C- Filiation et légitimation en islam
La filiation comme nous l'avons défini plus haut est le
lien naturel existant entre deux personnes dont l'un est le géniteur de
l'autre. A la différence de l'enfant né dans un couple
marié, pour lequel la filiation est établie automatiquement
dés sa naissance, celle de l'enfant né hors mariage doit
être en principe, établie par une reconnaissance de deux parents.
Elle peut être effectuée avec la déclaration de naissance.
Si tel est le cas selon le droit positif, le droit musulman n'est pas du
même avis. En islam les enfants issus d'un couple marié prennent
la filiation de leur père et ceux conçus en dehors de ce cadre
ont celle de leur mère. La reconnaissance d'un enfant naturel par son
père biologique est interdite, ce qui hypothèque leur
légitimation.
La notion de légitimation d'enfant naturel n'existe pas
en islam. Soit un enfant est légitime, et donc conçu par un
couple marié, soit il est naturel, donc issu d'un couple non
marié, de ce fait illégitime et le restera toute sa vie. Mais
dans la vie courante de cette société qui a fait l'objet de notre
étude, il arrive que le père biologique reconnaisse son enfant.
Dans ce cas, ce dernier peut bénéficier d'un soutient
matériel et surtout du nom de son géniteur sans toutefois
être légitimé. Il reste et demeurera un enfant
illégitime ; une illégitimité que même le
mariage de ses parents ne pourra supprimer.
Tout en faisant preuve de rigidité, le droit musulman
introduit des techniques juridiques de nature à contourner les
interdictions et régulariser, tant bien que mal, la situation de
l'enfant illégitime. Ce dernier sera déclaré
légitime, au cas où l'union est faite en méconnaissance de
la loi, en vertu d'un mariage putatif ou frappé de nullité
relative. A titre d'exemple, il suffit aux deux parents d'affirmer qu'en
réalité, ils se sont mariés antérieurement sans
témoins. L'enfant sera, alors, considéré légitime
dés sa naissance. Il convient de noter que l'enfant illégitime ne
peut mener une action de recherche de paternité au cas où le
père refuse de le reconnaître.
S'agissant de la communauté musulmane tchadienne d'une
manière générale et celle de N'djamena en particulier,
l'UNICEF avait recommandée l'élaboration et l'adoption d'un
« code de famille tchadienne » en 2005 ; code dans
lequel on ne distinguera pas la situation de l'enfant naturel de celle de
l'enfant légitime. Cette proposition n'a pu être
concrétisée par le simple fait que la communauté
musulmane s'est mobilisée comme un seul homme par le biais de
l'Association des Cadres Musulmans Tchadiens (ACMT) pour marteler que
l'islam, distingue la situation de l'enfant naturel qui est le fruit d'une
relation impure, maudite par le créateur, de celle d'un enfant
conçu dans le mariage donc pur et béni par le Tout Puissant. Les
musulmans restent rigoureux là-dessus et ne sont pas prêts
à céder. Ce projet a échoué parce qu'il va à
l'encontre des lois confessionnelles d'une communauté majoritaire dans
ce pays. L'on doit comprendre par là la fonction que joue le mariage
dans cette société et la vie difficile que doit mener un enfant
né hors mariage.
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