a- Historique de l'agriculture urbaine et
périurbaine
L'agriculture urbaine peut se définir comme la culture
de plantes et l'élevage d'animaux destinés à la
consommation alimentaire et à d'autres fins, dans les villes
(agriculture intra-urbaine) et en périphérie des villes
(agriculture périurbaine), le traitement et la commercialisation de ces
produits12. Les systèmes de production AUP comprennent les
tubercules, les légumes, les herbes aromatiques et médicinales,
les fruits et l'élevage d'animaux de toutes sortes et de toutes tailles.
Dans une faible proportion de ces systèmes sont aussi cultivés
d'autres produits tels que les plantes ornementales et les plants d'arbres. Les
cultures vivrières les plus représentées sont les
légumes et les produits et dérivés de l'élevage les
plus périssables et à haute valeur ajouté.
Selon Ngapayi (1999), les jardins ménagers datent des
années 1780, ceux du sud du Mexique, de plus de plus de dix millions
d'années. L'AUP à Lomé au Togo date de l'époque
coloniale Allemande (1897) et Anglaise (1914). Les cultures
maraîchères et vivrières furent introduites. Mais cette
activité n'a pris de l'ampleur qu'à partir de 1980 (Schilter,
1991). A Yaoundé, l'AUP date des années 1980 (Moustier et al,
1997). Mais la production maraîchère en zone périurbaine de
Yaoundé est ancienne et remonterait avant les indépendances dans
les quartiers Nkolbikok, Okolo et Nkolondom (Hernandez, 1999).
L'AUP c'est non seulement les cultures mais aussi les
animaux. Une étude menée en 2002 à Koumassi par Smith
révèle que les producteurs urbains élèvent plus de
3000 boeufs, 30 000 ovins et 26 000 caprins. Selon Temple (2002), on distingue
à Yaoundé les cultures vivrières (manioc, arachides, mais,
patate), les cultures maraîchères (légumes feuilles et
fruits), les cultures florales et ornementales et les cultures
fruitières (papayer, manguier,...). Comme principales productions
animales à Yaoundé, on peut citer : les poulets de chair, les
porcs, les chèvres et moutons, les canards, les pigeons.
S'inscrivant dans un paysage urbain, l'AUP rencontre beaucoup
de problèmes dans son élan d'expansion. Nous pouvons citer entre
autres : les problèmes d'ordre foncier, sociaux et
économiques.
En effet, les grandes métropoles africaines,
connaissent une croissance spatiale importante dont l'une des contraintes
majeures réside dans la question foncière avec comme corollaire
la concurrence sur l'usage du sol entre activités agricoles et
non-agricoles. Cette forme d'agriculture qui participe quotidiennement à
l'alimentation de la ville, notamment en produits frais est confrontée
à diverses difficultés dont l'accès à la terre qui
menace sa pérennité et rend précaire cette
activité.
L'AUP est une activité quasi propre aux bas-fonds
marécageux or les bas-fonds marécageux sont dans le domaine
public et donc susceptible d'être la propriété de l'Etat
(malgré le fait que sans un titre foncier même l'Etat ne saurait
s'approprier ces terres), ce qui fait que de temps en temps les agriculteurs
urbains sont menacés de déguerpissement.
12 L'Agriculture Urbaine et Périurbaine, la santé
et l'environnement urbain. Document de discussion pour la conférence
électronique de FAO-ETC/RUAF sur l'agriculture urbaine et
périurbaine. 21 Août - 30 Septembre, 2000
63
Joë& Sotamenou Mémoire de DEA- PTCI /UY II/
Octo6re 2005
Comme problèmes fonciers, les maraîchers sont
pour la plupart des gens déçus par d'autres secteurs
d'activité (commerce, diplômés de l'enseignement
supérieur, chauffeur, retraités, menuisier, ...). Ils s'y
retrouvent pour « perdre le temps », c'est ainsi qu'ils se lancent
dans l'agriculture sans formation préalable, bénéficiant
juste des conseils des anciens; les techniques spécifiques à
chaque marécage est le reflet même de ce mode de formation.
Très souvent, à la veille des récoltes les producteurs
sont victimes de vol particulièrement dans les porcheries.
