II- Les systèmes de gestion du service public
Une fois précisées les définitions et les
différentes justifications de l' existence des entreprises publiques, il
paraît désormais important de savoir quelles méthodes et
outils utilise-t-on pour en assurer la gestion. Tel est le leitmotiv de cette
deuxième section ; ceci dit, avant d'en arriver là nous proposons
que soit revisité le concept de gestion lui-même dans sa
globalité avant d'en définir les contours pour ce qui est des
entreprises du service public.
II-1 L'existant en matière de gestion
d'entreprise
Il nous est essentiellement fourni par la théorie des
organisations et fait apparaître deux tendances : une gestion
traditionnelle appréhendée par le taylorisme et faisant
référence aux exigences d'augmentation de rendement dans les
ateliers d'usines industrielles et de l'autre côté, après
les années 70 notamment une gestion de la firme se voulant plus
modernisée. C'est cette deuxième tendance qui va susciter la
naissance
du concept de gestion stratégique, suite aux
contributions des chercheurs de la Harvard Business School (HBS) et d'Igor
Ansoff (1965). L'expression de gestion stratégique est alors
substituée à celle de « politique générale de
l'entreprise » encore assimilée par certains chercheurs à la
« gestion prévisionnelle. »
II-1-1 L'approche traditionnelle de la gestion
d'entreprise
Elle est constituée respectivement de l'organisation
scientifique du travail (OST), de la prise en compte progressive du management
et de l'introduction de la rationalité dans la conduite de la firme.
I-1-1-1 L'organisation scientifique du
travail
C'est l'invention de Taylor F.W. qui a ainsi eu le mérite
de formaliser la science de l'organisation. Son oeuvre va par la suite
être revue et augmenter par Henry Ford.
A- Le taylorisme (1 856-1945)
F.W. Taylor développe le système des salaires
aux pièces et étudie les éléments ayant trait
à la productivité, à la qualité du travail, au
moral des travailleurs et à la façon de les
rémunérer. Cette analyse débouche sur les cinq principes
de l'organisation du travail que voici :
- les tâches doivent être décomposées
en éléments constitutifs ;
- chaque élément doit être analysé
afin de rechercher la meilleure méthode d'exploitation ;
- les éléments de chaque tâche doivent
être intégrés, et il est nécessaire d'établir
des normes de rendement ;
- les employés doivent être
sélectionnés et entraînés d'une façon
scientifique ;
- les travailleurs doivent être
rémunérés en fonction du rendement.
Pour ce qui est du premier principe, notamment la
décomposition des tâches en gestes élémentaires
à durée imposée, il permet de parcelliser et
d'individualiser les opérations
humaines qui apparaissent alors en << miettes
>>16 pour reprendre l'expression de Friedmann G. (1956).
L'O.S.T a certes le mérite de formaliser l'action dans
l'organisation, mais elle participe en même temps à
déshumaniser une catégorie de personnes, notamment les
employés dont la seule tâche dans l'organisation se résume
en l'exécution.
B- Le fordisme
La contribution de Ford à l'O.S.T
développée par Taylor consiste en la quasimécanisation de
la chaîne de production. Cette dernière, à travers la
simplicité des gestes qu'elle induit, assure une rapidité, source
de la productivité. La répétition et la monotonie sont
cependant des griefs contre ce système. En effet, la mise en oeuvre du
capitalisme automatique va enlever au travailleur la petite parcelle
d'activité intellectuelle qui lui restait, et réduire son travail
à une tâche de surveillance purement <<réflexe
>> car le principe mécanique, en donnant à la machine l'art
de façonner l'objet, met presque à l'écart l'ouvrier. Le
fordisme se caractérise cependant par trois aspects :
- le << rapport de production fordien >>17
, c'est l'expression de la production en grande série de
marchandises dont la valeur unitaire en termes de temps de travail
nécessaire est abaissée ;
- le << rapport salarial fordien >>18
, c'est la substitution du salaire au temps : au salaire à la
pièce. Elle regorge une double dimension : le salaire direct garanti par
les formules d'indexation des salaires sur les prix des biens de consommation ;
et le salaire indirect (chômage, santé, vieillesse) apportant
quelques garanties concernant la reconstitution de la force de travail ;
- la << configuration fordienne de la division du
travail >>19 , c'est la liaison établie entre norme de
production et norme de consommation à l'origine de la production en
16 Friedmann G., (1956), Le travail en miettes,
Gallimard, paris
17 Le << rapport de production fordien >>
désigne les conditions particulières de production des biens
suscitées par la rationalisation taylorienne et fordienne du travail et
de la production.
18Le << rapport salarial fordien
>> désigne ce qui a trait aux modalités institutionnelles
et concurrentielles de fixation des salaires et des revenus secondaires.
19 La << configuration fordienne de la division sociale du
travail >> désigne les contours du fractionnement et du
sectionnement de l'appareil productif.
masse. Les secteurs ainsi concernés sont ceux de
l'automobile, le logement et plus généralement les biens
d'équipement des ménages.
La rigidité du système (Ansoff I., 1965) est le
principal reproche fait à l'O.S.T, que ce soit dans l'optique de Taylor
ou de Ford, d'où le recours aux principes de management pour le
combattre.
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