L'enfant naturel dans les quartiers musulmans de N'djamena( Télécharger le fichier original )par Mahamat Abdoulaye Malloum Université de Ngaoundéré - licence 2005 |
B- Que peut attendre cet enfant de son père biologique?Chez les musulmans, l'enfant né d'une relation adultérine illégitime ne peut prendre qu la filiation de sa mère. Son père en revanche se voit interdit, conformément au texte coranique, de le reconnaître ou d'exercer une autorité sur lui. Si l'enfant légitime attend tout de son père, le bâtard ne peut rien espérer. Son concepteur n'a pas des devoirs envers lui. La situation de l'enfant né hors mariage est toute différente. Il ne connaît son père que si ce dernier le reconnaît, encore que cette reconnaissance est interdite. Selon la loi islamique, la reconnaissance de l'enfant par le père sans l'existence d'un mariage n'est pas admise. Cet enfant ne bénéficie pas des mêmes avantages sociaux qu'un enfant légitime de la part de son concepteur de son vivant à savoir le vêtir, le soigner, le nourrir, l'instruire et n'hérite pas de lui après sa mort : « l'enfant appartient à la couche. Le libertin n'a que de la pierre »8(*)L'homme considéré comme l'initiateur de la relation adultérine est condamné à en assumer l'entière responsabilité. Sa sanction serait donc de le priver de sa descendance. C'est toutefois, une arme à double tranchant. En effet, « condamner » le père équivaudrait à sanctionner, indirectement, l'enfant. Mais, il arrive que sous la pression de la famille de la fille, le père biologique reconnaisse les faits et soit obligé d'apporter une aide matérielle, d'abord à la mère pendant la grossesse, et à l'enfant ensuite après sa naissance jusqu'à un certain âge. Dans cette situation l'enfant peut bénéficier de quelques avantages. Le père reconnaissant sa progéniture, et conscient de cette situation d'illégitimité, qui le prive de toute prétention à l'héritage, lui fait des donations. Il s'agit là des biens que le père biologique de son vivant donne à son enfant conçu en dehors du mariage. La loi n'interdit pas cela et l'enfant peut entrer légalement en possession de ses biens même après la mort de son géniteur. Tel n'est pas souvent le cas, mais il est important d'en parler car ce sont des pratiques réelles dont la « ladjna » (justice islamique) de la ville de N'djamena ne nie pas l'existence même si elle ne donne pas son avis sur la question. Un autre fait très rare est à noter. L'on parle d'un consensus entre les frères légitimes du même père que l'enfant naturel. Cette conciliation des frères consiste en une entente entre eux pour permettre à leur frère conçu illégalement par leur défunt père, qui l'a d'ailleurs reconnu de son vivant, d'hériter comme eux. Il s'agit cependant là d'un fait très rare que le droit musulman de la famille ne reconnaît pas, et qui se fait dans la famille sans qu'on le mentionne au grand jour. Ces deux situations n'enlèvent pas à l'enfant l'adjectif de « bâtard », mais lui permettent de se sentir accepté par la société, du moins par son père dans la première situation et sa famille paternelle dans la deuxième situation. Tout de même l'enfant garde un mauvais souvenir de son père de qui il est un fruit impur, une impureté que rien ne peut purifier et que la société se chargera de lui rappeler au quotidien. Rien de tout ce que le père fera ne donnera à cet enfant la filiation et par là la légitimation. * 8 Idem : p.485 |
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