Sans doute le plus important, le transport des produits se
fait au moyen de véhicules de transport en commun qui ne sont pas
spécialement conçus à cet effet. Sur les marchés,
les maraîchers n'ont pas d'emplacement spécifique, occupant
parfois les bordures de route. Sur le plan individuel, la majorité des
paysans se plaignent du manque de moyens ; ce problème, bien que
réel est le plus souvent le résultat de leur mauvaise gestion des
ressources. Autre problème, celui de l'approvisionnement en intrants.
Les agriculteurs en général se ravitaillent auprès des
revendeurs de pesticides ; ces revendeurs étant souvent de
compétence et de moralité douteuses, il serait moins
risqué de se ravitailler auprès des maisons fiables.
b- Les acteurs de l'AUP
Selon Austier (1994), les premiers pratiquant de l'AUP furent
les domestiques des missionnaires et après les paysans. En Afrique, les
études réalisées sur l'AUP situent de 10 à 80% les
urbains impliqués dans cette activité (Moustier et al, 1997). Par
ailleurs, 90% des activités de transformation alimentaires, 80% des
opérations de stockage et de transport à courte distance et 60%
de travail lié à la récolte et au marketing sont
assurés par les femmes (Tchouamo, 2000). A Lomé, le
maraîchage urbain est surtout l'affaire des hommes (Schilter, 1991). A
Yaoundé, la majorité des producteurs maraîchers sont des
personnes qui ont exercées auparavant une autre activité. Ils ont
été obligés d'abandonner la première
activité faute de rentabilité (Hernandez, 1999). En 1996, au
Cameroun 35% des citadins étaient impliquées dans l'AUP, 80% au
Zimbabwe en 1991 (Smith, 2002). Il est important de noter la grande
diversité des acteurs rencontrés en milieu urbain et
périurbain, l'AUP se déroulant dans un environnement
pluri-sectoriel (Martin et al, 2002).
Comme autres acteurs de l'AUP on peut citer :
Les Producteurs (Agriculteurs professionnels) :
Ce sont ceux pour qui l'agriculture constitue la seule, si non la
principale source de revenus en milieu urbain et périurbain. Les
enquêtes réalisés par le CIPRE en 2002 à
Yaoundé montrent qu'on recense parmi les producteurs : des
ménagères, des licenciés d'entreprises privés et
publiques, des retraités, des chômeurs, etc....
Les ouvriers agricoles : Ce sont souvent des
personnes qui mettent leur force de travail à la disposition des
exploitants agricoles. Les étudiants, les élèves, les
apprentis ainsi que les femmes peuvent se placer comme manoeuvre ou ouvrier
temporaire (Schilter, 1991).
Les agriculteurs occasionnels : Ce sont des
hommes et des femmes pour qui l'AUP constitue une seconde activité. Ces
acteurs sont recensés parmi les débrouillards des secteurs
informels, les petits artisans, les fonctionnaires aux revenus bas, et
même les amateurs de la petite agriculture domestique.
64
Joë& Sotamenou Mémoire de DEA- PTCI /UY II/
Octo6re 2005
En général, leurs travaux s'effectuent les
week-end, les jours fériés et souvent au cours des soirées
(CIPRE, 2002).
Les horticulteurs : Ce sont en
général des hommes qui produisent et vendent des fleurs, des
plantes d'ornement, les arbres fruitiers. Ils jouent parfois le rôle de
naturopathe pour certains de leurs clients et sont en général
installés de façon régulière aux abords des grands
carrefours du centre urbain. On les retrouve à Yaoundé dans la
vallée de l'Ekozoa et dans bon nombre de carrefours dans la ville.
Les producteurs du matériel
végétal : Il s'agit principalement des hommes qui ont
fait de la production du matériel végétal ou la production
des semences leur profession. On y trouve surtout des techniciens agronomes qui
produisent et vendent les plants greffés, les plantes
oléagineuses, et des semences (mais, haricot) pour revendre aux
agriculteurs urbains et périurbains.
Les fournisseurs d'intrants agricoles : On
distingue parmi eux de grandes firmes de production et de commercialisation des
produits phytosanitaires, des commerçants grossistes
spécialisés dans la vente d'intrant, les demi grossistes et
même les détaillants. Les engrais chimiques, pesticides, semences
et le petit matériel agricole constituent l'essentiel de leurs
marchandises.
