5.2.2.2. La division du travail
Une des caractéristiques particulièrement
intéressante est la capacité des sociétés
d'insectes à se partager le travail. Les taches que doivent accomplir
les ouvrières sont en effet multiples :
* La recherche de nourriture ;
* La défense du nid ;
* L'entretien et la construction du nid ;
* L'entretien des larves et leur approvisionnement en
nourriture.
Toutes ces activités, dont l'importance est variable
dans le temps et l'espace, doivent être assurées
simultanément pour la survie et le développement de la colonie.
C'est essentiellement la plasticité de l'organisation
déployée par les fourmis qui nous intéresse. Il a
été mis en évidence que certains groupes d'individus se
spécialisent dynamiquement pour une tache particulière. Cette
dynamique peut être mise en oeuvre pour un individu particulier : sa
tache de prédilection varie dans le temps, dans ce cas toutes les
ouvrières sont potentiellement capables d'accomplir n'importe quelle
tache. On trouve aussi des spécialisations morphologiques, avec par
exemple des variations de taille de un `a dix `a l'intérieur de la
même espèce. Dans ce cas la dynamique est assurée par un
contrôle des naissances sur chaque type de morphologie.
5.2.2.3. La construction du nid
L'architecture des nids construits par les fourmis est un
exemple frappant de structure complexe. L'intérêt pour des
modèles pouvant expliquer l'apparition de telles structures provient
encore une fois de l'organisation distribuée qui est sous-jacente. Il
n'y a pas, a priori, de contrôle centralisé, de coordination de
niveau supérieur à l'individu. La structure émerge des
interactions inter- individuelles et avec l'environnement. La communication
indirecte entre les individus est la encore mise à profit.
Les fourmis tisserandes sont par exemple capables d'unir leurs
efforts pour rapprocher des feuilles en formant de véritables ponts puis
d'unir les bords des feuilles en utilisant la soie produite par leurs larves.
La construction du nid chez les termites a été
étudiée par Deneubourg. L'apparition des piliers dans une
termitière pouvant être expliquée par l'amplification de
multiples fluctuations chaotiques : la structure, modèle
d'équilibre des forces par sa stabilité, naît de
l'amplification de multiples déséquilibres. La construction des
nids de guêpes est aussi un modèle d'action collective ou les
agents répondent plus particulièrement à des stimuli issus
de certaines configurations dans la structure.
5.2.2.4. La quête de
nourriture
La recherche de la nourriture (le fourragement) est une
activité souvent plus dispersée spatialement que la construction
du nid et qui peut aussi être mise en oeuvre de facon tr`es
différente suivant les espèces de fourmis. Les stratégies
de recherche de nourriture sont en effet extrêmement diversifiées.
Par exemple `a cause des différences de régime alimentaire :
certaines espèces peuvent être spécialisées sur un
unique type d'aliment. On peut aussi trouver des mécanismes très
élaborés comme la culture de champignon ou l'élevage de
pucerons. La recherche de nourriture est une activité risquée
(les fourrageuses de Cataglyphis bicolor ont par exemple une
espérance de vie de 6.1 jours [19])) mais souvent efficace (la
quantité de nourriture ramenée au nid au cours d'une vie
représente de 15 `a 20 fois le poids d'un individu). La communication
peut avoir un impact important, en particulier pour les mécanismes de
recrutement dont le principal intérêt collectif est de rassembler
les ouvrières sur les sources de nourriture rentables. D'un point de vue
plus général, la communication mise en oeuvre pour la recherche
de nourriture peut être considérée comme une forme de
mémoire collective quand elle s'appuie sur la modification de
l'environnement telle que l'utilisation des phéromones.
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