés.
Cela pose, bien entendu, la question de droits nouveaux et
des moyens de les exercer pour les salariés. Cela pose également
la question de la responsabilité sociale des entreprises.
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