Les consommateurs : Les consommateurs urbains
à qui sont destinés produits finis ou semi finis ne
réagissent que de manière individuelle dans l'appréciation
globale des produits. A travers L'analyse des Systèmes
d'approvisionnement et de distribution alimentaire (SADA) au sein des couches
aisées, des classes moyennes et des couches pauvres d'une ville, on
arrive à comprendre l'importance des prestations des différents
intervenants.
Les élèves et étudiants :
Il s'agit ici d'une catégorie d'exploitants agricoles qui
n'apparaissent que pendant les grandes vacances scolaires (juin - septembre).
Les élèves et les étudiants, notamment ceux originaires
des localités où l'activité agricole est de tradition,
pratiquent l'agriculture pour préparer la rentrée scolaire (achat
de fournitures scolaires, paie des pensions).
III-2-2. Les caractéristiques de
l'AUP
a- L'agriculture urbaine et périurbaine en
Afrique
a1- Les différents types de
production agricole
Selon Parrot (1997b), dans les villes des PVD, on distingue
généralement 3 catégories d'activités de production
:
- Les activités dont les biens sont
échangeables sur les marchés extérieurs et dont le niveau
de la production est déterminée par la demande des
ménages. Ce sont des biens dont les prix sont déterminés
par les marchés extérieurs, la ville n'ayant aucune influence sur
eux. C'est le cas entre autres des activités de l'agriculture non
alimentaire ;
- Les activités dont les biens sont
échangeables mais dont le niveau de la production est
déterminé ex-ante. Il s'agit de l'agriculture de rente et
l'élevage ; le niveau de production de l'agriculture de rente est
fonction du climat et des incertitudes et le niveau de production de
l'élevage
65
Joë& Sotamenou Mémoire de DEA- PTCI /UY II/
Octo6re 2005
est fonction des producteurs généralement
regroupés en syndicat qui contrôlent ainsi le niveau des prix ;
- Les activités dont les biens sont
non-échangeables : il s'agit de l'agriculture vivrière et le
travail familial. La production de l'agriculture vivrière est
déterminée ex-ante à cause des contraintes
foncières et de la productivité à court terme. En ce qui
concerne le travail familial, on suppose qu'il n'y a pas de substitution
parfaite entre le travail salarié et le travail familial dans les
activités de production en milieu urbain.
a2- Les rejets urbains et
l'agriculture
La question de la gestion des déchets ménagers
préoccupe malheureusement très peu nos sociétés
alors qu'une approche pragmatique, bien que partielle, de cette
problématique consiste à favoriser le recyclage d'une partie des
rejets urbains dans l'agriculture selon des méthodes et des normes
acceptables. D'ailleurs, un programme mené par le World Engineering, la
Banque mondiale, les acteurs du secteur privé et des ONG en a fait son
objectif principal. Dans le premier rapport de ce programme le concept de base
du recyclage agricole a été décrit (Sanio et al, 1998).
On constate actuellement qu'il n'y a pas de lien entre la
gestion des rejets urbains et l'agriculture (Figure 3.2). D'un coté, les
ville produisent de grandes quantités de rejets riches en eau, en
matière organique et minéraux (voir la composition des
déchets ménagers de Yaoundé), qui sont rejetés
directement dans la nature, dans les cours d'eau, soit éliminés
par enfouissement dans les décharges par incinération ou par
traitement en station d'épuration. De l'autre côté, l'AUP
est contrainte à l'intensification, consomme de grandes quantités
de fertilisants (le plus souvent importés) et d'eau puisée dans
les ressources en eau potable (réseaux, fleuves, nappes). Une nouvelle
stratégie (Figure 3.3) pourrait, au contraire, viser à
créer (ou recréer) des liens entre la gestion des rejets urbains
et l'agriculture, sans remettre en cause le développement industriel et
économique des villes. Cette stratégie repose sur des techniques
de traitement des déchets et effluents, qui doivent aboutir à des
coproduits facilement utilisables par l'agriculteur, sans dangers pour la
santé et avec risque minimum sur le milieu naturel.
