Le commerce occupe, aujourd'hui, une place importante dans
l'économie par son rôle d'intermédiaire entre la production
et la consommation. Il représente environ 10% du PIB en France et 14% de
l'effectif salarié (INSEE-Références, 2006, p.9).
Les entreprises de la grande distribution, en particulier
dans les grandes et moyennes surfaces alimentaires (hyper et
supermarchés), en ayant atteint des tailles souvent comparables à
celles des plus grandes entreprises de l'industrie, jouent un rôle
déterminant dans les marchés financiers. En effet, Ces
entreprises mobilisent des capitaux importants par le biais du crédit
fournisseur, ce qui leur permet de disposer d'une trésorerie
excédentaire à placer sur les marchés financiers, source
d'une forte rentabilité externe à leur activité
principale. Le marché financier des valeurs mobilières en 2003
porte sur 19 sociétés cotées qui emploient environ 800.000
salariés et dont le chiffre d'affaires représente 43% du commerce
de détail27. La période de reflux de la croissance
économique (1999-2003) a été très nettement
amplifiée par les marchés financiers. En début de
période, surfant sur la vague spéculative de la « net
économie », ces groupes ont été largement
survalorisés. En 1999, leur valorisation boursière
dépassait un an de chiffre d'affaires, alors qu'en 2003 ils n'en «
valaient plus que le tiers, détruisant ainsi 56 milliards d'euros
pendant cette période. Cela ne les a pas empêché de
réaliser des profits importants (18,6 milliards d'euros) dont 70 % ont
été versés aux actionnaires, ce qui représente
environ 3300 € par an et par salarié.
Cette puissance a bouleversé les rapports production
distribution donnant, ainsi, à ce secteur une position souvent dominante
qui leur a permis d'imposer des conditions draconiennes aux producteurs et, en
particulier, aux plus petits d'entre eux. On peut, ainsi, mettre en
évidence un quasi doublement de la part
25 C'est le fabriquant de caisses enregistreuses NCR à
Dayton, qui s'est attaché les services de Bernard TRUJILLO pour
développer des séminaires visant à instaurer le
libre-service dans la distribution. Les dirigeants des futures entreprises
françaises de la grande distribution ont suivi ces séminaires.
26 La législation a évolué en interdisant
la vente à perte avec la loi 96-588 du 01 Juillet 1996, dite Loi Galland
ou Loi sur la loyauté et l'équilibre des relations
commerciales
27 Hors commerce automobile et divers
des services facturés28 aux industriels (de
2,8% à 5,0%) entre 1997 et 2004 (Comptes Commerciaux de la Nation), sans
que le consommateur ne trouve dans l'offre de la grande distribution une
répercussion ni dans les prix (la marge commerciale n'a baissée
que de 0,3 points pendant la période), ni dans les services
proposés.
Le secteur a enregistré des bouleversements profonds
depuis le rattrapage de son retard technologique sur l'industrie. Grâce
à un vaste processus de refonte de ses systèmes d'information et
de gestion pour gagner en productivité dans la guerre des prix et de la
concurrence.
Ce processus se déroule dans un contexte où les
stratégies des groupes dominants tendent à se rapprocher par les
politiques « marketing », les services et les compétences dans
des marchés qui tirent de plus en plus les prix vers le bas. Face aux
enjeux de compétitivité, de nouveaux concepts associés aux
innovations technologiques tentent de déplacer les enjeux concurrentiels
sur d'autres terrains où peuvent être exploités de nouveaux
gisements de productivité.
Parmi ces concepts, la fidélisation du client devient
un enjeu essentiel avec l'émergence des premiers prix conjuguée
à l'atonie de la consommation qui ont fortement influé sur le
comportement des consommateurs devenus plus rationnels et exigeants, plus
prudents et disciplinés dans leurs actes d'achat.
L'utilisation de systèmes d'information plus puissants
et innovants semble constituer la clé de voûte du succès
des politiques commerciales. Cette recherche est constamment motivée par
l'optimisation des gains de productivité pour gagner en
compétitivité. C'est le rôle assigné, aujourd'hui,
aux nouvelles technologies de l'information et de la communication.
Il est évident que face aux phénomènes
de saturation des marchés, de banalisation des produits et des
technologies, face aux évolutions sociodémographiques, des modes
de vie et des comportements culturels, la grande distribution cherche à
développer de nouveaux pôles de croissance pour préserver
ou accroître ses marges ou ses parts de marché.
Les métiers traditionnels du commerce ne disparaissent
pas pour autant parce que les entreprises continueront toujours à
acheter, vendre, exposer, encaisser, livrer, mais sous des formes nouvelles,
souvent plus personnalisées, et plus adaptées aux besoins et aux
attentes de la clientèle mais également aux impératifs de
rentabilité.
Ces nouvelles formes sont largement favorisées par les
innovations technologiques (achats sans passer directement à
l'encaissement, gestion unitaire en temps réel, ventes à
distance, etc.) illustrées notamment par le commerce
électronique, la domotique, etc. Ces nouvelles politiques de l'emploi et
de gestion de la force de travail s'appuient sur le développement de la
polyvalence29, de la polycompétence30, de la
flexibilisation des organisations du
28 Commissions de référencement, remises
arrière, etc.
29 On peut définir la polyvalence au sens
général, comme la capacité à exécuter
différentes tâches ou à occuper plusieurs fonctions. Elle
exprime aussi la qualité d'une personne qui a des capacités
diverses pour exercer des activités ou des métiers
différents.
30 La polycompétence est une expression relativement
récente dans le vocabulaire des organisations qui
désigne
l'ensemble des savoirs et des connaissances dont dispose un
opérateur pour assurer les tâches de postes distincts de
travail et de la dérégulation des horaires de
travail favorisant, ainsi, une véritable recomposition du rapport
salarial et, par conséquent, des rapports sociaux.