2.2
BÉNÉFICES D'UN TEMPS D'ÉLABORATION
· Hypothèse 2 : Avoir
bénéficié d'un temps d'élaboration améliore
la représentation que les patients ont de leur séjour en CI.
A nouveau, les données ne sont pas
représentatives étant donné le faible nombre de sujets,
cependant, d'un point de vue descriptif, elles vont globalement dans le sens de
l'hypothèse.
v Hypothèse 2a :
Avoir bénéficié d'un temps d'élaboration
améliore le ressenti des patients.
Bénéficier d'un temps d'élaboration
semble avoir un effet positif sur le ressenti des patients. Les patients TE+
sont ainsi les seuls à mentionner des sensations positives.
Toutefois, ce point est contrebalancé par le fait
qu'étonnamment, ils sont aussi plus nombreux que les patients TE-
à évoquer un sentiment de punition.
Il apparaît que le sentiment le plus
généralement exprimé par ces patients est l'ennui, qui
apparaît comme une émotion assez neutre alors que des ressentis
plus violents ou difficiles sont exprimés par une majorité de
patients TE-.
Ces résultats donnent à penser que les
patients TE+ seraient mieux à même d'envisager ce temps
d'isolement auquel ils donneraient peut-être plus de sens que les
patients TE-.
Il est cependant difficile de conclure en faveur de
l'hypothèse car, à l'exception du patient A, tous expriment
tout de même des sentiments très négatifs.
Pouvoir parler et réfléchir sur cette
expérience ne suffit sans doute pas à améliorer le
ressenti d'une expérience qui est concrètement très
difficile à vivre. Cela peut à la limite permettre de mieux
accepter d'avoir dû en passer par là, et c'est vraisemblablement
ce que montrent ces résultats.
Il est évident que l'adhésion à ce soin
n'est pas suffisante pour que la théorie de la dissonance cognitive de
Festinger soit ici applicable.
v Hypothèse 2b : Avoir
bénéficié d'un temps d'élaboration permet aux
patients de considérer la CI comme un soin intensif.
Il y a une différence assez notable entre les deux
groupes, qui va dans le sens de l'hypothèse.
Pour l'ensemble des patients du groupe TE-, la CI n'est pas un
soin.
Trois catégories de réponses correspondent
à ce que les soignants considèrent eux-mêmes comme faisant
partie intégrante du soin en CI : l'attention accrue,
l'absence de stimulation et le cocooning.
Dans ces 3 catégories, les patients TE+ sont largement
majoritaires. Ils sont même les seuls à avoir pensé aux
catégories absence de stimulation et cocooning.
Les patients ayant bénéficié d'un
temps d'élaboration semblent donc mieux percevoir les
caractéristiques du soin en isolement.
Il faut cependant noter que les conditions de MCI des patients
A et D ont également pu avoir une influence non négligeable: le
patient A était en accord avec la décision d'isolement, dans
l'idée qu'on y prendrait « bien soin de
lui ». Le patient D, également d'accord, était
dans une période d'agitation maniaque que l'absence de stimulation a pu
faire régresser.
A l'opposé, le patient 1, qui juge l'isolement
« dégueulasse et scandaleux » et pense
qu'on parle de soin intensif « parce qu'on a beaucoup de
médicaments », a été isolé contre
son gré, avec appel de renforts.
v Hypothèse 2c : Avoir
bénéficié d'un temps d'élaboration permet aux
patients de reconnaître une utilité à la CI.
L'hypothèse semble là encore
vérifiée.
Les patients qui n'ont pas bénéficié d'un
temps d'élaboration sont les plus nombreux à associer le
rôle de la CI à un recadrage. On n'est pas très
éloigné de la notion de "punition" de la question de
départ.
S'ils sont une majorité dans les deux groupes pour dire
que la CI est indiquée pour calmer les états de crise, ce sont
surtout les patients TE+ qui donnent des réponses se rapprochant de la
perception des soignants.
Avoir pu parler de cette expérience avec des soignants
permet manifestement de mieux cerner les objectifs de la CI.
v Hypothèse 2d : Les
patients ayant bénéficié d'un temps d'élaboration
ont un meilleur vécu des temps de parole en CI.
Avoir bénéficié d'un temps
d'élaboration semble avoir un effet sur la perception des temps de
parole en CI. En effet, seule la moitié des patients TE+ dit ne pas
avoir bénéficié de temps de parole, face à
l'ensemble des patients TE-. Mais surtout, ils sont plus nombreux (50% contre
20%) à penser que c'est parce que les soignants sont pressés,
alors que les patients TE- soulignent le fait d'avoir plutôt entendu des
consignes (60% pour 33%).
Il semble que les patients TE+ cherchent des excuses aux
soignants, ou qu'ils sont plus conscients de leurs difficultés, alors
que les patients TE- seraient davantage dans une dynamique de reproches, ce qui
va dans le sens d'un lien amélioré par les temps
d'élaboration.
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