Figure 3. 2 : Situation actuelle : absence de lien entre
rejets urbains et agriculture
Besoins Elimination
Eau potable urbains Rejets (Rejet direct, décharge,
stations)
Engrais et amendements organo-minéraux,
Produits
Agricoles eau d'irrigation
Semences
Transformation, Récoltes AUP Autres
Conditionnement intrants
Source : Smith, O.B. et al, 2004, p.144
Joë& Sotamenou Mémoire de DEA- PTCI /UY II/
Octo6re 2005
Transformation, Traitement
Conditionnement Résidus adapté
Figure 3. 3: Nouvelle stratégie : créer des
liens entre rejets urbains et agriculture
Fig e 3 Nouvelle str gie : créer les liens entre
rejetrbas e agriculture
Autres
Source : Smith, O.B. et al, 2004, p.144 intrants
Produits Besoins urbains
Agricoles Rejets
Récoltes
Eau potable
AUP Semences
Engrais et amendements organo-minéraux, Eau
d'irrigation
b- Les avantages et les inconvénients de
l'agriculture en ville
Depuis le début des années 1970, l'AUP fait
l'objet d'un nombre croissant d'intervention par le biais d'agences
internationales d'aide au développement. L'importance qui lui est
accordée reflète l'évolution des politiques et des
programmes en matière de développement international. Certains
chercheurs comme Henning (1997), Rees (1997) et Smit (1996) affirment que
l'agriculture urbaine constitue une activité qui favorise
l'émergence de nouvelles solidarités socio-économiques et
une participation civique accru, surtout lorsqu'elle est pratiquée dans
un cadre collectif. Paiement (1999) suggère pour sa part que la mise sur
pied de jardins communautaires en milieu urbain au Québec reflète
la volonté des citoyens de reprendre du pouvoir sur leur vie quotidienne
grâce à une autonomie alimentaire accrue.
b1- Les avantages de l'AUP
Aujourd'hui, l'AUP connaît un essor fulgurant du fait
de la croissance urbaine accélérée. Le plus souvent
motivée par la recherche de la sécurité alimentaire et
l'amélioration du bien-être des citoyens. L'AUP contribue à
alimenter de manière non négligeable les différents
ménages de toutes les couches de populations des villes des pays en
développement. Elle permet à ces milieux de citoyens
(producteurs, transporteurs, vendeurs et consommateurs) d'assurer leurs moyens
d'existence dans la cité.
67
Joë& Sotamenou Mémoire de DEA- PTCI /UY II/
Octo6re 2005
Contribution à l'approvisionnement alimentaire
: Une étude menée par Nguegang (2002) dans le cadre du
PADIAUP13 chez 38 associations, GIC et Groupes d'exploitants
agricoles urbains et périurbains dans la ville de Yaoundé montre
que ces acteurs contribuent véritablement à l'approvisionnement
alimentaire de part la diversité et la quantité de leur
production. L'AUP sert également "d'amortisseur" pour les moins pauvres
durant les périodes de crise afin de maintenir certains niveaux de
sécurité alimentaire (Seeth et al, cité par Nugent, 2000).
Les nombreux agriculteurs urbains de sexe féminin sont surtout
susceptibles de se servir du revenu provenant de l'agriculture pour nourrir
leurs familles.
Gockowski et al (2003) révèle que dans la ville
de Yaoundé 41% des ménages urbains les plus pauvres consomment
les légumes produits dans leur jardin. La même étude montre
que la production des ménages en milieu urbain représente 10% de
la consommation totale des ménages. Selon Soua et al (2004), 64% des
ménages exploitant les bas-fonds de Yaoundé pour
l'autoconsommation.
Contribution à la résorption du
sous-emploi : Dans la ville de Yaoundé comme dans toutes les
villes africaines, beaucoup de citadins développent le petit
élevage de bétail (porcs, lapins) de volaille (poulets, canards),
produisent des légumes condiments, fruits et fleurs (CIPRE, 2002). Cet
engouement pour ce type d'activité est dû d'une part aux habitudes
culturelles mais aussi au chômage et à la pauvreté qui
frappe les jeunes qui y voient un refuge.
Face à cette situation, l'agriculture apparaît
comme une nouvelle potentialité d'emploi pour certains ; les femmes et
les jeunes étant aujourd'hui les principaux acteurs cette
activité devenu importante au fil du temps. Il est important de noter
que dans la ville de Yaoundé, l'AUP se développe beaucoup plus
dans les bas-fonds marécageux.
