1.3. ÉVOLUTION DU CODE FORESTIER
La prise conscience de la dégradation avancée sa
forêt a suscité la réaction de la Côte d'Ivoire. Cela
se justifie par la succession de trois (03) codes forestiers, de 1965 à
2019.
1.3.1. 1965 : la loi n° 65-425 du 20 décembre
1965, portant Code Forestier
Cette réaction se traduit par l'adoption de deux (2)
importantes lois : la loi n° 65-255 du 4 août 1965, relative
à la protection de la faune et à l'exercice de la chasse et la
loi n° 65-425 du 20 décembre 1965, portant code
forestier.
Cette dernière loi définit le domaine forestier
de l'Etat, les aires de protection et de reboisement ainsi que les
catégories de droits qui existent dans le domaine forestier. Le code
forestier de 1965 prévoit également la constitution de
réserves et de forêts classées. Elle réglemente
même l'exercice des droits coutumiers et la délivrance des
concessions d'exploitation forestière dans les forêts du domaine
de l'Etat.
Par la suite de nombreux textes d'application viendront
préciser l'esprit de protection de la forêt ivoirienne en
dégradation continue. On peut citer l'un des plus importants qui est le
décret n° 78-231 du 15 mars 1978 fixant les modalités de
gestion du domaine forestier de l'État, qui subdivise le domaine
forestier de l'Etat en deux. D'une part le domaine forestier permanent de
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l'Etat qui renferme les forêts classées et les
sites écologiques protégés et le domaine forestier
rural de l'Etat qui initialement constituait une réserve
de terres pour les opérations agricoles.
À partir de 1994, un certain nombre de mesures sont prises
telles que :
- l'interdiction de l'exploitation forestière au-dessus du
8ème parallèle ;
- le gel de l'exploitation forestière dans les
périmètres à cheval sur la zone rurale et les
forêts classées ;
- l'intensification du reboisement villageois.
Malheureusement, ces réformes restaient dans le respect
des trois objectifs globaux de la loi de
1965 portant Code forestier à savoir :
- l'exploitation forestière ;
- le développement agricole ;
- la conservation de la biodiversité pour la
préservation de la flore et de la faune de Côte
d'Ivoire et pour les besoins écologiques et de
santé des populations.
La dégradation de la forêt ivoirienne a
continué.
1.3.2. 2014 : la loi n°2014-427 du 14 juillet 2014,
portant Code Forestier
Au regard des évolutions de la politique internationale
de protection de l'environnement en général, et des ressources
forestières en particulier, les prémices d'un nouveau code
forestier se mette en place. Elles sont renforcées par la
Déclaration de Rio de Janeiro de Juin 1992 adoptée à la
2ème Conférence des Nations-Unis sur l'Environnement et le
Développement.
Elles mettent à nue les lacunes de la Loi n°65-425
du 20 décembre 1965 portant Code Forestier vis-à-vis de ces
exigences de renforcer les mesures de gestion durable des ressources
forestières. Ces insuffisances concernent notamment :
- l'inadéquation de définitions, d'objectifs et
de principes fondamentaux relatifs au secteur forestier ;
- l'absence de dispositions juridiques relatives au statut des
forêts et bois sacrés en dépit de leur grand nombre ;
- l'inexistence d'un mécanisme de financement durable de
la forêt ;
- l'absence de référence à la gouvernance
forestière, notamment la certification, la traçabilité en
matière forestière et la valorisation des services
environnementaux de la forêt dans la lutte contre les changements
climatiques et la promotion de la recherche forestière ;
- la nécessité de renforcer la fonction de
Police Judiciaire des Agents assermentés des Eaux et Forêts ;
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- l'absence d'un plan d'aménagement simplifié des
forêts du domaine rural ;
- la faiblesse des sanctions pénales et pécuniaires
;
- la faible implication des collectivités territoriales
et des privés dans la création et la gestion des forêts
;
- la création de plantations forestières
uniquement pour la production de bois d'oeuvre et d'ébénisterie
et non pour des raisons écologiques.
La persistance de ces insuffisances ne pouvait que
contribuer à la dégradation des ressources
forestières.
Dès lors, l'édiction d'une nouvelle loi, alliant
à la fois les dispositions pertinentes de la loi de 1965, encore utiles
et les nouvelles préoccupations, s'imposait comme la voie
appropriée.
Ainsi, le nouveau code forestier de 2014 prévoit des
règles et des principes qui permettent notamment :
- de maintenir le potentiel exploitable de la forêt
naturelle ;
- de restaurer le couvert végétal, en
priorité en zones pré-forestières et de savane ; - de
poursuivre le reboisement et l'aménagement des forêts
classées ;
- de contribuer à la lutte contre les changements
climatiques ;
- de promouvoir la recherche forestière ;
- d'instituer un mécanisme de financement durable des
forêts ainsi qu'un taux de couverture forestière plus important
;
- d'améliorer la transformation et de règlementer
la commercialisation du bois.
Le nouveau code forestier introduit de nouvelles règles
à travers :
- une nouvelle définition de la forêt (article 1)
qui désormais se définit comme étant« toute terre
constituant un milieu dynamique et hétérogène à
l'exclusion des formations végétales résultant
d'activités agricoles, d'une superficie minimum de 0,1 ha portant des
arbres dont le houppier couvre au moins 30% de la surface et qui peuvent
atteindre à maturité une hauteur minimale de 5 mètres
» alors que le code de 1965 définissait la forêt comme un
« ensemble des formations végétales dont les fruits
exclusifs ou principaux sont les bois d'ébénisterie , d'industrie
et de service, les bois de chauffage et à charbon et qui ,accessoirement
, peuvent produire d'autres matières telles que bambou, écorces,
latex, résines gommes graines et fruits » ;
- la prise en compte de l'arbre hors forêt comme
élément constitutif de la couverture forestière ;
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- la prise en compte de toutes les dimensions
socio-économique, éducative, touristique, scientifique et
environnementale des forêts à travers une classification
fondée, d'une part, sur le domaine forestier classé et, d'autre
part, sur le domaine forestier protégé ;
- l'évolution des missions des Agents de
l'Administration Forestière qui deviennent désormais des Agents
de Police Judiciaire ;
- la prise en compte des principes fondamentaux de gestion de
la forêt tels que définis à travers les instruments
juridiques internationaux (Convention de Rio de Janeiro sur la Diversité
biologique, Convention CITES sur le commerce international des espèces
de faune et de flore sauvages menacées d'extinction...) ;
- la détermination d'un taux minimum de couverture
forestière (20%) ;
- l'harmonisation de la gestion forestière avec les
autres secteurs tels que l'agriculture, la pêche, l'élevage...)
;
- l'apparition de la notion de domaine forestier public de
l'Etat et de domaine forestier propre des collectivités territoriales
(forêts de protection, forêts d'expérimentation,
forêts de récréation), d'une part, et le domaine forestier
privé (forêts classées de production, forêts
protégées), d'autre part ;
- l'introduction de la notion de plantation forestière
au même titre que tout autre plantation agricole ;
- la reconnaissance de la mise en valeur écologique au
même titre que la mise en valeur agricole ;
- l'institution d'un plan d'aménagement, instrument de
gestion durable des forêts ;
(MINEF, 2015).
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