2.2 Présence franco-hollandaise
à Saint-Martin
Au XVIIè siècle, Saint-Martin était
habitée par quatre Français et cinq Hollandais. Le
problème de la souveraineté nationale fut réglée
par la signature du « Traité du Mont des Accords »
la dite « Convention de Concordia » le 23 mars 1648, au
terme duquel l'île était partagée en deux : les
Français occupèrent la partie nord et les Hollandais la partie
sud. La libre circulation entre les deux parties était consacrée
par le même traité [147].
Ce traité fut rédigé puis signé
par le chevalier Robert de Lonvilliers de Poincy et Henry de Lonvilliers, au
nom du Roi de France, et le capitaine major Martin Thomas et Piter Van
Zeun-Hus, au nom du prince d'Orange. Cette convention n'a jamais
été dénoncée et est toujours officielle à ce
jour malgré de multiples incidents et dérapages au cours de
toutes ces années.
Les habitants de Saint-Martin circulaient librement sur toute
l'île sans aucune restriction de nationalité et utilisaient
indifféremment les ressources de l'île, comme le dit le
Traité de 1648 :
« Article V. Que la chasse, la pêche, les
salines, les rivières, étangs, eaux douces, bois de teinture,
mines ou minéraux, ports et rades, et autres commodités de
l'île seront communs, pour subvenir aux besoins des
habitants » [139].
Il s'agissait de survivre dans les meilleures conditions et en
toute liberté de mouvement, sans pression administrative, en respectant
les liens traditionnels de courtoisie, d'entraide, de solidarité et
d'hospitalité.
Les administrations politiques des deux parties de l'île
ne cherchaient pas à se concurrencer, mais essentiellement à
subvenir, conjointement, à la survie de leurs habitants selon leurs
possibilités économiques, qui étaient très
limitées pour la partie française, car elle n'avait pas les
moyens de se doter d'un outil administratif lui permettant de faire vivre toute
sa population.
Les contacts avec Saint-Barthélemy et Anguille
étaient complémentaires, quelques bateaux à vapeur
américains ou hollandais chargeaient les exportations de Saint-Martin et
déchargeaient les importations au large du quai de Marigot avec
régularité. Ils servaient également de moyens de
transports réguliers aux Saint-Martinois qui se
déplaçaient pour leur gagne-pain dans la Caraïbe [46].
Saint-Martin fut peuplée par des Hollandais
chassés du Brésil par les Portugais et des Français qui
s'enrichissaient de la traite négrière. A une époque
où le transport maritime était incertain, la situation
géographique de Saint-Martin était propice pour les Hollandais
installés au Brésil, car elle se situait sur la route qui menait
à New Amsterdam (New York) [16].
Lors du traité d'Utrecht de 1713, la France perdit
l'île de Saint-Christophe (aujourd'hui, l'Etat de Saint-Kitts-et-Nevis)
au profit de l'Angleterre. Or, la partie française de Saint-Martin
était reliée administrativement à Saint-Christophe (dont
elle dépendait). La perte de Saint-Christophe, qui occupait tout lien
naturel avec la France, fit que la partie française de Saint-Martin dut
ne compter que sur elle-même pendant un certain temps [143].
Saint-Martin fut occupée à plusieurs reprises
par des puissances étrangères jusqu'au traité de Paris de
1816 qui rendit à la France sa partie nord. Le traité de Vienne
de 1816 consacra la double appartenance de l'île à la France et
aux Pays-Bas, et pendant 50 ans, Saint-Martin devint un carrefour commercial et
culturel pour tous les archipels voisins. Ceci explique, encore de nos jours,
le multilinguisme exceptionnel que nous rencontrons sur l'île [16].
Une convention signée le 28 novembre 1839 avec la
Hollande confirma l'application des stipulations du traité de 1648 [89].
Cette convention a précisé l'application des
accords de Concordia en ce qui concerne la chasse, la pêche,
l'exploitation commune des salines et l'extradition des délinquants. Ce
traité est toujours en vigueur [145].
L'île conserva depuis sa particularité de
bi-nationalité franco-hollandaise sur la base du traité de
1648 ; cependant, de multiples occupations anglaises laissèrent de
nombreux Anglais sur l'île, la langue anglaise allait devenir la langue
de communication [85].
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