La commercialisation des produits et leur transformation dans
la restauration de rue emploient également beaucoup de femmes et de
jeunes qui y voient une source importante de revenus. Malgré leur
importance, tous ces emplois indirects sont difficiles à
dénombrer. Les activités lucratives des secteurs formels et
informels étant plus ou moins en saturation, la pauvreté a
atteint des proportions inquiétantes, 30% des populations de la ville de
Yaoundé sont menacés et l'insécurité alimentaire
affecte 28%. C'est ainsi que pour survivre ou améliorer leur revenu, les
jeunes chômeurs sont obligés de s'engager dans les
activités agricoles dans les bas-fonds marécageux ou sur tout
espace publique disponible dans le périmètre urbain. Le tableau
3. 1 montre l'indice de pauvreté en milieu urbain au Cameroun, indice
publié en 1999 par le PNUD.
Tableau 3. 1 : Incidence de la pauvreté en milieu
urbain
13 Programme d'appui au développement
Intégré de l'agriculture urbaine et périurbaine du
CIPRE
68
Joë& Sotamenou Mémoire de DEA- PTCI /UY II/
Octo6re 2005
Contribution à l'aménagement urbain et
périurbain : L'horticulture urbaine (maraîchage et
floriculture) permet de conserver des espaces verts au sein de l'espace
bâti, elle a une valeur écologique réelle. Elle
recèle des richesses végétales et fauniques non
négligeables pour le maintien de la biodiversité. Les
différentes facettes de sa fonction environnementale mettent en
évidence que son exploitation à des fins agricoles et sa
protection peuvent contribuer au maintien de l'équilibre
écologique de la région dans son ensemble. Selon le CIPRE (2002),
l'horticulture en pleine expansion dans la ville de Yaoundé tout comme
la sylviculture dans les bas-fonds inondés, participent également
à l'amélioration de l'architecture urbaine. C'est d'ailleurs fort
du rôle qu'il joue dans l'aménagement urbain que la journée
mondiale de l'environnement a été célébrée
le 05 juin 2005 sous le thème « Des villes vertes, un plan pour la
planète... ».
Contribution au recyclage des déchets :
La modernisation et l'intensification des systèmes de
production induisent une plus forte utilisation d'intrants. Les producteurs
essayent de répondre à cette demande par le recyclage de
différents types de déchets14. En milieu
périurbain, la plupart des petits maraîchers possèdent
également des animaux ; ils peuvent donc valoriser le fumier et les
sousproduits de maraîchage. Les activités de tri et de tamisage
des déchets urbains emploient plusieurs personnes dans certains
quartiers de Yaoundé, d'après nos propres observations. Le
produit obtenu est utilisé dans le maraîchage et la floriculture.
Une étude menée à Yaoundé par Lemeilleur (2002)
concernant les systèmes de production du bananier dans l'AUP de
Yaoundé, montre que lorsque les parcelles sont assez proches des
habitations et qu'elles n'ont pas de grande superficie, elles
bénéficient souvent des ordures ménagères, des
cendres de cuisine et des déjections animales des élevages.
Contribution au renouvellement de l'oxygène de
l'air : La végétation urbaine ainsi constituée
par les plantes agricoles, améliore la qualité de l'air en
piégeant les émissions de gaz issues de carburants fossiles, et
l'évaporation rafraîchit l'atmosphère.
b2- Les inconvénients de
l'AUP
Les effets négatifs de l'AUP sont les plus visibles et
conduisent le plus souvent à la perception défavorable qu'elle
suscite de la part des administrateurs de la ville. L'utilisation de
déchets (notamment les eaux usées) et de pesticides, les
déjections animales, la divagation des animaux sont autant de sources de
problèmes pour les populations et l'environnement citadin.
Impact sur la santé humaine :
L'utilisation de déchets solides ou liquides en agriculture
urbaine comporte des risques importants pour la santé humaine. Une
prudence accrue est de rigueur dans le cas d'utilisation de déchets sur
les cultures maraîchères dont les feuilles sont consommées,
étant donné que certains métaux, comme le cadmium,
s'accumulent préférentiellement dans les parties
foliaires15. Des virus, des bactéries, des
protozoaires et des helminthes pathogènes passent dans les
excréta des personnes infectées et se retrouvent dans les eaux
usées.
