chapitre 5 COLONIES DE FOURMIS
L
a place des fourmis dans l'étude des
sociétés animales est centrale car elles ont
développé des formes très avancées de
socialité allant jusqu'à partager leur activité
de reproduction en confiant la transmission de leurs gènes
à quelques individus de la colonie.
5.1. Optimisation par colonies de fourmis
Le principe de l'optimisation par colonies de fourmis est
apparu au début des années 90. Il est du aux chercheurs M.
Dorigo, V. Maniezzo et A. Colorni qui expliquent leur théorie dans un
article fondateur [32]. Article dans lequel ils proposent une nouvelle approche
pour l'optimisation stochastique combinatoire et mettent en avant la
rapidité de leur nouvelle méthode à trouver des solutions
acceptables tout en évitant des convergences prématurées.
Ils qualifient leur méthode de versatile (elle peut s'appliquer à
des versions similaires d'un même problème), robuste et bien sur
basée sur une population d'individus [33,34,35,36,37,38,39,40].
Les algorithmes de colonies de fourmis sont nés
à la suite d'une constatation : les insectes sociaux en
général, et les fourmis en particulier, résolvent
naturellement des problèmes relativement complexes. Les biologistes ont
étudié comment les fourmis arrivent à résoudre
collectivement des problèmes trop complexes pour un seul individu,
notamment les problèmes de choix lors de l'exploitation de sources de
nourriture.
L'optimisation par colonies de fourmis s'inspire du
comportement des fourmis lorsque celles-ci sont à la recherche de
nourriture. Les fourmis en se déplaçant déposent des
phéromones, substances olfactives et volatiles. Chaque fourmi se dirige
en tenant compte des phéromones qui sont déposées par les
autres membres de la colonie. Les fourmis choisissent leur chemin de
manière probabiliste. Comme les phéromones s'évaporent
progressivement, le choix probabiliste que prend une fourmi pour choisir son
chemin évolue continuellement.
5.2. Les fourmis réelles
Les fourmis constituent à l'heure actuelle un support
majeur pour les théories développées en écologie
comportementale et en sociobiologie. On peut citer plusieurs raisons à
cet engouement :
* L'influence des fourmis sur leur environnement naturel est
extrêmement importante. Il a par exemple été montré
qu'elles déplacent plus de terre en foret tropicale que les vers de
terre, ou encore que le poids total des fourmis sur terre est du même
ordre de grandeur que le poids des humains. De plus, la domination des fourmis
est une preuve de leur adaptation `a des environnements très
variés : Dans la foret vierge amazonienne du Brésil, le
poids sec de l'ensemble des fourmis est environ quatre fois supérieur `a
celui de tous les vertébrés terrestres (mammifères,
oiseaux, reptiles et amphibiens) réunis [19]. On trouve ainsi des
fourmis dans tous les écosystèmes terrestres situés entre
les deux cercles polaires. La connaissance de leur mode de vie est donc
primordiale à la compréhension des espèces animales et
végétales qui les côtoient;
* L'étude des fourmis se fait assez facilement en
laboratoire car elles s'adaptent sans trop de difficultés à des
environnements différents de leur habitat d'origine ;
* Les fourmis possèdent une gamme de comportements
très variés, collectifs ou individuels.
5.2.1. Les insectes
sociaux
La place des fourmis dans l'étude des
sociétés animales est centrale car elles ont
développé des formes très avancées de
socialité allant jusqu'à partager leur activité de
reproduction en confiant la transmission de leurs gènes `a quelques
individus de la colonie (les reines et les males) [17,41].
Le nombre d'espèces sociales (environ 13 500 connues
[19]) est assez réduit par rapport au nombre d'espèces d'insectes
répertoriées, soit environ 750 000, alors que les insectes
sociaux représentent la moitié de la biomasse des insectes. La
grande diversité des fourmis (environ 10 000 espèces connues
[19]) propose une large variété de morphologies et de
comportements. L'étude des fourmis, la myrmécologie, est donc un
vaste et passionnant champ d'investigation.
Une fourmilière peut aussi être assimilée
à un super organisme s'apparentant à un organisme vivant
composé de cellules. Chaque cellule remplit un rôle précis
tout comme les fourmis accomplissent certaines taches pour la survie et le
développement du nid. Les fourmis sexuées ont par exemple le
même rôle que les cellules sexuelles. Les parallèles entre
ces deux types de systèmes sont étonnants et l'étude de
leur développement, la morphogenèse pour un organisme et la
sociogenèse pour une société d'insectes, permet de faire
certains rapprochements. L'étude de la sociogenèse a l'avantage
d'être plus facile à réaliser puisque l'on peut retirer et
injecter des constituants sans mettre en péril le développement
du super organisme.
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