14 Fall ST, Fall AS, éds. Cités horticoles en
sursis ? L'agriculture urbaine dans les grandes Niayes du
Sénégal. Ottawa : CRDI, 2001 ; 140 p.
15 Niang S. (1996), « Utiisation des eaux usées
domestiques en maraîchage périurbain à Dakar
(Sénégal) » Sécheresse 1996 ; 3 : 217-23.
69
Joë& Sotamenou Mémoire de DEA- PTCI /UY II/
Octo6re 2005
Ils peuvent être transmis soit par voie orale (par la
consommation de légumes contaminés), soit par la peau (dans le
cas des ankylostomes et des schistosomes). Les exploitants agricoles ainsi que
les consommateurs des produits sont exposés aux risques d'intoxication
alimentaire dus à la mauvaise utilisation des pesticides ou à
l'utilisation de ceux périmés. De même, la manipulation
permanentes des pesticides expose les producteurs à des risques divers
pour leur santé (irritation cutanée et oculaire,
altération du système de reproduction ou du système
nerveux, etc.). Les risques de maladies hydriques sont aussi à signaler
: typhoïde, dysenterie amibienne, bilharziose...
Heureusement, l'accès aux structures publiques de
santé au Cameroun est relativement favorable aux populations les plus
démunies dont fait partie les agriculteurs urbains et
périurbains. Une étude menée par Kamgnia (2004) sur
l'analyse de l'impact de la distribution des dépenses publiques de
santé sur l'incidence de recours des malades dans les structures
publiques de santé au Cameroun montre qu'afin de lutter contre l'immense
pauvreté, le gouvernement camerounais a augmenté ses
dépenses de santé depuis la moitié des années 1990.
Cependant cette mesure bien que salutaire ne devrait pas empêcher les
agriculteurs à plus de prudence dans l'exercice au quotidien de leur
activité.
Impact sur l'environnement : L'agriculture
urbaine favorise la pollution des sols et des nappes d'eau souterraines par des
pesticides lors des traitements phytosanitaires ou des engrais chimiques
à l'occasion de la fertilisation des sols. Elle facilite la
prolifération des moustiques, vecteurs de paludisme, dans les bassins
d'irrigation mal entretenus. Selon une récente mise en garde de la FAO
et de l'OMS, environ 30% des pesticides commercialisés dans les PVD ne
sont pas conformes aux standards de qualité internationale et
représente un danger pour la santé et l'environnement. Or ces
produits chimiques contenant des substances dangereuses et des impuretés
interdites ou strictement limitées, sont employés en agriculture.
On note sur ce point les risques suivants : La destruction de la faune et de la
flore utiles (oiseaux, poissons, abeilles, algues), la pollution de
l'atmosphère urbaine et le déséquilibre des
écosystèmes.
Cependant, au-delà de ces multiples nuisances, les
agriculteurs urbains eux-mêmes sont généralement
confrontés à de nombreux problèmes tels que : Le manque de
terre, le coût élevé des intrants, l'absence de formation
et d'information sur l'agriculture, les maladies, les tracasseries par les
agents de la mairie et propriétaires terriens, etc. (Soua et al 2004).
C'est à la faveur des conflits entre agriculteurs urbains et
autorités municipales, qui sont d'ailleurs tous deux agriculteurs
(puisque la CUY ou la mairie veut les déguerpir pour planter su leurs
parcelles des eucalyptus), qu'un atelier sur le développement de
l'agriculture urbaine et périurbaine en Afrique de l'Ouest et du Centre
s'est tenu à Yaoundé. Pendant plusieurs jours (entre le 30
octobre et le 04 novembre 2005), plus de 200 spécialistes des questions
aussi bien environnementale, démographique, urbaine,
qu'économique se sont réunis autour des décideurs et
agriculteurs afin de proposer d'éclairer chacune des parties (Etat et
exploitants urbains) quant au rôle qui doit être le leur pour que
les villes africaines soit belles et moins polluées.
70
Joë& Sotamenou Mémoire de DEA- PTCI /UY II/
Octo6re 2005